Évaluation des résultats du traitement utilisant DNLR et GNRI dans la thérapie combinée avec atezolizumab et bevacizumab pour le carcinome hépatocellulaire
Évaluation pronostique du DNLR et du GNRI dans le traitement combiné du carcinome hépatocellulaire
Contexte
Le carcinome hépatocellulaire (Hepatocellular Carcinoma, HCC) est l’une des tumeurs malignes les plus courantes dans le monde, en particulier en Asie. En raison de ses symptômes précoces peu apparents, de nombreux patients sont diagnostiqués à un stade avancé, rendant la résection chirurgicale impossible. Ces dernières années, le traitement combiné d’inhibiteurs de points de contrôle immunitaires (Immune Checkpoint Inhibitors, ICIs) et d’anti-angiogéniques (comme l’association Atezolizumab et Bevacizumab) a montré des bénéfices significatifs en termes de survie chez les patients atteints de HCC non résécable. Cependant, la prédiction précise de la réponse au traitement et du pronostic des patients reste un défi.
Les marqueurs pronostiques traditionnels tels que le ratio neutrophiles/lymphocytes (Neutrophil-to-Lymphocyte Ratio, NLR) ont démontré leur valeur prédictive chez les patients atteints de HCC. Cependant, le calcul du NLR nécessite des données sur le nombre de lymphocytes, qui ne sont pas toujours disponibles en pratique clinique. Pour pallier cela, les chercheurs ont proposé le ratio neutrophiles dérivé/lymphocytes (Derived Neutrophil-to-Lymphocyte Ratio, DNLR), qui ne nécessite que le nombre de neutrophiles et de leucocytes, offrant ainsi une alternative pour les bases de données manquant d’informations sur les lymphocytes. De plus, l’indice de risque nutritionnel gériatrique (Geriatric Nutritional Risk Index, GNRI), qui reflète l’état nutritionnel des patients, est également considéré comme étant étroitement lié au pronostic du cancer.
Cette étude vise à évaluer la valeur clinique du DNLR et du GNRI dans la prédiction du pronostic des patients atteints de HCC non résécable traités par une association d’Atezolizumab et de Bevacizumab, et à explorer l’effet prédictif de l’utilisation combinée du GNRI avec le DNLR ou le NLR.
Source de l’article
Cet article a été rédigé par Atsushi Naganuma et ses collègues de plusieurs hôpitaux et instituts de recherche japonais, dont le NHO Takasaki General Medical Center, la Gunma University Graduate School of Medicine et l’Ehime Prefectural Central Hospital. L’article a été publié en 2025 dans la revue Cancer Medicine sous le titre Evaluation of Treatment Outcomes Using DNLR and GNRI in Combination Therapy with Atezolizumab and Bevacizumab for Hepatocellular Carcinoma.
Méthodologie et résultats
1. Conception de l’étude et sélection des patients
Il s’agit d’une étude rétrospective multicentrique incluant 975 patients atteints de HCC traités par Atezolizumab et Bevacizumab dans plusieurs hôpitaux japonais entre septembre 2020 et janvier 2023. Après sélection, 310 patients ont été inclus dans l’analyse. Les critères d’inclusion comprenaient : un premier traitement par Atezolizumab et Bevacizumab, des données complètes sur les leucocytes, les neutrophiles et le GNRI. Les critères d’exclusion comprenaient : l’absence de données sur les leucocytes ou les lymphocytes, l’impossibilité d’évaluer la réponse au traitement, et un traitement de deuxième ligne.
2. Collecte des données et calcul des indicateurs
Les chercheurs ont examiné les dossiers médicaux des patients et recueilli des caractéristiques cliniques telles que l’âge, le sexe, l’indice de masse corporelle, la fonction hépatique (classification de Child-Pugh et grade modifié d’albumine-bilirubine, mALBI), et le stade de la tumeur (classification de Barcelone, BCLC). Le DNLR a été calculé selon la formule : DNLR = nombre de neutrophiles / (nombre de leucocytes - nombre de neutrophiles). Le GNRI a été calculé selon la formule : GNRI = (14,89 × albumine sérique [g/dL]) + (41,7 × [poids actuel/poids idéal]). Les valeurs seuils pour le NLR et le DNLR ont été fixées respectivement à 3,0 et 1,6.
