Maladie cardiovasculaire et stade du cancer du sein au diagnostic
Association entre les maladies cardiovasculaires et le stade du cancer du sein au moment du diagnostic
Contexte académique
Les maladies cardiovasculaires (MCV) et le cancer sont les deux principales causes de mortalité aux États-Unis. Bien qu’ils partagent de nombreux facteurs de risque communs, des études récentes suggèrent que les maladies cardiovasculaires pourraient directement favoriser l’apparition et la progression du cancer. En particulier, dans le cas du cancer du sein, les MCV pourraient induire un état d’immunosuppression, accélérant ainsi la croissance et la diffusion des cellules tumorales. Par conséquent, les chercheurs ont émis l’hypothèse que les individus atteints de maladies cardiovasculaires pourraient être plus susceptibles d’être diagnostiqués à un stade avancé de cancer du sein. La validation de cette hypothèse pourrait non seulement aider à comprendre les mécanismes sous-jacents entre les MCV et le cancer, mais aussi ouvrir de nouvelles perspectives pour le dépistage personnalisé du cancer du sein.
Source de l’article
Cette étude a été menée par Ivan Angelov, Allen M. Haas, Elizabeth Brock, Lingfeng Luo, Jing Zhao, Benjamin D. Smith, Sharon H. Giordano, Nicholas J. Leeper et Kevin T. Nead. L’équipe de recherche provient de plusieurs institutions, notamment le MD Anderson Cancer Center de l’Université du Texas et la Stanford University School of Medicine. L’article a été publié le 2 janvier 2025 dans la revue JAMA Network Open, sous le titre Cardiovascular Disease and Breast Cancer Stage at Diagnosis.
Conception et méthodologie de l’étude
Conception de l’étude
Il s’agit d’une étude cas-témoins basée sur la population, utilisant les bases de données liées SEER-Medicare (Surveillance, Epidemiology, and End Results-Medicare) de 2009 à 2020. Les participants étaient des femmes âgées de 66 ans et plus, diagnostiquées avec un cancer du sein invasif. L’objectif principal était d’évaluer si les patientes atteintes d’un cancer du sein avancé au moment du diagnostic étaient plus susceptibles de présenter des maladies cardiovasculaires que celles diagnostiquées à un stade précoce.
Déroulement de l’étude
Sélection de la cohorte : Les chercheurs ont identifié des patientes diagnostiquées avec un cancer du sein invasif entre 2010 et 2019 dans la base de données SEER-Medicare. Pour contrôler l’impact des comportements de santé sur le retard de diagnostic, seules les patientes ayant subi une mammographie de dépistage dans les deux années précédant le diagnostic de cancer du sein ont été incluses.
Variables d’exposition et covariables : Le statut des maladies cardiovasculaires a été déterminé à partir des dossiers médicaux des 3 à 24 mois précédant le diagnostic de cancer du sein, afin d’éviter que les diagnostics simultanés ne soient considérés comme des découvertes fortuites. D’autres facteurs de confusion potentiels, tels que l’âge, la race, l’éligibilité à Medicare, le lieu de résidence et le statut matrimonial, ont également été pris en compte.
Analyse statistique : L’étude a utilisé un design cas-témoins basé sur le stade du cancer au moment du diagnostic, comparant les patientes atteintes d’un cancer du sein précoce (T1-T2, N0, M0) à celles atteintes d’un cancer avancé (T3-T4 ou N+ ou M+). Une analyse de score de propension (Propensity Score Matching) a été utilisée pour contrôler les facteurs de confusion, et des modèles de régression logistique ajustés multivariés ont été employés pour analyser l’association entre les MCV et le stade du cancer du sein.
Résultats principaux
L’étude a inclus 19 292 patientes atteintes de cancer du sein, dont 49,1 % présentaient des maladies cardiovasculaires avant le diagnostic de cancer. Après ajustement par score de propension et analyse multivariée, les résultats ont montré que les patientes atteintes d’un cancer du sein avancé au moment du diagnostic avaient un risque significativement plus élevé de présenter des MCV (OR=1,10 ; IC à 95 % : 1,03-1,17 ; p=0,007). Cette association était particulièrement marquée pour les cancers du sein à récepteurs hormonaux positifs (HR+) (OR=1,11 ; IC à 95 % : 1,03-1,19 ; p=0,006), mais pas pour les cancers à récepteurs hormonaux négatifs (HR-) (OR=1,02 ; IC à 95 % : 0,86-1,21 ; p=0,83).
Conclusions et implications
Cette étude est la première à valider, dans une large population, l’association entre les maladies cardiovasculaires et le stade du cancer du sein au moment du diagnostic, montrant que les individus atteints de MCV sont plus susceptibles d’être diagnostiqués à un stade avancé de cancer du sein. Cette découverte apporte de nouvelles preuves sur les mécanismes potentiels liant les MCV et le cancer, et pourrait orienter les stratégies de dépistage personnalisé du cancer du sein. Des recherches futures sont nécessaires pour confirmer cette association et explorer comment les interventions pourraient améliorer le pronostic des patientes.
Points forts de l’étude
- Découverte majeure : L’étude a révélé une association significative entre les MCV et un stade avancé de cancer du sein au moment du diagnostic, en particulier pour les cancers à récepteurs hormonaux positifs.
- Innovation méthodologique : L’utilisation du score de propension et des modèles de régression logistique ajustés multivariés a permis de contrôler efficacement les facteurs de confusion.
- Implications cliniques : Cette étude ouvre de nouvelles perspectives pour le dépistage personnalisé du cancer du sein, notamment pour les populations à haut risque atteintes de MCV.
Autres informations pertinentes
L’étude souligne également que les maladies cardiovasculaires pourraient induire un état d’immunosuppression, accélérant ainsi la croissance et la diffusion du cancer du sein. Ce mécanisme a également été validé dans des modèles animaux, renforçant l’hypothèse d’un lien direct entre les MCV et le cancer. Les recherches futures devraient approfondir ce mécanisme et explorer comment les interventions pourraient améliorer le pronostic des patientes.
Cette étude fournit de nouvelles preuves sur l’association entre les maladies cardiovasculaires et le cancer, et offre des perspectives importantes pour le dépistage personnalisé du cancer du sein.