L’autocorrélation temporelle permet de prédire l’âge — une analyse approfondie des séries chronologiques MEG

Étude de la prédiction de l’âge cérébral basée sur les séries temporelles MEG

Contexte académique

Avec l’allongement de la durée de vie humaine, il devient de plus en plus important de comprendre comment le cerveau évolue tout au long de la vie. La structure et la fonction du cerveau subissent des changements significatifs avec l’âge, qui affectent non seulement les fonctions cognitives mais sont également liés à plusieurs maladies neurodégénératives (comme la maladie d’Alzheimer). Cependant, notre compréhension actuelle des changements liés à l’âge dans le cerveau reste incomplète, en particulier en ce qui concerne la manière dont l’activité électrique cérébrale (comme celle mesurée par magnétoencéphalographie, MEG) change avec l’âge. Pour résoudre ce problème, les chercheurs ont analysé des données MEG au repos chez un grand groupe d’adultes afin d’explorer les caractéristiques des signaux cérébraux capables de prédire efficacement l’âge.

Cette étude vise à combler les lacunes des recherches existantes, notamment en identifiant, via des techniques d’analyse des séries temporelles, les caractéristiques des signaux capables de capturer les changements liés à l’âge dans le cerveau. Ces découvertes contribuent non seulement à une meilleure compréhension des mécanismes du vieillissement sain mais offrent également de nouvelles perspectives pour le développement de modèles de prédiction de l’âge cérébral.

Source de l’article

L’étude a été réalisée par Christina Stier, Elio Balestrieri, Jana Fehring, Niels K. Focke, Andreas Wollbrink, Udo Dannlowski et Joachim Gross. L’équipe de recherche est issue de l’Université de Münster (Allemagne) et du Centre Médical Universitaire de Göttingen (University Medical Center Göttingen). L’article a été publié le 20 février 2025 dans la revue PNAS (Proceedings of the National Academy of Sciences), sous le titre « Temporal autocorrelation is predictive of age—an extensive MEG time-series analysis ».

Processus de recherche

1. Données et participants

L’étude a utilisé des données ouvertes issues du Cambridge Centre for Aging and Neuroscience (Cam-CAN). Les chercheurs ont analysé des données MEG au repos provenant de 350 adultes en bonne santé âgés de 18 à 88 ans. Tous les participants étaient cognitivement normaux et ne présentaient ni troubles physiques majeurs ni maladies mentales.

2. Acquisition et traitement des données MEG

Les données MEG ont été collectées à l’aide d’un système Elekta Neuromag à 306 canaux, avec une fréquence d’échantillonnage de 1 kHz. Les données ont été prétraitées pour éliminer les bruits externes et corriger les mouvements de la tête. Ensuite, elles ont été ré-échantillonnées à 300 Hz et l’analyse en composantes indépendantes (ICA) a été utilisée pour supprimer les artefacts liés aux mouvements oculaires et aux signaux cardiaques. Finalement, 30 segments de 10 secondes de données propres ont été sélectionnés aléatoirement pour chaque participant afin d’être utilisés dans les analyses ultérieures.

3. Extraction des caractéristiques des séries temporelles

Les chercheurs ont utilisé la boîte à outils Highly Comparative Time-Series Analysis (HCTSA) pour extraire 5 961 caractéristiques des séries temporelles de chaque région cérébrale. Ces caractéristiques incluaient l’autocorrélation (AC), les coefficients d’autorégression, les paramètres de décomposition en ondelettes, etc. De plus, des caractéristiques traditionnelles dans le domaine fréquentiel ont été calculées, comme la puissance dans des bandes de fréquences spécifiques, ainsi que les couplages d’amplitude et de phase.

4. Modèle de prédiction de l’âge

Pour prédire l’âge des participants, les chercheurs ont utilisé un modèle de régression aux moindres carrés partiels (Partial Least Squares Regression, PLSR), évalué par validation croisée en 10 blocs. Les performances du modèle ont été évaluées à l’aide du coefficient de corrélation de Pearson (Pearson’s r), de l’erreur absolue moyenne (MAE) et du R² de prédiction.