3. Réponse au traitement et analyse de survie
Les patients ont reçu un traitement combiné d’Atezolizumab et de Bevacizumab jusqu’à progression de la maladie ou apparition d’effets indésirables intolérables. La réponse au traitement a été évaluée selon les critères RECIST 1.1 (Response Evaluation Criteria in Solid Tumors), classée en réponse complète (CR), réponse partielle (PR), maladie stable (SD) et maladie progressive (PD). La survie sans progression (PFS) et la survie globale (OS) ont été calculées à partir du début du traitement jusqu’à la progression de la maladie ou au décès.
4. Résultats principaux
- PFS et OS : La médiane de PFS était de 7,2 mois (IC à 95 % : 5,9–8,5), et la médiane d’OS était de 24,9 mois (IC à 95 % : 19,6–30,2).
- Valeur pronostique du DNLR et du NLR : L’OS médian du groupe à DNLR élevé était significativement plus faible que celui du groupe à DNLR faible (9,5 mois vs 25,0 mois, p < 0,001). L’OS médian du groupe à NLR élevé était également significativement plus faible que celui du groupe à NLR faible (16,0 mois vs 25,0 mois, p = 0,008). Le DNLR et le NLR étaient significativement corrélés (coefficient de corrélation de Pearson = 0,523, p < 0,0001).
- Valeur pronostique du GNRI : La PFS et l’OS médianes du groupe à GNRI élevé étaient significativement meilleures que celles du groupe à GNRI faible (PFS : 7,9 mois vs 6,3 mois, p = 0,04 ; OS : 30,6 mois vs 18,9 mois, p = 0,017).
- Score combiné GNRI-DNLR et GNRI-NLR : La PFS et l’OS médianes du groupe à score GNRI-DNLR élevé étaient significativement plus faibles que celles du groupe à score faible (PFS : 2,4 mois vs 7,7 mois, p = 0,001 ; OS : 8,1 mois vs 24,9 mois, p < 0,001). Le score GNRI-NLR a montré une tendance similaire.
5. Analyse multifactorielle
L’analyse multifactorielle a montré que l’étiologie non virale, un AFP ≥ 400 ng/mL et une réponse au traitement de CR ou PR étaient des facteurs prédictifs indépendants de la PFS et de l’OS. Un score GNRI-DNLR ou GNRI-NLR élevé était significativement associé à une PFS et une OS plus faibles.
Conclusion et implications
Cette étude montre que le DNLR peut servir de marqueur alternatif au NLR pour prédire le pronostic des patients atteints de HCC non résécable traités par une association d’Atezolizumab et de Bevacizumab. Le score combiné GNRI-DNLR ou GNRI-NLR permet une meilleure stratification des patients, en particulier en l’absence de données sur les lymphocytes. Cette découverte offre aux cliniciens un outil plus complet pour l’évaluation pronostique, contribuant à optimiser les stratégies de traitement personnalisées.
Points forts de l’étude
- Valeur de substitution du DNLR : Le DNLR peut efficacement remplacer le NLR pour l’évaluation pronostique en l’absence de données sur les lymphocytes.
- Utilisation combinée du GNRI et des marqueurs immunitaires : Le score combiné GNRI-DNLR ou GNRI-NLR améliore significativement la précision de la stratification pronostique.
- Étude rétrospective multicentrique : L’étude inclut 310 patients provenant de plusieurs hôpitaux, offrant une forte représentativité clinique.
Autres informations utiles
Cette étude souligne également l’importance de la fonction hépatique (classification de Child-Pugh et grade mALBI) dans le pronostic des patients atteints de HCC, et indique que la stratégie de traitement doit prendre en compte la fonction hépatique, les caractéristiques tumorales et les antécédents thérapeutiques du patient. Les recherches futures pourraient valider l’applicabilité du score GNRI-DNLR à d’autres types de cancer et schémas thérapeutiques.