Électronique souple basée sur l'impression par engulfment de particules

Recherche sur l’électronique souple basée sur l’impression par engloutissement de particules

Contexte académique

Avec le développement rapide des dispositifs portables, de la surveillance de la santé, des dispositifs médicaux et des interactions homme-machine, les dispositifs électroniques souples (électroniques flexibles) suscitent un grand intérêt pour leur capacité à s’intégrer harmonieusement aux systèmes biologiques. Cependant, les dispositifs électroniques rigides traditionnels souffrent d’un décalage mécanique avec les tissus biologiques, limitant leur application dans le domaine biomédical. Pour relever ce défi, les chercheurs ont proposé diverses stratégies, comme la conception de microstructures (par exemple, des motifs en serpentin et des structures kirigami) afin de conférer une élasticité macroscopique aux dispositifs rigides. Toutefois, ces approches nécessitent souvent de sacrifier la performance électronique pour obtenir une extensibilité.

Récemment, les dispositifs intrinsèquement extensibles basés sur des matériaux électroniques polymères sont devenus des sujets de recherche remarquables grâce à leur densité accrue de composants et à leur ductilité mécanique exceptionnelle. Cependant, les matériaux existants nécessitent généralement un compromis entre les performances électroniques et l’extensibilité. Afin de surmonter ce défi, les chercheurs explorent des moyens d’intégrer des particules fonctionnelles aux polymères souples pour créer des dispositifs électroniques hautes performances ayant des propriétés similaires aux tissus biologiques. Mais, les stratégies actuelles d’intégration nécessitent souvent de disperser les particules dans des solutions de monomère liquide ou de polymère, suivies de transformations chimiques ou physiques pour former des composites souples, limitant ainsi leurs performances.

Pour résoudre ces contraintes, cet article propose une nouvelle technique d’impression, basée sur l’engloutissement de particules, capable d’intégrer directement des particules fonctionnelles dans des polymères souples, éliminant ainsi les problèmes liés à la compatibilité matérielle et à la mécanique des fluides complexe des méthodes traditionnelles.

Source de l’article

Cet article est rédigé par Rongzhou Lin, Chengmei Jiang, Sippanat Achavananthadith, Xin Yang, Hashina Parveen Anwar Ali, Jianfeng Ping, Yuxin Liu, Xianmin Zhang, Benjamin C. K. Tee, Yong Lin Kong, et John S. Ho. Les auteurs sont affiliés à diverses institutions de recherche, telles que South China University of Technology, National University of Singapore, Zhejiang University, et Rice University. L’article a été publié en ligne le 16 octobre 2024, dans la revue Nature Electronics.

Processus de recherche et résultats

1. Technologie d’impression par engloutissement de particules

L’impression par engloutissement de particules est fondée sur un processus spontané, alimenté par l’énergie de surface, qui intègre des particules micro et nanométriques dans une matrice polymère souple. Cette technologie repose sur la constatation selon laquelle, lorsque la taille des particules est nettement inférieure à la longueur élastocapillaire de la matrice polymère, les particules sont spontanément englouties, conduisant à la formation de structures stables.

1.1 Processus d’impression

L’impression est réalisée en superposant des couches de particules fonctionnelles dans une matrice polymère souple à l’aide d’un masque. Les particules sont attirées dans la matrice par des forces capillaires dominantes lorsque le rapport entre le rayon des particules ® et la longueur élastocapillaire (l) est très faible (r/l ≪ 1). Inversement, lorsque r/l ≫ 1, les forces élastiques surpassent les forces capillaires, et les particules restent à la surface.

1.2 Validation expérimentale

Les chercheurs ont utilisé des particules de silice (10 µm de rayon) comme modèle et les ont imprimées sur des substrats d’élasticité variable (E ≈ 1 kPa contre E ≈ 500 kPa). Il a été observé que les particules étaient totalement englouties sur les substrats souples, tandis qu’elles restaient collées à la surface des substrats rigides.

2. Fabrication de dispositifs électroniques souples fonctionnels

En utilisant cette technologie, les chercheurs ont pu fabriquer des dispositifs électroniques souples, multicouches et multimatériaux, équipés de fonctions de capteurs sans fil, de communication et de transfert d’énergie.

