Les neutrophiles interagissent physiquement avec les cellules tumorales pour former une niche de signalisation favorisant l'agressivité du cancer du sein

Contexte académique

Le cancer du sein est l’une des tumeurs malignes les plus courantes chez les femmes dans le monde, et son mécanisme de pathogenèse est complexe, impliquant des interactions entre divers types de cellules et voies de signalisation. Ces dernières années, le rôle du microenvironnement tumoral (TME) dans la progression du cancer a progressivement attiré l’attention. Les neutrophiles, en tant que composants importants du système immunitaire, ont une fonction dans le TME qui n’est pas encore entièrement comprise. Bien que des études aient montré que les neutrophiles peuvent, dans certains cas, favoriser la croissance tumorale et les métastases, leur mécanisme d’action spécifique dans le cancer du sein reste incertain. Par conséquent, une étude approfondie des interactions entre les neutrophiles et les cellules tumorales est essentielle pour révéler les mécanismes de progression du cancer du sein et développer de nouvelles stratégies thérapeutiques.

Source de l’article

Cet article a été co-rédigé par Sandra Camargo, Ori Moskowitz et d’autres chercheurs de l’Université de Tel Aviv en Israël, en collaboration avec l’Institut Hubrecht de l’Académie royale des arts et des sciences des Pays-Bas et l’Institut Weizmann des sciences. L’article a été publié en mars 2025 dans la revue Nature Cancer, sous le titre “Neutrophils physically interact with tumor cells to form a signaling niche promoting breast cancer aggressiveness”, avec le DOI 10.1038/s43018-025-00924-3.

Processus et résultats de la recherche

Conception de l’étude

L’équipe de recherche a utilisé un modèle de souris transgénique (MMTV-PyMT) capable de reproduire les différentes étapes du cancer du sein humain, y compris l’hyperplasie, la cancérogenèse précoce, la cancérogenèse avancée et les métastases. En effectuant un séquençage d’ARN unicellulaire (scRNA-seq) et un séquençage des cellules en interaction physique (PIC-seq) sur des tissus mammaires de souris à différents stades de développement et de cancérogenèse, les chercheurs ont systématiquement analysé l’hétérogénéité cellulaire et la communication intercellulaire dans les tissus mammaires.

Types cellulaires et dynamiques

Les chercheurs ont d’abord réalisé une analyse complète par séquençage unicellulaire des cellules immunitaires et non immunitaires dans les tissus mammaires de souris, séquençant au total 16 778 cellules immunitaires CD45+ et 12 783 cellules non immunitaires CD45-. Grâce à une analyse de clustering, ils ont identifié divers types de cellules immunitaires et non immunitaires, y compris les monocytes, les macrophages, les cellules dendritiques, les mastocytes, les basophiles et les neutrophiles. Dans le microenvironnement vasculaire, les chercheurs ont également identifié des cellules endothéliales, des cellules musculaires lisses et des péricytes.

Au cours du développement mammaire et de la cancérogenèse, les chercheurs ont observé que les neutrophiles apparaissaient brièvement au stade de développement précoce et réapparaissaient au stade de cancérogenèse avancée, interagissant physiquement avec les cellules tumorales. Grâce à l’analyse PIC-seq, les chercheurs ont en outre découvert que l’interaction physique entre les neutrophiles et les cellules tumorales augmentait de manière significative la prolifération et la capacité invasive des cellules tumorales, tout en favorisant la prolifération des cellules endothéliales et l’angiogenèse.

Hétérogénéité des neutrophiles

Pour mieux comprendre la fonction des neutrophiles dans les tissus mammaires, les chercheurs ont effectué un séquençage unicellulaire des neutrophiles CD45+Ly6G+ et identifié sept états distincts de neutrophiles. Ces états incluent les neutrophiles riches en cystatine et les neutrophiles jeunes associés au développement précoce, ainsi que les neutrophiles MHC-II, les neutrophiles PTGS2+ et les neutrophiles associés aux tumeurs (TANs) liés à la cancérogenèse. Parmi eux, les TANs étaient significativement enrichis au stade de cancérogenèse avancée et associés à un taux de survie plus faible chez les patientes atteintes de cancer du sein.

Analyse du réseau de signalisation

En intégrant l’analyse PIC-seq et l’analyse ligand-récepteur, les chercheurs ont révélé le réseau de signalisation entre les neutrophiles et les cellules tumorales. L’étude a montré que les neutrophiles forment un réseau de signalisation complexe avec les cellules tumorales et les cellules endothéliales vasculaires en sécrétant des facteurs pro-angiogéniques tels que VEGFA et OSM, favorisant ainsi la prolifération et l’invasion tumorales. De plus, l’étude a révélé que les macrophages activés par la tumeur recrutaient des neutrophiles dans le TME en sécrétant des chimiokines comme CCL3.

Validation fonctionnelle

Pour valider la fonction de l’interaction physique entre les neutrophiles et les cellules tumorales, les chercheurs ont réalisé des expériences de co-culture in vitro et des tests de migration. Les résultats ont montré que l’interaction physique entre les neutrophiles et les cellules tumorales augmentait de manière significative la capacité invasive des cellules tumorales, tandis que le blocage de cette interaction inhibait l’invasion des cellules tumorales. En outre, les chercheurs ont découvert, grâce à des expériences in vivo, que l’épuisement des neutrophiles réduisait de manière significative la capacité de prolifération des cellules tumorales et des cellules endothéliales.

Conclusion de la recherche

Cette étude a révélé, grâce au séquençage unicellulaire et au séquençage des cellules en interaction physique, le rôle clé des neutrophiles dans la progression du cancer du sein. Les recherches ont montré que l’interaction physique entre les neutrophiles et les cellules tumorales favorise la prolifération, l’invasion et l’angiogenèse tumorales, et est associée à un taux de survie plus faible chez les patientes atteintes de cancer du sein. Ces découvertes fournissent de nouvelles cibles potentielles pour le traitement du cancer du sein et mettent en lumière le rôle important des neutrophiles dans le microenvironnement tumoral.

Points forts de la recherche

  1. Méthode innovante : Cette étude est la première à combiner le séquençage unicellulaire et le séquençage des cellules en interaction physique pour analyser systématiquement l’hétérogénéité cellulaire et la communication intercellulaire dans les tissus mammaires.
  2. Découverte importante : L’étude a révélé que l’interaction physique entre les neutrophiles et les cellules tumorales favorise de manière significative la prolifération, l’invasion et l’angiogenèse tumorales, offrant de nouvelles cibles potentielles pour le traitement du cancer du sein.
  3. Signification clinique : L’étude a mis en évidence le rôle clé des neutrophiles dans la progression du cancer du sein et a montré que l’expression des gènes associés aux neutrophiles est corrélée à un taux de survie plus faible chez les patientes, fournissant ainsi de nouveaux biomarqueurs pour l’évaluation du pronostic.

Valeur de la recherche

Cette étude approfondit non seulement notre compréhension du rôle des neutrophiles dans le microenvironnement tumoral, mais offre également de nouvelles perspectives et cibles potentielles pour le traitement et l’évaluation du pronostic du cancer du sein. En révélant le réseau de signalisation complexe entre les neutrophiles et les cellules tumorales, cette étude jette des bases importantes pour le développement de stratégies thérapeutiques ciblant le microenvironnement tumoral.