Principaux résultats

1. Performance des caractéristiques MEG traditionnelles

Les caractéristiques fréquentielles traditionnelles ont montré des performances variables dans la prédiction de l’âge. Les caractéristiques de couplage d’amplitude et de phase ont obtenu des résultats moins précis, tandis que celles liées à la fréquence de pic alpha (alpha peak frequency) ont mieux performé, en particulier la méthode du centre de gravité (center of gravity), avec une corrélation de prédiction atteignant 0,65.

2. Performance des caractéristiques des séries temporelles

Parmi les 5 968 caractéristiques des séries temporelles, 113 ont obtenu une précision de prédiction supérieure à 0,7. Parmi elles, les caractéristiques d’autocorrélation (AC) se sont distinguées, surtout avec un délai de 36 millisecondes (lag 11), où la corrélation de prédiction a atteint 0,75. L’erreur de prédiction des caractéristiques AC était environ 1,5 an plus faible que celle des caractéristiques traditionnelles.

3. Modèles régionaux des caractéristiques d’autocorrélation

Les caractéristiques AC ont montré des changements significatifs liés à l’âge dans le cortex visuel et temporal. Dans le cortex visuel, les valeurs AC augmentaient avec l’âge, tandis que dans le cortex temporal, une tendance opposée a été observée. Ces modèles régionaux sont étroitement liés au processus de vieillissement du cerveau.

4. Performance des modèles combinant plusieurs caractéristiques

Les chercheurs ont également testé un modèle combinant toutes les caractéristiques AC avec différents délais temporels. La corrélation de prédiction a encore augmenté pour atteindre 0,82, avec une erreur absolue moyenne réduite à 8,71 ans. En comparaison, le modèle combinant les caractéristiques traditionnelles a obtenu une corrélation de 0,77.

Conclusion et implications

Cette étude montre que les caractéristiques d’autocorrélation (AC) peuvent efficacement capturer les changements liés à l’âge dans le cerveau, en particulier dans le cortex visuel et temporal, où des modèles régionaux significatifs ont été observés. Les caractéristiques AC peuvent être utilisées individuellement pour la prédiction de l’âge cérébral, et leur combinaison peut encore améliorer la précision de cette prédiction. Ces découvertes fournissent une nouvelle perspective pour comprendre les mécanismes du vieillissement cérébral et jettent les bases pour le développement de modèles de prédiction de l’âge cérébral plus précis.

Points forts de l’étude

  1. Application innovante des caractéristiques d’autocorrélation : Cette étude est la première à utiliser les caractéristiques AC pour la prédiction de l’âge cérébral et à démontrer leur supériorité dans la capture des changements liés à l’âge.
  2. Analyse de grandes bases de données : L’étude a utilisé des données MEG de 350 adultes, avec une grande variété d’âges, renforçant la généralisation des résultats.
  3. Modèles combinant plusieurs caractéristiques : En combinant plusieurs caractéristiques AC, les chercheurs ont considérablement amélioré la précision de la prédiction de l’âge cérébral, démontrant le potentiel des modèles multi-caractéristiques dans les études cérébrales.

Autres informations intéressantes

L’étude a également révélé que le processus de vieillissement du cerveau présente des modèles différents selon les régions, avec des changements AC significatifs dans le cortex visuel et temporal. Ces changements spécifiques aux régions pourraient être étroitement liés au déclin des fonctions cognitives, ouvrant de nouvelles perspectives pour étudier la relation entre le vieillissement cérébral et les fonctions cognitives.

Cette recherche fournit non seulement de nouveaux outils pour comprendre les mécanismes du vieillissement cérébral, mais elle constitue également une base scientifique importante pour le développement de modèles de prédiction de l’âge cérébral.