Régime à énergie réduite chez les femmes atteintes de diabète gestationnel : essai clinique randomisé d'intervention diététique DIGEST

Rapport d’étude sur l’intervention diététique à faible énergie pour le diabète gestationnel

Contexte académique

Le diabète gestationnel (Gestational Diabetes Mellitus, GDM) est une forme de diabète diagnostiquée pour la première fois pendant la grossesse, avec une incidence mondiale d’environ 6 à 15 %. Le GDM augmente non seulement les risques de complications à court terme pour la mère et le fœtus, comme les bébés de grande taille pour l’âge gestationnel (Large for Gestational Age, LGA) et le taux accru de césariennes, mais peut également entraîner des problèmes métaboliques à long terme pour la mère et l’enfant, tels que le diabète de type 2 et l’obésité. Bien que la thérapie nutritionnelle médicale soit un pilier de la gestion du GDM, il existe très peu de recherches sur l’apport énergétique optimal, en particulier sur la question de savoir si une restriction énergétique doit être appliquée pendant la grossesse.

Chez les personnes non enceintes, les régimes à faible apport énergétique ont prouvé qu’ils amélioraient le contrôle glycémique chez les patients atteints de diabète de type 2 et réduisaient les besoins en médicaments. Cependant, l’efficacité et la sécurité des restrictions énergétiques pendant la grossesse restent controversées. Les directives internationales actuelles sont principalement conçues pour les femmes enceintes en bonne santé et ne sont pas adaptées aux femmes souffrant de diabète ou d’obésité. Par conséquent, cette étude vise à explorer la sécurité et l’efficacité des régimes à faible énergie dans la gestion du GDM, en particulier leur impact sur les changements de poids maternels, le poids de naissance du fœtus et les résultats métaboliques.

Source de l’article

Cet article a été rédigé par Laura C. Kusinski et al., chercheurs issus de plusieurs institutions renommées, notamment le Centre de Diabète de Leicester de l’Université de Leicester et l’Institut des Sciences Métaboliques de l’Université de Cambridge. Il a été publié en février 2025 dans la revue Nature Medicine, sous le titre « Reduced-energy diet in women with gestational diabetes: the dietary intervention in gestational diabetes digest randomized clinical trial ».

Conception et processus de l’étude

Conception de l’étude

Cette étude est un essai clinique randomisé, multicentrique, en double aveugle et contrôlé, visant à évaluer les effets des régimes à faible énergie chez les patientes atteintes de GDM. Les participantes étaient des femmes enceintes de grossesses uniques avec un IMC ≥ 25 kg/m², réparties au hasard entre un groupe témoin (2000 kcal/jour) et un groupe d’intervention (1200 kcal/jour). L’intervention alimentaire a duré de l’inclusion (29 semaines) jusqu’à l’accouchement, réalisée via des boîtes alimentaires hebdomadaires. Les critères d’évaluation principaux étaient le changement de poids maternel entre l’inclusion et 36 semaines de grossesse ainsi que le score standardisé du poids de naissance des nouveau-nés.

Population étudiée et taille de l’échantillon

L’étude a recruté un total de 425 patientes atteintes de GDM, dont 211 ont été assignées au groupe témoin et 214 au groupe d’intervention. Finalement, 388 patientes (90,1 %) ont fourni des données de poids à 36 semaines, et 382 patientes (89,8 %) ont fourni des données de poids de naissance à l’accouchement.

Mesures d’intervention

Les boîtes alimentaires ont été développées en collaboration avec Mayfield Foods Ltd. Les groupes témoin et intervention recevaient respectivement 2000 kcal/jour et 1200 kcal/jour, avec un rapport macronutriment de 40 % de glucides, 25 % de protéines et 35 % de lipides. Pendant l’étude, l’équipe de recherche contactait les participantes chaque semaine par e-mail ou téléphone pour évaluer leur adhésion et satisfaction.

