Les altérations précoces du sommeil trouvées chez les patients atteints de sclérose latérale amyotrophique sont améliorées par un antagoniste de l'orexine dans des modèles murins

Mécanismes et exploration thérapeutique des troubles du sommeil précoces chez les patients atteints de sclérose latérale amyotrophique

Contexte académique

La sclérose latérale amyotrophique (SLA) est une maladie neurologique fatale caractérisée par la dégénérescence des motoneurones, entraînant une faiblesse musculaire progressive et une insuffisance respiratoire. Bien que les principaux symptômes de la SLA soient liés à une dysfonction motrice, des recherches récentes ont montré que les patients présentent également divers symptômes non moteurs, y compris des troubles du sommeil. Cependant, les études sur les anomalies du sommeil chez les patients atteints de SLA sont relativement rares, et il reste à clarifier si ces anomalies précèdent les symptômes moteurs et quels sont leurs mécanismes sous-jacents. Par conséquent, l’étude des caractéristiques des troubles du sommeil précoces chez les patients atteints de SLA et de leurs mécanismes neuronaux est essentielle pour comprendre la pathogenèse de la maladie et développer de nouvelles stratégies thérapeutiques.

Le contexte de cette étude met également en lumière les dysfonctionnements possibles de l’hypothalamus chez les patients atteints de SLA. L’hypothalamus est une région cérébrale clé dans la régulation du sommeil, de l’appétit et de l’équilibre énergétique. Des recherches ont déjà montré que l’hypothalamus des patients atteints de SLA présente une atrophie et des altérations pathologiques. En particulier, deux types de neurones hypothalamiques, les neurones à hormone concentrant la mélanine (MCH) et les neurones à orexine (Orx), jouent un rôle important dans la régulation du sommeil. L’étude du rôle de ces neurones dans la SLA pourrait ouvrir de nouvelles perspectives pour comprendre les troubles du sommeil associés à cette maladie.

Source de l’article

Cet article, rédigé par Simon J. Guillot, Christina Lang et leurs collaborateurs, provient de plusieurs institutions, notamment l’Université de Strasbourg en France et le département de neurologie de l’Université d’Ulm en Allemagne. L’article a été publié le 29 janvier 2025 dans la revue Science Translational Medicine, sous le titre “Early-onset sleep alterations found in patients with amyotrophic lateral sclerosis are ameliorated by orexin antagonist in mouse models”.

Processus et résultats de l’étude

Processus de l’étude

  1. Analyse de la structure du sommeil chez les patients atteints de SLA et les porteurs asymptomatiques de mutations génétiques
    L’étude a d’abord analysé la structure du sommeil de 56 patients atteints de SLA à un stade précoce et de 41 témoins sains à l’aide de polysomnographie. De plus, une étude similaire a été menée sur 62 porteurs de mutations génétiques liées à la SLA (y compris les mutations C9orf72 et SOD1). Pour éliminer l’impact de l’insuffisance respiratoire sur la structure du sommeil, les chercheurs ont exclu les patients présentant une hypercapnie nocturne en utilisant la capnométrie transcutanée. Les données du sommeil ont été analysées à l’aide de l’algorithme d’apprentissage profond YASA et évaluées manuellement selon les normes de l’American Academy of Sleep Medicine (AASM).

  2. Étude des anomalies du sommeil dans les modèles murins de SLA
    Pour valider les résultats obtenus chez l’homme, les chercheurs ont mené des études similaires sur trois modèles murins de SLA (SOD1G86R, FUSΔNLS/+ et TDP43Q331K). Des électrodes d’électroencéphalographie (EEG) ont été implantées chez les souris à l’âge adulte, et le sommeil a été surveillé 5 à 6 jours après la chirurgie. Les états de sommeil ont été analysés automatiquement à l’aide du logiciel Neuroscore.

