L'intervalle inter-pulses de la stimulation magnétique transcrânienne n'influence pas l'excitabilité corticospinale du biceps brachial lors d'une flexion isométrique sous-maximale du coude
L’effet de l’intervalle inter-pulses de la stimulation magnétique transcrânienne sur l’excitabilité corticospinale du biceps brachial
Contexte de la recherche
La stimulation magnétique transcrânienne (Transcranial Magnetic Stimulation, TMS) est une technique de recherche neuroscientifique non invasive largement utilisée pour évaluer l’excitabilité corticospinale chez les individus sains et les patients cliniques. La TMS applique des impulsions électromagnétiques sur le cortex moteur primaire, activant indirectement la voie corticospinale descendante, ce qui génère un potentiel évoqué moteur (Motor Evoked Potential, MEP) dans le muscle cible. L’amplitude du MEP est généralement interprétée comme reflétant l’état d’excitabilité de la voie corticospinale, une amplitude plus grande indiquant une excitabilité plus élevée.
Cependant, un inconvénient notable de la TMS est la variabilité des MEP. Même dans des conditions strictement contrôlées, les amplitudes des MEP déclenchés à quelques secondes d’intervalle peuvent différer. Pour réduire l’impact de cette variabilité sur les résultats de la recherche, les études TMS déclenchent généralement plusieurs MEP (souvent 8 à 10 ou plus) dans une seule condition expérimentale, puis calculent la moyenne de ces mesures comme indicateur plus fiable de l’excitabilité corticospinale. Cependant, les chercheurs en TMS choisissent souvent de manière arbitraire l’intervalle de temps entre les stimulations adjacentes (intervalle inter-pulses, Inter-Pulse Interval, IPI), et modifient parfois cet intervalle au cours d’une même expérience. Des études ont montré que l’IPI peut influencer l’amplitude des MEP, en particulier dans les muscles au repos. Cependant, l’effet de l’IPI sur l’amplitude des MEP dans les muscles en contraction active est moins bien compris et les conclusions restent incertaines.
Ainsi, cette étude visait à explorer l’effet de l’IPI sur l’amplitude des MEP du biceps brachial et du triceps brachial lors d’une flexion isométrique sous-maximale du coude. L’hypothèse était que l’IPI n’influencerait pas l’amplitude des MEP du biceps ou du triceps brachial.
Source de la recherche
Cette étude a été réalisée par David H. Imeson, Lea Gerditschke, Liana E. Brown et Davis A. Forman, issus respectivement des départements de kinésiologie et de psychologie de l’Université Trent au Canada. La recherche a été publiée en 2025 dans le European Journal of Neuroscience, sous le titre Transcranial Magnetic Stimulation Inter-Pulse Interval Does Not Influence Corticospinal Excitability to the Biceps Brachii During Submaximal Isometric Elbow Flexion.
Déroulement de la recherche
1. Recrutement des participants et configuration expérimentale
L’étude a recruté 12 participants droitiers (âge moyen de 22,1 ans), tous ayant passé les contrôles de sécurité TMS et les évaluations d’aptitude à l’activité physique. Pendant l’expérience, les participants étaient assis droit, leur avant-bras droit reposant sur un support en mousse, et leur poignet fixé par une sangle Velcro pour effectuer une flexion isométrique du coude. Un écran d’ordinateur fournissait un retour en temps réel sur l’activité musculaire du biceps brachial, les participants devant maintenir cette activité dans une plage cible (10 % de l’activité musculaire maximale).
2. Enregistrement de l’électromyographie (EMG)
L’activité musculaire du biceps et du triceps brachial a été enregistrée à l’aide d’électrodes de surface bipolaires. Les électrodes étaient placées dans le sens des fibres musculaires, et les signaux étaient enregistrés à une fréquence d’échantillonnage de 5 kHz à l’aide d’un appareil CED Micro 1401-4, puis analysés avec le logiciel Signal 8. Les signaux ont été amplifiés et filtrés pour garantir la qualité des données.
