Efficacité de la combinaison de Cédiranib et d'Olaparib dans le cancer de l'ovaire résistant au platine ou réfractaire primaire au platine
Contexte académique et problématique
Le cancer épithélial de l’ovaire (Epithelial Ovarian Cancer, EOC) est l’une des maladies malignes gynécologiques les plus mortelles. Bien que les thérapies moléculaires ciblées (comme le bevacizumab et les inhibiteurs de PARP) aient amélioré la survie sans progression (Progression-Free Survival, PFS) et, dans certains cas, la survie globale (Overall Survival, OS) des patients, de nombreux patients développent encore un cancer de l’ovaire résistant ou réfractaire au platine (Platinum-Resistant or Platinum-Refractory Ovarian Cancer, PROC). Le pronostic des patients atteints de PROC est sombre, et les options de traitement sont limitées, reposant principalement sur des agents cytotoxiques en monothérapie, tels que la doxorubicine liposomale pegylée (PLD), le paclitaxel hebdomadaire et le topotécan. Bien que l’étude AURELIA ait montré que l’ajout de bevacizumab à la chimiothérapie améliore significativement la PFS et le taux de réponse objective (Objective Response Rate, ORR) chez les patients atteints de PROC, il est nécessaire d’explorer de nouvelles options thérapeutiques.
Le Cediranib est un inhibiteur de la tyrosine kinase VEGFR, et l’Olaparib est un inhibiteur de PARP. Des études ont montré que le Cediranib et l’Olaparib ont une activité antitumorale en monothérapie dans le cancer de l’ovaire récurrent. Le Cediranib inhibe l’angiogenèse tumorale, tandis que l’Olaparib tue les cellules tumorales en inhibant la réparation de l’ADN. Des études précliniques suggèrent que la combinaison de Cediranib et d’Olaparib pourrait augmenter les dommages à l’ADN et inhiber l’angiogenèse tumorale par un effet synergique. Sur la base de ces découvertes, l’étude NRG-GY005 a été conçue pour évaluer l’efficacité du Cediranib, de l’Olaparib et de leur combinaison chez les patients atteints de PROC, en comparaison avec le traitement standard (Standard of Care, SOC).
Source de l’article et informations sur les auteurs
Cette étude a été menée par Jung-Min Lee et ses collègues du National Cancer Institute (NCI) des États-Unis, du NRG Oncology, du Sunnybrook Health Sciences Centre au Canada, et de plusieurs autres institutions. L’article a été publié le 3 octobre 2024 dans le Journal of Clinical Oncology (JCO), avec le DOI https://doi.org/10.1200/jco.24.00683.
Conception et déroulement de l’étude
NRG-GY005 est un essai ouvert, à quatre bras, de phase II/III, visant à évaluer l’efficacité du Cediranib, de l’Olaparib et de leur combinaison chez les patients atteints de PROC. L’étude a inclus des patients atteints de carcinome séreux ou endométrioïde de haut grade, ayant reçu entre 1 et 3 lignes de traitement précédentes. Les critères d’exclusion clés incluaient un traitement antérieur par inhibiteur de PARP ou une thérapie anti-angiogénique dans le cadre d’une maladie récurrente.
L’étude a été divisée en deux phases : la phase II et la phase III. Dans la phase II, les patients ont été randomisés dans quatre groupes de traitement : SOC (paclitaxel hebdomadaire, topotécan ou PLD), Cediranib en monothérapie, Olaparib en monothérapie et la combinaison Cediranib/Olaparib. Lors d’une analyse intermédiaire prévue, le bras Olaparib en monothérapie a été arrêté en raison d’une efficacité insuffisante, et les trois autres bras ont été poursuivis en phase III. Les critères d’évaluation principaux de la phase III étaient la PFS et l’OS, et les critères secondaires incluaient l’ORR et les résultats rapportés par les patients (Patient-Reported Outcomes, PROs).
Résultats principaux
L’étude a inclus 562 patients éligibles, dont 510 ont été analysés en phase III. La durée médiane de suivi était de 42,2 mois. Les résultats ont montré que la PFS médiane était de 3,4 mois pour le groupe SOC, de 5,2 mois pour le groupe Cediranib/Olaparib et de 4 mois pour le groupe Cediranib en monothérapie. Les rapports de risque (Hazard Ratio, HR) pour la PFS du groupe Cediranib/Olaparib et du groupe Cediranib en monothérapie par rapport au groupe SOC étaient respectivement de 0,796 (IC à 98,3 %, 0,597-1,060) et de 0,972 (IC à 98,3 %, 0,726-1,300). L’OS médiane était de 13,6 mois pour le groupe SOC, de 12,8 mois pour le groupe Cediranib/Olaparib et de 10,5 mois pour le groupe Cediranib en monothérapie. Parmi les 443 patients ayant une maladie mesurable, l’ORR était de 24,7 % pour le groupe Cediranib/Olaparib, de 13,1 % pour le groupe Cediranib en monothérapie et de 8,6 % pour le groupe SOC.
En termes de sécurité, aucun nouveau signal de sécurité n’a été identifié. Les événements indésirables liés au Cediranib (comme la diarrhée, la fatigue et l’hypertension) étaient fréquents mais attendus. Les résultats rapportés par les patients n’ont montré aucune différence significative entre le groupe Cediranib/Olaparib et le groupe SOC en ce qui concerne les symptômes liés à la maladie.
Conclusion et signification
L’étude a montré que la combinaison Cediranib/Olaparib présentait une certaine activité clinique en termes de PFS et d’ORR, mais n’était pas significativement supérieure au SOC. Bien que cette combinaison n’ait pas atteint les critères d’évaluation principaux, son efficacité dans certains sous-groupes de patients mérite d’être approfondie. Des recherches futures devraient explorer les biomarqueurs pour identifier les patients susceptibles de bénéficier de cette combinaison et réduire l’exposition aux toxicités pour les patients non répondeurs.
Points forts de l’étude
- Innovation : Il s’agit du premier essai de phase III comparant un régime entièrement oral non chimiothérapeutique à la chimiothérapie chez les patients atteints de PROC.
- Signification clinique : Bien que la combinaison Cediranib/Olaparib n’ait pas significativement amélioré la PFS ou l’OS, son efficacité dans certains sous-groupes de patients ouvre la voie à des traitements personnalisés.
- Sécurité : Aucun nouveau signal de sécurité n’a été identifié, et la combinaison Cediranib/Olaparib a un profil de sécurité gérable.
Directions futures de recherche
Les recherches futures devraient explorer davantage les biomarqueurs pour identifier les patients susceptibles de bénéficier de la combinaison Cediranib/Olaparib. De plus, les mécanismes de résistance aux agents anti-angiogéniques et aux inhibiteurs de PARP doivent être approfondis pour optimiser les stratégies de traitement.