Inhibition optogénétique des neurones glutamatergiques dans le cortex insulaire postérieur dysgranulaire module la douleur neuropathique trigéminale chez le rat CCI-Ion
L’optogénétique inhibe les neurones glutamatergiques du cortex insulaire dysgranulaire pour réguler la douleur neuropathique trigéminale
Introduction et contexte
La douleur neuropathique trigéminale (DNT) est une maladie faciale grave, caractérisée par des crises de douleur aiguë et intense se propageant le long des segments cutanés du nerf trijumeau. La DNT est presque deux fois plus fréquente chez les femmes que chez les hommes. Bien que les interventions chirurgicales traditionnelles telles que la rhizotomie ou la décompression microvasculaire soient efficaces pour la plupart des patients atteints de DNT typique, les résultats sont souvent insatisfaisants pour les patients atteints de DNT atypique, certains continuant à présenter des symptômes ou des effets secondaires. Il est donc urgent de développer de nouvelles interventions analgésiques grâce à une étude approfondie de différentes régions du cerveau.
Le cortex insulaire (CI) joue un rôle clé dans plusieurs processus sensoriels et cognitifs, notamment l’interaction sociale, l’apprentissage et la mémoire, l’expression émotionnelle, le goût et l’anxiété. Le CI est divisé en trois sous-régions : l’insula antérieure, l’insula dysgranulaire et l’insula agranulaire. Des études antérieures ont déjà montré que l’insula dysgranulaire (cortex insulaire dysgranulaire, CIDG) joue un rôle important dans le traitement de la douleur.
Source de l’article
Cette étude a été réalisée par Jaisan Islam, Elina KC, Soochong Kim, Moon Young Chung, Ki Seok Park, Hyong Kyu Kim et Young Seok Park, provenant respectivement des universités Chungbuk National University, Soonchunhyang University et Eulji University en Corée du Sud. L’article a été publié en ligne le 12 septembre 2023 dans le journal Neuromolecular Medicine.
Méthodologie de recherche
Protocole expérimental
L’étude a utilisé 40 rats femelles Sprague-Dawley âgés de 8 semaines, avec un modèle de lésion par constriction chronique du nerf infraorbitaire (CCI-ION) pour établir un modèle de DNT. Les rats ont été répartis aléatoirement en groupes DNT, chirurgie simulée et contrôle.
Chirurgie CCI-ION
Dans le groupe CCI-ION (n=16), une chirurgie a été effectuée sur le nerf infraorbitaire (ION) gauche des rats, comprenant l’exposition de l’ION et sa ligature avec un fil de soie. Les rats du groupe chirurgie simulée (n=16) ont subi une intervention similaire mais sans ligature de l’ION.
Injection stéréotaxique du virus optogénétique
Après l’injection stéréotaxique du virus optogénétique (AAV2-CAMKIIa-eNpHR3.0-EYFP) ou du virus inactif (AAV2-CAMKIIa-EYFP), des fibres optiques pour la stimulation lumineuse ont été implantées chez les rats, le site d’injection étant le CIDG controlatéral du côté CCI-ION. Des observations comportementales quotidiennes ont été effectuées pour chaque groupe après l’opération.
Analyses comportementales
Elles comprennent le test de jet d’air (air-puff test), le test d’hyperalgésie au froid (cold hyperalgesia test), le test d’allodynie mécanique (mechanical allodynia test) et le test de labyrinthe en croix surélevé (elevated plus maze test). Les tests comportementaux ont été effectués avant la chirurgie CCI-ION et aux jours 7, 14, 21 et 28 après la chirurgie.
Enregistrements neuronaux unitaires in vitro sous inhibition optogénétique du CIDG
En utilisant une stimulation lumineuse laser jaune sur le CIDG, l’activité neuronale du noyau caudal du trijumeau (NCT) et du thalamus ventral postéro-médian (VPM) controlatéral au CCI-ION a été observée par des enregistrements neuronaux unitaires in vitro. Les résultats d’analyse incluent le taux de décharge neuronal global et le taux de décharge en rafales, ainsi que l’effet de l’inhibition optogénétique sur ces taux de décharge.