2.1 Vérification de la conductivité

Des conducteurs extensibles ont été fabriqués en intégrant des microparticules d’argent (Ag). Après plusieurs cycles d’engloutissement (~15 minutes par cycle), la conductivité des structures augmentait significativement grâce à la formation de réseaux de percolation plus profonds. Ces conducteurs engloutis présentaient une grande stabilité électrique malgré des stress mécaniques et chimiques. Par exemple, après une tentative de décollement par ruban adhésif, les pistes conductrices sur un substrat souple (E≈20 kPa) ne montraient qu’une variation de résistance inférieure à 10 %, alors que celles sur un substrat rigide devenaient non conductrices.

2.2 Impression multifonctionnelle

La technologie a permis l’impression de motifs fonctionnels à 360°, adaptés à des formes complexes, telles qu’une piste hélicoïdale imprimée sur un tube flexible ou un capteur d’effort sur une articulation de doigt. De plus, la compatibilité avec les matériaux biomédicaux montre également son potentiel d’intégration avec des structures sensibles aux changements de température.

3. Fabrication multicouche par engloutissement successif

Les auteurs ont mis en œuvre une approche multicouche en utilisant cette technique. Une application a consisté à concevoir un dispositif électronique sans fil composé de trois couches fonctionnelles : une couche d’antenne (particules de Ag), une couche diélectrique (particules de BaTiO3), et une couche de masse (particules de Ag). Exposé à un champ à 32 MHz, le dispositif activait une diode électroluminescente (LED) sans fil, même lorsqu’il était étiré à une déformation de 100%.

4. Caractérisation de l’engloutissement de particules

Des mesures d’indentation ont été réalisées sur des sphères de silice (diamètre allant de 0,3 à 20 µm) imprimées sur des substrats de rigidité variable. Les résultats montrent que l’indentation devient plus profonde avec la diminution du diamètre des particules ou du module d’élasticité du substrat. Les transitions entre engloutissement complet et adhésion de surface étaient régies par le rapport r/l.

5. Applications dans des impressions grand format, multicouches, et multimatériaux

En utilisant un exemple de production à grande échelle, les chercheurs ont imprimé des capteurs de contrainte de nanotubes de carbone sur une feuille de polymère de taille A4. Ces dispositifs, capables de résister à des torsions et des étirements, démontrent la flexibilité et l’adaptabilité mécanique de la technologie. Des structures complexes contenant des particules de silice et des nanofils de cuivre (Cu NW) ont aussi été fabriquées sans aucune faille entre les couches fonctionnelles.

Conclusion et implications

Cet article présente l’introduction d’une technologie d’impression innovante basée sur l’engloutissement de particules. En exploitant ce phénomène spontané induit par l’énergie de surface, les chercheurs ont démontré la fabrication de dispositifs électroniques souples, multicouches, et ayant des configurations énergétiquement stables. Cela ouvre des perspectives d’intégration de matériaux actifs dans les polymères souples pour répondre aux exigences des applications bioélectroniques avancées.

Points saillants de la recherche

  1. Une technologie novatrice d’impression : L’engloutissement de particules permet d’intégrer directement des particules fonctionnelles dans des polymères souples, supplantant les défis des méthodes traditionnelles.
  2. Intégration multifonctionnelle : Cette méthode favorise la création de dispositifs électroniques extensibles, intégrant des fonctions de capteurs sans fil, de communication, et de transfert d’énergie.
  3. Applications potentielles étendues : La technologie peut révolutionner les domaines des dispositifs portables, de la surveillance de la santé et des implants biomédicaux, grâce à sa capacité à s’intégrer de manière harmonieuse avec les tissus biologiques.

Informations complémentaires

Cette recherche a été soutenue par des fonds académiques provenant de différentes sources. Par exemple, South China University of Technology et divers organismes de recherche internationaux ont fourni des financements.

Les résultats de cette étude représentent une étape importante vers l’adoption de dispositifs électroniques souples dans des applications biomédicales et au-delà.