Conditions auto-immunes et risque de cancer gastrique dans une étude basée sur la population au Royaume-Uni
La relation entre les maladies auto-immunes et le risque de cancer gastrique dans la population britannique
Introduction
Bien que l’incidence globale du cancer gastrique ait diminué au cours des dernières décennies, un taux croissant de cancer gastrique a été observé récemment chez les jeunes dans certains pays occidentaux. Cette tendance pourrait être liée à l’augmentation des maladies auto-immunes, lesquelles provoquent généralement une inflammation, et l’inflammation a été trouvée comme un précurseur de nombreux cancers, en particulier l’anémie pernicieuse, qui est fortement liée au cancer gastrique. L’anémie pernicieuse, causée par une gastrite auto-immune, implique la destruction des cellules de la paroi de l’estomac et réduit la capacité de liaison de la vitamine B12 dans le corps, augmentant ainsi le risque de cancer gastrique. Par conséquent, explorer la relation entre les maladies auto-immunes et le cancer gastrique dans la recherche épidémiologique est d’importance et d’urgence.
Source de l’article
Cet article a été co-rédigé par des chercheurs de diverses institutions, incluant l’Institut National du Cancer (National Cancer Institute) aux États-Unis et le Centre des Sciences des Données de Santé de l’Université d’Aberdeen au Royaume-Uni. L’article a été publié le 22 mai 2024 dans le “British Journal of Cancer”, avec John D. Murphy, Shahinaz M. Gadalla, Lesley A. Anderson parmi les auteurs.
Conception et méthodes de l’étude
Sujets de l’étude et sources de données
L’étude a utilisé la “Base de données de recherche sur la pratique clinique” (Clinical Practice Research Datalink, CPRD) du Royaume-Uni, une vaste base de données longitudinale contenant des dossiers de soins primaires britanniques et pouvant être liée à d’autres sources de données. Une étude de cas-témoins nichée a été menée dans cette base de données. Les cas de cancer gastrique ont été appariés jusqu’à dix contrôles non cancéreux pour l’âge et le sexe.
Conception expérimentale
L’étude a examiné 39 maladies auto-immunes courantes, classées en différents systèmes d’organes pour analyse, y compris les maladies systémiques/tissulaires, hématologiques, cardiovasculaires, endocriniennes, dermatologiques et oculaires, gastro-intestinales, et neurologiques. L’exposition aux maladies auto-immunes a été définie comme ayant un diagnostic clinique de ces maladies deux ans avant le diagnostic de cancer gastrique chez le cas contrôle. Les ratios de cotes (OR) et les intervalles de confiance à 95% (IC) calculés par régression logistique conditionnelle ont été utilisés pour évaluer leur association avec le cancer gastrique.
Méthodes d’analyse des données
Pour minimiser le risque de causalité inverse, un délai de deux ans entre l’exposition et l’issue a été établi. Les résultats et expositions ont été déterminés en utilisant les codes de la Classification Internationale des Maladies, dixième révision (CIM-10), ainsi que les codes médicaux et de lecture dans la CPRD. Le statut tabagique a également été déterminé à partir des codes médicaux et de lecture dans la CPRD. Une correction de Bonferroni a été appliquée pour ajuster les tests d’hypothèses multiples. Quatre analyses de sensibilité ont été menées pour assurer la fiabilité des résultats de l’étude. Enfin, une méta-analyse à effets fixes des études de cohorte prospectives existantes et de cette étude a également été réalisée.
Résultats de l’étude
Analyse globale
Parmi 64 812 contrôles, 10,2% avaient une maladie auto-immune quelconque, tandis que parmi 6 586 cas de cancer gastrique, 11,5% étaient atteints. L’étude a trouvé une association entre toute maladie auto-immune et le cancer gastrique (OR = 1,10, IC 95% : 1,01-1,20). Cependant, cette association est devenue non significative après exclusion de l’anémie pernicieuse (OR = 1,00, IC 95% : 0,92-1,10). L’anémie pernicieuse elle-même a considérablement augmenté le risque de cancer gastrique (OR = 2,75, IC 95% : 2,19-3,44).
Analyses de sous-groupes par sexe, âge et site anatomique
La force de l’association était similaire chez les hommes et les femmes. L’analyse par âge a montré que l’association était plus significative dans le groupe ≥50 ans (OR = 2,74, IC 95% : 2,18–3,43), mais n’était pas significative dans le groupe plus jeune. L’analyse par site anatomique a révélé que l’anémie pernicieuse était significativement associée au cancer gastrique non cardiaque (OR = 3,91, IC 95% : 2,31–6,62), mais pas au cancer gastrique cardiaque (OR = 1,71, IC 95% : 0,80–3,65).
Analyse de sensibilité
Même après ajustement pour l’anémie pernicieuse, l’association entre le cancer gastrique et l’anémie aplastique était encore nominalement significative (OR = 14,00, IC 95% : 2,33–84,30). De plus, les résultats de l’analyse complète des cas étaient cohérents avec l’analyse globale, indiquant que d’autres covariables n’avaient pas d’impact fort sur les estimations des résultats.
Discussion
Cette étude a confirmé une corrélation positive entre l’anémie pernicieuse et le cancer gastrique et a étendu cet association à d’autres maladies auto-immunes. Ces résultats soutiennent le mécanisme de l’inflammation dans le développement du cancer, impliquant la prolifération cellulaire et les dommages à l’ADN. L’étude a également renforcé, par une méta-analyse, la conclusion que le risque de cancer gastrique est associé à plusieurs maladies auto-immunes, telles que la cirrhose biliaire primitive, le syndrome des antiphospholipides et la myasthénie grave.
Cet article a révélé les mécanismes potentiels et les tendances par lesquelles les maladies auto-immunes peuvent conduire au cancer gastrique, particulièrement à travers le chemin de l’anémie pernicieuse. Des recherches supplémentaires sur la gastrite auto-immune en tant que voie sont nécessaires lors de l’examen d’autres mécanismes carcinogéniques potentiels.
Conclusion
Cette étude et une méta-analyse à grande échelle ont confirmé la corrélation positive entre les maladies auto-immunes et le risque de cancer gastrique. Les patients atteints d’anémie pernicieuse devraient envisager un dépistage du cancer gastrique. À l’avenir, des normes de diagnostic consensuelles internationales et un grand système international de suivi seraient nécessaires pour relier les patients auto-immuns aux taux d’incidence et de mortalité par cancer, élargissant la compréhension de cette relation. Elle souligne également le besoin urgent de recherches supplémentaires pour élucider les mécanismes biologiques de ces associations.