Collecte et analyse des données

L’étude a collecté des données sur le poids maternel, la glycémie (via la surveillance continue de la glycémie, Continuous Glucose Monitoring, CGM), l’HbA1c, la pression artérielle, le poids de naissance, etc. L’analyse des données a utilisé des modèles de régression linéaire et logistique, ajustés pour les valeurs de base et stratifiés par centre de recherche, avec l’utilisation de multiples imputations pour gérer les données manquantes.

Résultats principaux de l’étude

Critères d’évaluation principaux

L’étude a révélé qu’il n’y avait pas de différence significative dans le changement de poids maternel à 36 semaines entre le groupe d’intervention et le groupe témoin (effet d’intervention : -0,20 kg, IC à 95 % : -1,01, 0,61 ; p > 0,1). De même, aucun écart significatif n’a été observé dans le poids de naissance standardisé des nouveau-nés entre les deux groupes (effet d’intervention : 0,005, IC à 95 % : -0,19, 0,20 ; p > 0,1).

Critères secondaires

Bien que les critères principaux n’aient pas montré de différences significatives, le groupe d’intervention a démontré une réduction significative des besoins en insuline à action prolongée (groupe témoin : 39,2 %, groupe d’intervention : 27,5 % ; OR : 0,36, IC à 95 % : 0,18–0,70 ; p = 0,003). De plus, le niveau d’HbA1c post-partum à 3 mois était significativement plus bas dans le groupe d’intervention que dans le groupe témoin (β : -2,36 mmol/mol, IC à 95 % : -4,46, -0,26 ; p = 0,029).

Analyse exploratoire

Une analyse exploratoire des variations de poids a montré que 40 % des participantes avaient perdu du poids au troisième trimestre (en moyenne 3 kg). La perte de poids était associée à un meilleur contrôle glycémique (augmentation de 7 % du temps dans la plage cible, Time in Range, TIR), à une baisse de la pression artérielle systolique et à une diminution du taux de LGA (OR : 0,52, IC à 95 % : 0,29, 0,93 ; p = 0,027).

Conclusion et signification

Cette étude est la première à valider, par un essai contrôlé randomisé, la sécurité et la faisabilité des régimes à faible énergie chez les patientes atteintes de GDM. Bien que les critères principaux n’aient pas montré de différences significatives, le régime à faible énergie a réduit de manière significative les besoins en insuline à action prolongée et amélioré le contrôle glycémique post-partum. De plus, la perte de poids était associée à plusieurs résultats bénéfiques pour la santé, y compris un meilleur contrôle glycémique, une réduction des bébés LGA et une amélioration de la santé métabolique post-partum.

Ces découvertes offrent de nouvelles perspectives pour la gestion clinique du GDM, en particulier pour les femmes enceintes ayant un IMC ≥ 25 kg/m², où un régime à faible énergie pourrait être utilisé comme une intervention sûre et efficace. Des recherches futures devraient explorer davantage comment promouvoir cette intervention dans la pratique clinique et évaluer son impact sur la santé métabolique à long terme.

Points forts de l’étude

  1. Intervention innovante : Cette étude évalue pour la première fois de manière systématique les effets des régimes à faible énergie chez les patientes atteintes de GDM, comblant ainsi une lacune importante.
  2. Conception multicentrique : L’étude a été menée dans huit centres au Royaume-Uni, assurant une représentativité large et une fiabilité des résultats.
  3. Essai contrôlé randomisé en double aveugle : Grâce à une conception rigoureuse, les biais ont été minimisés au maximum, augmentant la crédibilité des résultats.
  4. Analyse exploratoire : En analysant la relation entre les variations de poids et les résultats de santé, l’étude a révélé les avantages potentiels des régimes à faible énergie.

Autres informations utiles

Les limites de cette étude incluent une proportion plus faible de femmes non blanches dans l’échantillon ainsi que l’impact de la pandémie de COVID-19 sur la collecte des données. Malgré cela, les résultats de l’étude ont une importance clinique significative et fournissent des orientations pour les recherches futures.