Cumulats de sulfures profonds cachés sous le gisement de Ni–Cu–éléments du groupe du platine de Jinchuan (Chine) déduits des isotopes de Ni–Cu

Découverte de cumulats de sulfures profonds dans le gisement de Ni-Cu-éléments du groupe du platine de Jinchuan et ses implications

Contexte

Le nickel (Ni), le cuivre (Cu) et les éléments du groupe du platine (PGE) sont des ressources métalliques importantes sur Terre, largement utilisées dans l’industrie, l’électronique et les énergies renouvelables. Environ 56 % du nickel, 3 % du cuivre et plus de 96 % des éléments du groupe du platine produits dans le monde proviennent de gisements de sulfures magmatiques de Ni-Cu-PGE. Ces gisements sont généralement associés à des activités magmatiques de type komatiite, basalte et mafique-ultramafique. Cependant, malgré leur large distribution à l’échelle mondiale, les mécanismes de formation de ces gisements restent largement méconnus, en particulier la manière dont les métaux s’accumulent dans les systèmes magmatiques pour former des gisements à haute teneur.

Le gisement de Jinchuan, situé dans le nord-ouest de la Chine, est l’un des plus grands gisements de sulfures magmatiques de Ni-Cu-PGE au monde. Bien que son volume soit relativement petit (environ 1 kilomètre cube), ses réserves de nickel et de cuivre atteignent respectivement environ 6,25 millions de tonnes et 4,0 millions de tonnes. Le mécanisme de formation du gisement de Jinchuan a longtemps été un sujet de débat académique, en particulier la manière dont les métaux se sont accumulés de manière si concentrée dans un si petit conduit magmatique. Pour résoudre cette question, les chercheurs ont utilisé les isotopes du nickel et du cuivre comme outils géochimiques émergents, afin de révéler les processus de formation du gisement de Jinchuan et la possible existence de corps minéralisés cachés en profondeur.

Source de l’article

Cet article a été co-écrit par Yun Zhao, Shui-Jiong Wang, Chunji Xue et Matthew J. Brzozowski, affiliés à l’Université des géosciences de Chine (Pékin) et à l’Université des géosciences de Chine (Xi’an), entre autres institutions. L’article a été publié en ligne le 15 octobre 2024 dans la revue Geology, sous le titre Hidden deep sulfide cumulates beneath the Jinchuan Ni–Cu–platinum-group element deposit (China) inferred from Ni–Cu isotopes. Cette recherche a été financée par plusieurs projets, dont la Fondation nationale des sciences naturelles de Chine.

Méthodologie et résultats

1. Collecte et classification des échantillons

Les chercheurs ont prélevé des échantillons de différents types de minerais sulfurés dans le gisement de Jinchuan et les ont classés en trois catégories en fonction de leurs caractéristiques structurelles : - Minerais sulfurés disséminés : Les sulfures sont distribués sous forme de grains entre les minéraux silicatés, avec une teneur en sulfures inférieure à 30 %. - Minerais sulfurés réticulés : Les sulfures forment un réseau interconnecté entre les minéraux silicatés, avec une teneur en sulfures comprise entre 30 % et 50 %. - Minerais sulfurés massifs : Les sulfures se présentent sous forme de veines irrégulières, avec une teneur en sulfures supérieure à 50 %.

Ces échantillons n’ont pas subi d’altération significative due à la météorisation ou à l’activité hydrothermale, garantissant ainsi la fiabilité des données isotopiques.

2. Analyse des isotopes du nickel et du cuivre

Les chercheurs ont analysé les isotopes du nickel et du cuivre dans les échantillons collectés. L’analyse des isotopes du nickel a été réalisée à l’aide de la spectrométrie de masse à plasma inductif à multicollection (MC-ICP-MS), tandis que l’analyse des isotopes du cuivre s’est appuyée sur des données précédemment rapportées pour la chalcopyrite. Les résultats ont montré : - Les valeurs de δ⁶⁰/⁵⁸Ni pour les minerais sulfurés disséminés et réticulés étaient respectivement de +0,27 ‰ et +0,22 ‰, significativement plus élevées que celles des minerais sulfurés massifs (-0,27 ‰). - Les valeurs de δ⁶⁵Cu pour les minerais sulfurés disséminés et réticulés étaient respectivement de +0,36 ‰ et +0,22 ‰, également significativement plus élevées que celles des minerais sulfurés massifs (-0,44 ‰).