  3. Expériences d’intervention sur les voies de signalisation MCH et Orexine
    Les chercheurs ont administré un antagoniste des récepteurs de l’orexine (Suvorexant) par voie orale ou ont injecté du MCH via une pompe intracérébroventriculaire pendant 15 jours pour observer l’impact de ces interventions sur les cycles de sommeil des souris. Parallèlement, ils ont évalué l’effet du traitement au MCH sur la survie des motoneurones chez les souris SOD1G86R.

Principaux résultats

  1. Anomalies du sommeil chez les patients atteints de SLA et les porteurs de mutations génétiques
    L’étude a révélé que les patients atteints de SLA à un stade précoce et les porteurs asymptomatiques des mutations C9orf72 et SOD1 présentaient une augmentation du temps d’éveil et une réduction du sommeil non-REM. Les anomalies du sommeil des porteurs de la mutation C9orf72 étaient plus similaires à celles des patients atteints de SLA, tandis que celles des porteurs de la mutation SOD1 étaient relativement plus légères.

  2. Anomalies du sommeil dans les modèles murins de SLA
    Chez les souris SOD1G86R, les chercheurs ont observé une augmentation du temps d’éveil et une réduction du sommeil non-REM et du sommeil paradoxal (REM) avant l’apparition des symptômes moteurs (à 75 jours). Des phénomènes similaires ont également été observés chez les souris FUSΔNLS/+ et TDP43Q331K.

  3. Effets des interventions MCH et Orexine
    Le traitement au MCH a partiellement amélioré les anomalies du sommeil chez les souris SLA, notamment en augmentant le sommeil paradoxal et en réduisant le temps d’éveil. Cependant, le traitement au MCH n’a pas prolongé la survie des souris SOD1G86R, mais a réduit la perte des motoneurones lombaires. En revanche, l’antagoniste des récepteurs de l’orexine, Suvorexant, a complètement rétabli les anomalies du sommeil dans les trois modèles murins de SLA.

Conclusion et signification

Les conclusions de cette étude indiquent que les troubles du sommeil chez les patients atteints de SLA apparaissent dès les stades précoces de la maladie et sont étroitement liés à des anomalies des voies de signalisation hypothalamiques MCH et Orexine. En validant ces découvertes dans des modèles murins, les chercheurs ont mis en lumière le potentiel thérapeutique de ces voies de signalisation dans les troubles du sommeil associés à la SLA. En particulier, l’antagoniste des récepteurs de l’orexine, Suvorexant, a montré une efficacité significative pour améliorer les anomalies du sommeil chez les souris SLA, ouvrant ainsi de nouvelles perspectives pour le traitement des troubles du sommeil chez les patients atteints de SLA.

Points forts de l’étude

  1. Découverte des troubles du sommeil précoces
    Cette étude est la première à révéler systématiquement les troubles du sommeil chez les patients atteints de SLA et les porteurs asymptomatiques de mutations génétiques dès les stades précoces de la maladie, offrant des indices importants pour comprendre les symptômes non moteurs de la SLA.

  2. Exploration des mécanismes des voies de signalisation MCH et Orexine
    Grâce à des expériences, l’étude a confirmé le rôle clé des voies de signalisation MCH et Orexine dans les troubles du sommeil associés à la SLA, fournissant des cibles potentielles pour les interventions thérapeutiques.

  3. Potentiel thérapeutique de l’antagoniste des récepteurs de l’orexine
    L’efficacité remarquable de Suvorexant dans les modèles murins de SLA suggère que les antagonistes des récepteurs de l’orexine pourraient devenir un traitement efficace pour les troubles du sommeil chez les patients atteints de SLA.

Valeur et signification

Cette étude approfondit non seulement la compréhension des troubles du sommeil précoces chez les patients atteints de SLA, mais fournit également une base théorique pour le développement de nouveaux traitements. En outre, elle souligne l’importance potentielle des interventions précoces sur le sommeil, ce qui pourrait ralentir la progression de la maladie et améliorer la qualité de vie des patients. À l’avenir, des recherches cliniques supplémentaires permettront de vérifier l’efficacité de ces découvertes chez les patients humains, offrant ainsi un nouvel espoir aux personnes atteintes de SLA.