Conception et évaluation d'un mécanisme d'embrayage instrumenté de capteurs pour les exosquelettes dorsaux quasi-passifs
Contexte académique
Dans les environnements de travail modernes, en particulier dans les industries impliquant des tâches répétitives de manutention et de flexion, les blessures au dos sont un problème de santé professionnelle courant et coûteux. Selon les statistiques, les blessures au dos représentent 35 % de toutes les blessures musculosquelettiques professionnelles aux États-Unis. Bien que des contrôles ergonomiques (comme la réduction de certaines tâches de manutention) puissent réduire les risques, il n’est pas toujours possible d’éliminer complètement l’exposition aux risques. Par conséquent, le développement de technologies capables d’assister les travailleurs pour réduire la charge sur le dos est devenu primordial.
Les exosquelettes (Exoskeletons) et les exocombinaisons (Exosuits) sont des technologies portables émergentes qui peuvent réduire les risques de blessures au dos en fournissant une assistance mécanique. Les exosquelettes quasi-passifs combinent la légèreté des exosquelettes passifs avec la flexibilité des exosquelettes actifs, offrant une assistance lorsque nécessaire tout en restant non intrusifs lorsqu’ils ne sont pas utilisés. Cependant, les embrayages des exosquelettes quasi-passifs actuels présentent certaines limites, notamment des capacités de détection et de contrôle insuffisantes, ce qui limite leur potentiel dans des applications pratiques.
Pour résoudre ce problème, l’équipe de recherche a conçu et évalué un nouvel embrayage instrumenté avec des capteurs, visant à étendre les fonctionnalités des exosquelettes dorsaux quasi-passifs pour inclure la détection de force, la détection de posture et une commutation de mode polyvalente. Les résultats de cette recherche non seulement ouvrent de nouvelles perspectives pour le développement futur des technologies d’exosquelettes, mais offrent également des solutions plus efficaces pour protéger le dos dans des scénarios de travail réels.
Source de l’article
Cet article a été rédigé par Paul R. Slaughter, Shane T. King, Cameron A. Nurse, Chad C. Ice, Michael Goldfarb et Karl E. Zelik, tous affiliés à Vanderbilt University. La recherche a été soutenue par les National Institutes of Health (numéro de subvention : R01EB028105) et la NSF Graduate Research Fellowship. L’article a été publié dans IEEE Transactions on Biomedical Engineering et accepté pour publication en mai 2024.
Processus de recherche
1. Objectifs de conception et méthodes
L’équipe de recherche a d’abord défini les objectifs de conception : développer un nouvel embrayage capable de maintenir les fonctions principales des exosquelettes quasi-passifs tout en ajoutant des capacités de détection de force, de détection de posture et une commutation de mode flexible. Pour atteindre cet objectif, l’équipe a conçu un embrayage intégrant un encodeur, un solénoïde, une unité de mesure inertielle (IMU) et un microprocesseur. Cet embrayage peut estimer la force d’assistance de l’exosquelette en mode “engagé”, surveiller la posture de l’utilisateur en mode “désengagé” et permettre une commutation de mode polyvalente.
2. Conception et validation du prototype d’embrayage
Le prototype d’embrayage est composé d’une plaque de base en aluminium, d’une pile de bobines (y compris une bobine en aluminium, un ressort rotatif en acier inoxydable, un couvercle de bobine en aluminium et une roue dentée en acier), ainsi qu’un solénoïde. Le solénoïde contrôle l’engagement et le désengagement de l’embrayage. En mode “désengagé”, la pile de bobines peut tourner librement, permettant au câble en acier de se dérouler de la bobine ; en mode “engagé”, la pile de bobines est verrouillée, empêchant le câble de se dérouler.
L’équipe a également intégré un encodeur haute résolution et une IMU pour mesurer l’angle de rotation de la bobine et la posture de l’utilisateur. L’encodeur estime l’angle de flexion tronc-cuisse de l’utilisateur en mesurant la rotation de la bobine, tandis que l’IMU estime l’orientation du tronc à l’aide de signaux d’accélération et de gyroscope.
3. Validation expérimentale
Pour valider les performances de l’embrayage, l’équipe de recherche a mené des tests sur banc et des expériences sur des sujets humains.
Tests sur banc
Les tests sur banc comprenaient la mesure de la tension du câble en mode “désengagé”, le temps de commutation de mode et la force maximale supportée par l’embrayage en mode “engagé”. Les résultats ont montré que la tension du câble en mode “désengagé” était de 7 à 20 N, bien inférieure à l’objectif de conception de 32 N ; le temps moyen de commutation de mode était de 0,05 secondes (désengagement) et 0,10 secondes (engagement), répondant à l’objectif de conception de 1 seconde ; l’embrayage pouvait supporter 350 N en mode “engagé”, conformément à l’objectif de conception.