3. Configuration de la stimulation magnétique transcrânienne (TMS)
La TMS a été appliquée à l’aide d’une bobine circulaire au sommet de la tête, avec une intensité de stimulation fixée à 120 % du seuil moteur actif du biceps brachial. Six conditions d’IPI différentes (4, 6, 8, 10, 12 et 14 secondes) ont été testées, chaque condition comprenant 5 stimulations, pour un total de 5 séries de stimulations (25 stimulations par condition). Les participants devaient commencer la contraction musculaire 1 seconde avant chaque stimulation et la maintenir pendant 0,5 seconde après la stimulation.
4. Analyse des données
L’amplitude pic à pic des MEP a été mesurée à partir de la déviation initiale du signal EMG de fond, et toutes les amplitudes des MEP ont été normalisées par rapport à une valeur de référence. De plus, l’activité musculaire pré-stimulus a été mesurée et normalisée par rapport à l’activité musculaire lors de la contraction isométrique maximale (MVC). Les analyses statistiques ont été réalisées avec le logiciel SPSS, en utilisant une analyse de variance (ANOVA) à mesures répétées pour évaluer l’effet de l’IPI et du numéro du MEP sur l’amplitude des MEP et l’activité musculaire pré-stimulus.
Résultats de la recherche
1. Activité musculaire pré-stimulus
L’activité musculaire pré-stimulus du biceps et du triceps brachial n’a pas montré de différences significatives entre les différentes conditions d’IPI et les numéros de MEP. Cela indique que l’activité musculaire est restée constante tout au long de l’expérience, sans influencer l’excitabilité corticospinale.
2. Excitabilité corticospinale
L’amplitude des MEP du biceps et du triceps brachial n’a pas montré de différences significatives entre les différentes conditions d’IPI. Cependant, lorsque l’amplitude des MEP a été exprimée en ratio par rapport à l’activité musculaire pré-stimulus, une diminution significative de l’amplitude des MEP du biceps brachial a été observée après la première stimulation (MEP 1 : 32,8 ± 5,9 ; MEP 5 : 27,7 ± 4,3, p < 0,05). Ce résultat suggère que, bien que l’IPI n’influence pas l’amplitude des MEP, une stimulation continue pourrait entraîner une diminution progressive de l’amplitude des MEP.
Conclusion et implications
Les conclusions de cette étude montrent que, lors d’une flexion isométrique sous-maximale du coude, l’IPI (4 à 14 secondes) n’a pas d’effet significatif sur l’amplitude des MEP du biceps et du triceps brachial. Cette découverte contraste avec les résultats précédents obtenus sur des muscles au repos, suggérant que l’effet de l’IPI sur l’amplitude des MEP pourrait dépendre de l’état de contraction du muscle. De plus, l’étude a révélé que l’amplitude des MEP diminue significativement après la première stimulation, ce qui indique qu’une stimulation continue pourrait entraîner une diminution progressive de l’amplitude des MEP.
Points forts de la recherche
- Première étude sur l’effet de l’IPI dans les muscles en contraction active : Cette étude est la première à explorer l’effet de l’IPI sur l’amplitude des MEP du biceps et du triceps brachial, comblant une lacune dans ce domaine de recherche.
- Conception multi-conditions d’IPI : L’étude a testé six conditions d’IPI différentes, permettant une évaluation complète de l’effet de l’IPI sur l’amplitude des MEP.
- Effet de la stimulation continue sur l’amplitude des MEP : L’étude a révélé qu’une stimulation continue pourrait entraîner une diminution progressive de l’amplitude des MEP, une découverte importante pour la conception des études TMS.
Directions futures de recherche
Les recherches futures pourraient explorer l’effet d’IPI plus longs (par exemple, 20 secondes ou plus) sur l’amplitude des MEP, ainsi que le rôle de l’IPI dans différents états neuromusculaires (comme la fatigue, les lésions ou des intensités de contraction plus élevées). De plus, des études pourraient examiner l’effet de l’IPI sur l’amplitude des MEP à des intensités de stimulation plus élevées.