Élimination des macrophages profibrosants à l'aide de peptides d'assemblage bioactivés in vivo améliore la fibrose rénale

Préface

La maladie rénale chronique (MRC) est une affection caractérisée par une détérioration structurelle à long terme des reins, entraînant une perte progressive de la fonction rénale. Actuellement, environ 10% des adultes dans le monde sont affectés par la MRC, causant environ 1,2 million de décès par an. La fibrose rénale est l’une des manifestations pathologiques de la MRC, caractérisée par l’activation des fibroblastes et l’accumulation de matrice extracellulaire (MEC) dans l’interstitium rénal. Bien que des progrès significatifs aient été réalisés dans le traitement des patients atteints de MRC, tels que l’utilisation d’inhibiteurs du système rénine-angiotensine-aldostérone, de nouveaux inhibiteurs du co-transporteur sodium-glucose de type 2 et d’antagonistes non stéroïdiens des récepteurs des minéralocorticoïdes, ces thérapies n’ont qu’un effet anti-fibrotique indirect et il n’existe pas de médicament anti-fibrotique spécifique.

Contexte de la recherche

La gestion de la fibrose rénale est une tâche extrêmement difficile, car la redondance complexe des signaux et la diversité des réponses cellulaires dans les maladies rénales augmentent considérablement la difficulté du traitement. La fibrose rénale s’accompagne généralement d’une réponse immunitaire dominée par les macrophages, qui activent les fibroblastes au site de fibrose. Cependant, les macrophages présentent une grande hétérogénéité, ce qui réduit considérablement leur potentiel en tant que cible thérapeutique. Par conséquent, cette étude vise à éliminer spécifiquement dans l’espace et le temps plusieurs sous-ensembles spécifiques de macrophages qui favorisent la fibrose rénale.

Équipe de recherche et publication

Cette étude a été réalisée par le Département de néphrologie du Premier centre médical de l’Hôpital général de l’Armée populaire de libération de Chine, l’Institut de recherche sur les maladies rénales de l’Armée populaire de libération, le Laboratoire national clé des maladies rénales, le Laboratoire clé de recherche sur les maladies rénales de Pékin et d’autres unités collaboratrices. Les principaux chercheurs incluent Qing Ouyang, Chao Wang, Tian Sang, entre autres. L’article a été publié en ligne dans la revue “CELL Molecular Immunology” le 13 juin 2024.

Méthodologie de recherche

Dans cette étude, les chercheurs ont d’abord identifié les principaux sous-ensembles de macrophages pro-fibrotiques dans les reins (FN1+, SPP1+, ARG1+), et ont construit un glycopeptide de 12 peptides appelé “assemblage in vivo bioactivé PK (BIVA-PK)”, qui peut se lier spécifiquement et s’internaliser dans ces macrophages pro-fibrotiques, remodelant ainsi le microenvironnement rénal en induisant la mort des macrophages pour inhiber la réponse immunitaire pro-fibrotique.

Établissement d’échantillons et de modèles

Les chercheurs ont utilisé un modèle de souris avec lésion d’ischémie-reperfusion unilatérale (uIRI) pour démontrer le processus de fibrose rénale induit par les lésions d’ischémie-reperfusion. La coloration trichrome de Masson et l’analyse immunohistochimique ont révélé le processus de transition de l’inflammation aiguë à l’inflammation chronique et au développement de la fibrose.

Identification des protéines et analyse fonctionnelle

Grâce à des techniques telles que le séquençage d’ARN unicellulaire (scRNA-seq) et la cytométrie de masse (CyTOF), les chercheurs ont réussi à identifier les principaux sous-groupes de macrophages associés à la fibrose rénale. Les macrophages de type M2 CD206+ sont les principaux contributeurs à la fibrose rénale. La coloration par immunofluorescence et la cytométrie en flux ont confirmé la distribution et les niveaux d’expression de ces macrophages dans les sites de fibrose interstitielle rénale.

Traitement spécifique au site

Pour réduire spécifiquement le nombre de macrophages problématiques et atténuer la fibrose rénale, les chercheurs ont conçu un peptide ciblant les macrophages CD206+ en améliorant la technologie des nanoparticules BIVA. Il est modifié avec du mannose à l’extrémité terminale pour assurer sa liaison spécifique au CD206. Il a ensuite été couplé au peptide fonctionnel LTX-315.

Principaux résultats de recherche

Selon l’analyse Western blot et l’immunocoloration, le peptide BIVA-PK modifié structurellement peut entrer spécifiquement dans les macrophages par endocytose dépendante du CD206 et être clivé par la cathepsine B dans les lysosomes. Ensuite, les fragments peptidiques s’auto-assemblent en nanofibres β-feuillets dans la cellule, entraînant le peptide fonctionnel PK pour déclencher la mort des macrophages. BIVA-PK a montré une haute sélectivité et une forte activité anti-fibrotique contre les macrophages pro-fibrotiques in vitro et in vivo.

Distribution in vivo et tests de sécurité

Les données d’imagerie par fluorescence in vivo ont montré que BIVA-PK s’accumule préférentiellement dans les reins endommagés pendant une longue période après l’injection, tandis que l’accumulation dans les reins sains et les autres organes principaux n’est pas significative. L’analyse par fluorescence et l’examen histopathologique des principaux organes ont montré que BIVA-PK n’induisait qu’une toxicité systémique légère et des changements morphologiques modérés.

Vérification de l’efficacité anti-fibrotique

Dans les expériences de traitement spécifique au site, BIVA-PK a significativement atténué la fibrose rénale et amélioré la fonction rénale en inhibant l’accumulation excessive de MEC et l’activation des fibroblastes α-SMA+. L’immunocoloration a montré une réduction significative du nombre de macrophages CD206+ dans les tissus rénaux des souris traitées par BIVA-PK.

Conclusion et signification

BIVA-PK a considérablement amélioré la fibrose rénale en éliminant spécifiquement les macrophages favorisant la fibrose rénale, offrant ainsi une thérapie potentielle pour les patients atteints de MRC. L’étude a montré que BIVA-PK remodèle le microenvironnement induisant la fibrose rénale, arrête le processus de fibrose et protège la fonction rénale, présentant une grande valeur scientifique et des perspectives d’application. Les futures études cliniques devraient valider davantage l’efficacité et la sécurité de cette stratégie thérapeutique.

Perspectives

Bien que BIVA-PK ait démontré sa puissante capacité anti-fibrotique dans l’étude actuelle, il sera nécessaire de clarifier davantage les mécanismes par lesquels la mort des macrophages affecte la réponse immunitaire et la fibrose rénale à l’avenir. De plus, compte tenu des différences entre les espèces, il sera nécessaire d’utiliser des modèles de souris humanisées ou de grands animaux (tels que les primates non humains) avec un plus grand potentiel de translation dans les futures études précliniques pour reproduire la progression de la MRC humaine.

Cette étude, en prouvant que les macrophages FN1+SPP1+MRC1+ sont les principaux contributeurs au microenvironnement pro-fibrotique rénal, a découvert un dodécapeptide - BIVA-PK, qui peut perturber l’homéostasie de la membrane et des mitochondries des macrophages et induire la mort cellulaire, démontrant la puissante efficacité de BIVA-PK pour bloquer la fibrose rénale et protéger la fonction rénale. Cette étude fournit une méthode de traitement potentiellement curative pour les futurs patients atteints de MRC.