Activité antitumorale synergique par double blocage de CCR1 et CXCR2 exprimés sur les cellules myéloïdes dans le microenvironnement tumoral
Activité antitumorale synergique par l’inhibition simultanée de l’expression de CCR1 et CXCR2 dans les cellules myéloïdes
Introduction
Le cancer colorectal (CRC) est une crise sanitaire mondiale dont l’incidence et le taux de mortalité ont rapidement augmenté ces dernières années. Au cours des 15 dernières années, le taux de mortalité lié au CRC a augmenté de plus de 30 % et devrait augmenter encore de 25 % au cours de la prochaine décennie. Malgré des progrès significatifs en matière de chirurgie, radiothérapie, chimiothérapie et thérapies ciblées, les métastases distantes, notamment hépatiques, restent une cause majeure de mauvais pronostic pour le cancer colorectal, touchant au moins un tiers des patients.
Le microenvironnement tumoral (TME) joue un rôle clé dans la progression et la métastase tumorale. Le TME comprend des cellules cancéreuses, des cellules immunitaires, des cellules stromales et diverses cellules hôtes (telles que des macrophages, des fibroblastes et des cellules souches mésenchymateuses). Ces composants interagissent à travers des voies de signalisation telles que TGF-β, TNF et NF-κB pour promouvoir la croissance tumorale, l’invasion, l’angiogenèse, l’évasion immunitaire et la métastase. Les cellules dérivées de la moelle osseuse (BMDCs) telles que les neutrophiles, les monocytes et les cellules suppressives dérivées de la lignée myéloïde (MDSCs) jouent un rôle de plus en plus reconnu dans la tumorigénèse, étant impliquées dans la croissance tumorale, l’angiogenèse, la transition épithélio-mésenchymateuse et les métastases, ce qui en fait des cibles thérapeutiques potentielles. Les neutrophiles, en particulier ceux associés aux tumeurs (TANs), sont identifiés comme des facilitateurs majeurs de la progression cancéreuse.
Les chimiokines régulent l’infiltration et la localisation des cellules immunitaires dans le microenvironnement tumoral à travers leurs récepteurs. Des études ont montré que l’anomalie du signal TGFB dans les cellules de cancer colorectal augmente l’expression de CCL9 chez la souris ou de CCL15 chez l’homme, attirant ainsi les cellules myéloïdes CCR1+ dans la tumeur et favorisant la croissance et la métastase tumorale. Un article publié cette année approfondit l’effet thérapeutique de la double inhibition des récepteurs CCR1 et CXCR2 dans les cellules myéloïdes sur le cancer colorectal.
Source de l’étude
Cet article a été publié en 2024 dans le « British Journal of Cancer » par Hideyuki Masui, Kenji Kawada et al. Les travaux de recherche ont principalement été menés par l’École de médecine de l’Université de Kyoto et ses instituts affiliés, ainsi que par le Rogel Cancer Center de l’Université du Michigan, aux États-Unis. L’étude se concentre sur l’impact de l’inhibition simultanée de l’expression de CCR1 et CXCR2 dans les cellules myéloïdes sur le cancer colorectal.
Méthodologie
L’étude utilise deux modèles de souris atteintes de cancer du côlon : un modèle de tumeur transplantée et un modèle de métastase hépatique. L’équipe de recherche a d’abord généré des souris à double knockout pour CCR1 et CXCR2 (ccr1−/−cxcr2−/−) et a mené des expériences de greffe de moelle osseuse (BM) en reconstruisant des souris sauvages irradiées à dose sublétale avec de la moelle osseuse provenant de souris sauvages, CCR1−/−, CXCR2−/− ou ccr1−/−cxcr2−/−.
Modèles murins et cultures cellulaires : Des expériences ont été menées sur des souris knockout composites et sauvages, en cultivant des cellules de cancer colorectal et leurs lignées cellulaires transgéniques par diverses méthodes pour des expérimentations supplémentaires.