Expériences sur des sujets humains
Six participants en bonne santé (3 hommes et 3 femmes, âge moyen de 26 ans) ont porté l’exosquelette dorsal équipé du nouvel embrayage et ont effectué des tâches de flexion et de squat. Pendant l’expérience, l’équipe a utilisé un système de capture de mouvement et une cellule de charge pour enregistrer simultanément les données des capteurs de l’embrayage et les mesures des instruments de laboratoire.
Les résultats ont montré que l’embrayage pouvait estimer la force d’assistance de l’exosquelette avec une erreur moyenne de 8,8 N (correspondant à un couple lombaire de 0,9 Nm) en mode “engagé” et l’angle de flexion tronc-cuisse avec une erreur moyenne de 6,7° en mode “désengagé”. De plus, l’embrayage a réussi à réaliser la commutation de mode basée sur les données de l’IMU, démontrant sa polyvalence de contrôle.
4. Traitement des données
L’équipe de recherche a traité les données de l’encodeur à l’aide de MATLAB, en créant des modèles de régression linéaire pour estimer la force d’assistance de l’exosquelette et l’angle de flexion tronc-cuisse. Les modèles ont été divisés en deux catégories : des modèles spécifiques à chaque participant et des modèles génériques pour plusieurs participants. Les résultats ont montré que l’erreur moyenne des modèles spécifiques était de 8,0 N (force d’assistance) et de 4,6° (angle), tandis que celle des modèles génériques était de 8,8 N et de 6,7°.
Résultats et conclusions de la recherche
Résultats principaux
- Estimation de la force d’assistance : L’embrayage peut estimer la force d’assistance de l’exosquelette avec une erreur moyenne de 8,8 N en mode “engagé”, répondant à l’objectif de conception.
- Estimation de la posture : L’embrayage peut estimer l’angle de flexion tronc-cuisse avec une erreur moyenne de 6,7° en mode “désengagé”, proche de l’objectif de conception.
- Commutation de mode : L’embrayage peut effectuer une commutation de mode en 0,05 à 0,10 secondes, répondant à l’objectif de conception de 1 seconde.
- Polyvalence et praticité : L’erreur des modèles génériques est légèrement supérieure à celle des modèles spécifiques, mais reste suffisamment faible pour une utilisation pratique.
Conclusion
L’équipe de recherche a réussi à concevoir et à valider un nouvel embrayage instrumenté, étendant les fonctionnalités des exosquelettes dorsaux quasi-passifs. Cet embrayage peut non seulement fournir une assistance pour le dos, mais aussi surveiller la posture de l’utilisateur et permettre une commutation de mode polyvalente. Cette conception ouvre de nouvelles perspectives pour le développement futur des technologies d’exosquelettes et présente un large éventail d’applications dans des scénarios de travail réels.
Points forts de la recherche
- Intégration multifonctionnelle : L’embrayage intègre des fonctions de détection de force, de détection de posture et de commutation de mode, améliorant considérablement la praticité des exosquelettes quasi-passifs.
- Contrôle efficace : L’embrayage peut effectuer une commutation de mode en un temps extrêmement court, assurant la flexibilité et le confort de l’utilisateur dans différentes tâches.
- Conception générique : Grâce à la création de modèles génériques, l’embrayage peut s’adapter aux besoins de différents utilisateurs, augmentant son applicabilité dans des situations réelles.
Autres informations précieuses
L’équipe de recherche a également souligné que les travaux futurs pourraient se concentrer sur le développement de matériel entièrement portable et d’algorithmes de contrôle plus robustes pour améliorer encore les performances et la portée d’application de cet embrayage. De plus, cette conception offre de nouvelles possibilités de commercialisation des technologies d’exosquelettes, en particulier dans des scénarios industriels nécessitant une détection précise de la force d’assistance et de la posture.
Résumé
Cette recherche a fourni une avancée importante dans l’extension des fonctionnalités des exosquelettes dorsaux quasi-passifs grâce à la conception et à la validation d’un nouvel embrayage instrumenté. Cet embrayage peut non seulement alléger efficacement la charge sur le dos des utilisateurs, mais aussi fournir une expérience de travail plus sûre et plus flexible grâce à une détection précise de la force et de la posture. Ce résultat ouvre de nouvelles directions pour la recherche et l’application des technologies d’exosquelettes, avec une valeur scientifique et une signification pratique importantes.