Immunofluorescence et examen histologique
Immédiatement après les tests comportementaux et les enregistrements électriques, une perfusion cardiaque a été effectuée, les cerveaux des rats ont été fixés dans du paraformaldéhyde à 4%, puis sectionnés et colorés par immunofluorescence pour observer l’expression des neurones positifs pour c-Fos, pERK et CREB.
Analyse des données
L’analyse des données a été réalisée avec le logiciel GraphPad Prism, et les résultats sont présentés sous forme de moyenne ± écart-type (SD). Les données ont été comparées par analyse de variance (ANOVA) ou test t, avec une signification statistique fixée à p,05.
Résultats de l’étude
Résultats des tests comportementaux
Test de jet d’air
Les rats du groupe DNT ont montré une allodynie mécanique significative, leur niveau de tolérance au jet d’air passant de 22,71 ± 2,49 psi à 13,98 ± 2,32 psi en 4 semaines.
Test d’hyperalgésie au froid
Le test d’hyperalgésie au froid a montré que le score de sensibilité au froid des rats du groupe DNT est passé de 16,875 ± 2,65 à 23,208 ± 2,63.
Test d’allodynie mécanique
Dans le test d’allodynie mécanique, la sensibilité des rats du groupe DNT aux stimuli mécaniques a significativement augmenté, leur seuil passant de 12,652 ± 1,92 g à 7,24 ± 2,06 g.
Test de labyrinthe en croix surélevé
Les rats du groupe DNT ont montré un comportement anxieux significatif, avec une réduction notable du temps passé et du nombre d’entrées dans les bras ouverts, passant respectivement de 0,45 ± 0,033% et 0,47 ± 0,066% à 0,29 ± 0,037% et 0,31 ± 0,052%.
Effet de l’inhibition optogénétique du CIDG sur la décharge neuronale du NCT et du VPM
L’inhibition optogénétique du CIDG a significativement réduit le taux de décharge des neurones du NCT chez les rats du groupe DNT, passant de 26,94 ± 6,11 spikes/s à 20,87 ± 3,49 spikes/s, avec une réduction significative du taux de décharge en rafales également.
De même, dans l’activité neuronale du VPM, l’inhibition optogénétique a réduit le taux de décharge de 45,57 ± 3,90 spikes/s à 36,88 ± 2,17 spikes/s, tandis que le taux de décharge en rafales est passé de 0,281 ± 0,0253 à 0,234 ± 0,0178.
Résultats d’immunofluorescence
Après l’inhibition optogénétique, l’expression de c-fos dans le CIDG et le NCT a été significativement réduite, indiquant une diminution de leur activité neuronale. De plus, l’expression des neurones positifs pour creb et perk après le traumatisme a également été significativement réduite, confirmant davantage l’effet analgésique de l’inhibition du CIDG sur la DNT.
Conclusion
Cette étude a révélé que l’inhibition optogénétique du CIDG peut efficacement améliorer les réponses comportementales de la DNT, réduire l’activité neuronale du NCT et du VPM, produisant ainsi un effet analgésique significatif. Les résultats indiquent que le CIDG joue un rôle important dans le circuit neuronal de la DNT, et que l’inhibition de son état hyperactif peut moduler les voies de traitement de la douleur, aboutissant finalement à un effet analgésique. Cela fournit une méthode expérimentale efficace pour approfondir l’étude des mécanismes moléculaires du CIDG dans la DNT, et une base théorique pour le développement de nouvelles thérapies analgésiques utilisant des méthodes optogénétiques.
Signification de l’étude
Cette étude confirme l’importance du CIDG dans la régulation de la DNT et propose une nouvelle méthode pour produire un effet analgésique par l’inhibition optogénétique du CIDG. Cela offre non seulement une nouvelle perspective pour le traitement de la DNT, mais démontre également le potentiel de la technologie optogénétique dans la recherche sur la douleur. Les résultats de cette étude pourraient fournir une base pour le développement de nouvelles thérapies analgésiques ciblant la DNT, ayant une valeur théorique et pratique importante.