Modèle de tumeur transplantée : Des cellules de cancer colorectal ont été transplantées sous la peau des souris pour surveiller la croissance tumorale et évaluer l’impact des knockouts génétiques ou des interventions par anticorps sur la progression tumorale.
Modèle de métastase hépatique expérimentale : Des cellules de cancer colorectal ont été injectées dans le pôle de la rate des souris et la progression des métastases a été surveillée par imagerie bioluminescente.
Analyse génétique et méthodes expérimentales : Des technologies telles que PCR, cytométrie en flux et immuno-histochimie ont été utilisées pour confirmer les effets du knockout génétique et l’accumulation cellulaire.
Principaux résultats
Expression des chimiokines CXCL et CCL et pronostic du CRC : Les données montrent que les chimiokines CXCL1, CXCL8 et CCL15 sont up-régulées dans les tissus du cancer colorectal et que leurs niveaux élevés dans le sérum sont associés à un mauvais pronostic pour les patients.
Inhibition de l’accumulation des cellules myéloïdes et de la progression tumorale par la double inhibition de CCR1 et CXCR2 : Dans les modèles murins ccr1−/−cxcr2−/−, l’accumulation des cellules myéloïdes diminue significativement et la croissance et la métastase tumorale sont fortement inhibées. Ce résultat a été confirmé par des expériences de greffes de moelle osseuse, où des souris sauvages ayant reçu une greffe de moelle osseuse provenant de ccr1−/−cxcr2−/− montrent une activité antitumorale significative, avec des tumeurs plus petites et une réduction des métastases hépatiques.
Infiltration des cellules immunitaires : L’analyse immuno-histochimique montre une augmentation significative des cellules T CD8+ chez les souris à double knockout, tandis que les neutrophiles Ly6G+, les cellules Treg FOXP3+ et les cellules endothéliales CD31+ diminuent, indiquant que cette double inhibition améliore la réponse immunitaire antitumorale.
Effet synergique de l’anticorps anti-CCR1 avec le knockout du gène CXCR2 : L’étude a également testé un nouvel anticorps neutralisant anti-CCR1, KM5908. Les résultats montrent qu’une utilisation conjointe de KM5908 et du knockout de CXCR2 produit un effet synergique, inhibant davantage la croissance et la métastase tumorale.
Conclusion et implications
Cette étude démontre que l’inhibition simultanée des voies CCR1 et CXCR2 peut significativement inhiber la progression et les métastases hépatiques du cancer colorectal. Cette stratégie pourrait avoir une grande valeur scientifique et des perspectives cliniques prometteuses, indiquant que l’utilisation combinée d’inhibiteurs de CCR1 et CXCR2 pourrait jouer un rôle crucial dans le traitement futur du cancer colorectal.
Points forts et innovations
Utilisation de modèles murins à double knockout : C’est la première fois que des modèles murins ccr1−/−cxcr2−/− sont utilisés dans la recherche sur le cancer, révélant un effet synergique de l’inhibition de CCR1 et CXCR2 sur l’accumulation des cellules myéloïdes et la progression tumorale.
Nouvelle stratégie thérapeutique : L’étude présente le potentiel thérapeutique combiné des anticorps anti-CCR1 et des inhibiteurs de CXCR2, proposant une nouvelle approche pour le traitement du cancer colorectal, ayant des implications significatives pour les futures recherches en traitement du cancer.
Mécanisme pathogénique clair : L’étude révèle qu’inhiber simultanément les récepteurs des chimiokines inflammatoires peut efficacement réguler le microenvironnement immunitaire, renforcer la réponse immunitaire antitumorale et réduire le potentiel des cellules tumorales à proliférer et à métastaser.
Cette recherche fournit une base scientifique solide pour le développement futur de nouvelles options thérapeutiques contre le cancer. Bien que les résultats actuels soient prometteurs, il reste nécessaire de mener davantage d’essais cliniques pour valider ces découvertes et explorer de nouvelles méthodes et stratégies thérapeutiques.