Biomarqueurs d'imagerie du trouble cognitif lié à la maladie de Parkinson

Étude multimodale d’imagerie sur les troubles cognitifs associés à la maladie de Parkinson

La maladie de Parkinson (Parkinson’s Disease, PD) est une maladie neurodégénérative courante, généralement caractérisée par des troubles moteurs. Cependant, les troubles cognitifs, en tant que symptômes non moteurs, affectent également fortement la qualité de vie des patients. Selon de nombreuses études épidémiologiques, environ 20 % des patients atteints de la maladie de Parkinson présentent déjà un trouble cognitif léger (Mild Cognitive Impairment, MCI) au début de la maladie. De plus, environ 80 % des patients développeront finalement une démence associée à la maladie de Parkinson (Parkinson’s Disease Dementia, PDD). Bien que ces chiffres soient préoccupants, les mécanismes sous-jacents au déclin cognitif et à la démence associés à la maladie de Parkinson restent flous. Ainsi, l’identification de biomarqueurs des changements pathologiques cérébraux associés pourrait non seulement aider à élucider ces processus pathophysiologiques mais aussi à améliorer l’exactitude et la prédiction du diagnostic. En réponse à ce besoin, les technologies de neuro-imagerie ont récemment été largement utilisées pour détecter les changements précoces du cortex chez les patients atteints de la maladie de Parkinson.

Cet article, basé sur une étude intitulée « Imaging biomarkers of cortical neurodegeneration underlying cognitive impairment in Parkinson’s disease », publiée dans le journal European Journal of Nuclear Medicine and Molecular Imaging, explore en détail la sensibilité et l’utilité diagnostique des biomarqueurs d’imagerie pour les troubles cognitifs associés à la maladie de Parkinson. Cette recherche, menée par Jesús Silva-Rodríguez, Miguel Ángel Labrador-Espinosa et d’autres auteurs, provient principalement de l’Hospital Universitario Virgen del Rocío et de l’Instituto de Biomedicina de Sevilla à Séville, en Espagne. L’étude compare directement trois techniques d’imagerie neurologique couramment utilisées : l’imagerie par résonance magnétique structurelle (Structural MRI, sMRI), l’imagerie pondérée par diffusion (Diffusion-Weighted MRI, dMRI) et la tomographie par émission de positons au [18F]fluorodésoxyglucose ([18F]FDG PET).


Contexte et conception de l’étude

Objectif de l’étude

L’objectif principal de l’étude est de comparer la sensibilité et l’efficacité diagnostique de ces trois techniques d’imagerie dans la détection des changements corticaux associés aux différents stades cognitifs de la maladie de Parkinson et d’explorer si la fusion des données multimodales peut améliorer la performance diagnostique.

Échantillon de l’étude

L’étude a recruté 120 patients atteints de la maladie de Parkinson. Parmi eux, 53 présentaient une cognition normale (PD-CN), 32 avaient un trouble cognitif léger (PD-MCI) et 35 souffraient de démence liée à la maladie de Parkinson (PDD). Tous les patients ont été diagnostiqués selon les critères de la Movement Disorders Society (MDS). Leurs capacités cognitives ont été évaluées à l’aide de l’échelle Parkinson’s Disease Cognitive Rating Scale (PD-CRS) et leurs fonctions motrices avec la partie III de l’échelle Unified Parkinson’s Disease Rating Scale (UPDRS-III).

Acquisition et traitement des images

  • sMRI : Imagerie obtenue par une séquence 3D T1 à haute résolution. Les données ont été segmentées en substance grise, blanche et liquide céphalo-rachidien via le Computational Anatomy Toolbox (CAT12) et SPM12, puis normalisées selon l’espace de référence de l’Institut neurologique de Montréal (MNI).
  • dMRI : Données recueillies par une séquence d’impulsions pondérées par diffusion. Les images ont subi une correction des mouvements de la tête, produisant des cartes de diffusivité moyenne (MD) corrigées pour l’eau libre.
  • [18F]FDG PET : Données métaboliques cérébrales obtenues à l’aide de deux scanners (19 sujets avec Siemens Biograph HiRez, 101 avec GE Discovery MI). Les images ont été harmonisées en espace MNI et corrigées pour les écarts de résolution entre les scanners.

Analyse des données et apprentissage automatique

Les valeurs quantitatives d’imagerie ont été extraites de 52 régions corticales définies par l’atlas neuroanatomique de Harvard-Oxford. Une analyse de variance (ANCOVA) a été réalisée pour comparer les volumes de substance grise, ratios standardisés d’absorption (SUVR) et valeurs MD entre groupes. Des modèles de classification basés sur l’apprentissage automatique ont été construits pour évaluer les performances diagnostiques des paramètres d’imagerie dans la classification des stades cognitifs.


Principaux résultats de l’étude

Changements de groupe selon les techniques d’imagerie

  • sMRI : Les patients PDD montrent une atrophie importante concentrée dans le cortex pariétal postérieur (notamment le précunéus et le cortex cingulaire postérieur), et dans certaines zones temporales. En revanche, les changements observés chez les patients PD-MCI restent mineurs et non significatifs.
  • dMRI : Les patients PDD présentent une augmentation notable des valeurs MD dans plusieurs régions, particulièrement au pôle temporal, dans le cortex cingulaire postérieur et le gyrus angulaire. Les patients PD-MCI montrent également des changements significatifs dans des zones temporales médiales.
  • [18F]FDG PET : Chez les patients PDD et PD-MCI, une hypométabolisme typique est observé dans les régions occipitales postérieures. Les valeurs [18F]FDG PET montrent également un effet plus marqué que celui des autres techniques, en particulier dans le précunéus et le gyrus angulaire.

Performances des classifications

Dans les modèles de classification : - sMRI : Une performance modérée pour distinguer PDD des PD-CN (AUC = 0.77), mais une faible utilité diagnostique pour différencier PD-MCI des PD-CN (AUC = 0.57). - dMRI : De bonnes performances pour classifier PDD par rapport aux PD-CN (AUC = 0.87) et une capacité raisonnable pour PD-MCI contre PD-CN (AUC = 0.71). - [18F]FDG PET : Excellentes performances, avec un AUC = 0.89 pour PDD, et de bons résultats pour PD-MCI (AUC = 0.78).

Modèles multimodaux

Les modèles combinant plusieurs modalités (sMRI, dMRI et [18F]FDG PET) se sont révélés légèrement supérieurs mais sans amélioration significative par rapport aux modèles basés uniquement sur [18F]FDG PET (AUC = 0.86 contre AUC = 0.89). Cela suggère une valeur ajoutée limitée des combinaisons multimodales dans cet ensemble de données.


Signification et implications

Cette étude offre une comparaison systématique des performances de [18F]FDG PET, dMRI et sMRI dans la détection des troubles cognitifs associés à la maladie de Parkinson. Elle met en lumière l’avantage incontestable du [18F]FDG PET dans le diagnostic précoce des altérations cognitives. Elle identifie également le potentiel de la dMRI, en particulier dans des contextes où le [18F]FDG PET n’est pas disponible. Enfin, l’étude montre que la sMRI est plus adaptée pour détecter des changements dégénératifs tardifs, mais moins efficace pour identifier des altérations structurelles précoces.

Cette recherche met également en avant un cadre analytique robuste basé sur l’apprentissage automatique, proposant des méthodologies fiables pour les futures études multicentriques. En élargissant notre compréhension des mécanismes pathologiques associés aux troubles cognitifs de la maladie de Parkinson, cette étude fournit des preuves essentielles pour guider le choix des outils diagnostiques, contribuant ainsi au développement de la médecine personnalisée.