3. Corrélation entre les isotopes et les teneurs en éléments

L’étude a révélé que les valeurs isotopiques du nickel et du cuivre étaient négativement corrélées avec les teneurs en éléments du groupe du platine, en soufre, en nickel et en cuivre dans la roche totale, mais positivement corrélées avec le rapport Pd/Ir. Ces résultats indiquent que l’enrichissement en isotopes du nickel et du cuivre est étroitement lié au processus de fractionnement du liquide sulfuré.

4. Inférence d’un événement de séparation des sulfures en profondeur

À l’aide d’un modèle de fractionnement de Rayleigh, les chercheurs ont simulé le processus de séparation du liquide sulfuré à partir du magma silicaté. Les résultats montrent que les caractéristiques isotopiques du nickel et du cuivre du gisement de Jinchuan peuvent être expliquées par un événement précoce de séparation des sulfures en profondeur. Plus précisément, la séparation précoce du liquide sulfuré dans la chambre magmatique profonde a entraîné un enrichissement en isotopes lourds du nickel et du cuivre dans le magma résiduel. Par la suite, ce magma a subi une nouvelle séparation et un fractionnement du liquide sulfuré dans les parties peu profondes du conduit magmatique, formant ainsi les minerais sulfurés actuellement exploités.

Conclusions et implications de l’étude

L’étude a abouti aux conclusions principales suivantes : 1. Événement de séparation des sulfures en profondeur : Les caractéristiques isotopiques du nickel et du cuivre du gisement de Jinchuan indiquent qu’une séparation précoce du liquide sulfuré a eu lieu dans la chambre magmatique profonde, entraînant un enrichissement en isotopes lourds du nickel et du cuivre dans le magma résiduel. 2. Fractionnement des sulfures en profondeur : Le magma a subi une nouvelle séparation et un fractionnement du liquide sulfuré dans les parties peu profondes du conduit magmatique, formant les minerais sulfurés actuellement exploités. 3. Potentiel d’exploration des corps minéralisés cachés : L’étude suggère que des corps minéralisés cachés pourraient exister en profondeur dans le gisement de Jinchuan, présentant des caractéristiques isotopiques légères en nickel et en cuivre, ce qui en fait des cibles importantes pour les futures explorations.

Cette recherche non seulement révèle les mécanismes de formation du gisement de Jinchuan, mais fournit également de nouvelles perspectives pour l’exploration d’autres gisements de sulfures magmatiques de Ni-Cu-PGE dans le monde. En utilisant l’analyse des isotopes du nickel et du cuivre, les chercheurs peuvent suivre plus efficacement le comportement du liquide sulfuré, offrant ainsi une base scientifique pour l’exploration des gisements.

Points forts de l’étude

  1. Application des outils géochimiques isotopiques : Cette étude est la première à appliquer systématiquement les isotopes du nickel et du cuivre à l’étude du gisement de Jinchuan, révélant ses caractéristiques isotopiques uniques et leurs implications géologiques.
  2. Découverte de l’événement de séparation des sulfures en profondeur : L’étude propose pour la première fois que le gisement de Jinchuan a pu subir un événement de séparation des sulfures en profondeur, offrant une nouvelle perspective pour comprendre les mécanismes de formation des gisements de sulfures magmatiques.
  3. Potentiel d’exploration : L’étude souligne que des corps minéralisés cachés pourraient exister en profondeur dans le gisement de Jinchuan, fournissant une orientation importante pour les futures explorations.

Autres informations pertinentes

L’étude mentionne également que la formation du gisement de Jinchuan pourrait être liée à l’activité magmatique à l’intersection d’un panache mantellique et d’un rift. Cet environnement est généralement propice à la formation de concentrations métalliques à grande échelle, car il permet de générer de grandes quantités de magma riche en métaux et de fournir des conduits magmatiques bien définis. Cette découverte ne s’applique pas seulement au gisement de Jinchuan, mais pourrait également servir de référence pour l’étude d’autres gisements similaires dans le monde.

Cette recherche, grâce à des méthodes innovantes de géochimie isotopique, révèle les mécanismes de formation du gisement de Jinchuan et fournit une base scientifique pour les futures explorations. Ses résultats ont non seulement une valeur académique importante, mais aussi des perspectives d’application étendues.