Composantes périodiques et apériodiques de l'activité du noyau subthalamique reflètent différents aspects de la déficience motrice dans la maladie de Parkinson
Les composantes périodiques et apériodiques de l’activité du noyau subthalamique reflètent différents aspects des troubles moteurs dans la maladie de Parkinson
Contexte
La maladie de Parkinson (Parkinson’s Disease, PD) est une maladie neurodégénérative courante dont les symptômes principaux incluent la bradykinésie (bradykinesia), la rigidité (rigidity) et les tremblements (tremor). Bien que la neurophysiologie de la maladie de Parkinson ait été largement étudiée, de nombreuses questions restent sans réponse. En particulier, l’identification de biomarqueurs électrophysiologiques spécifiques associés aux symptômes moteurs de la maladie de Parkinson reste un objectif clé de la recherche. Ces biomarqueurs ne contribuent pas seulement à comprendre les mécanismes de la maladie, mais ils peuvent également faire progresser les techniques de stimulation cérébrale profonde (Deep Brain Stimulation, DBS).
Les oscillations bêta (13-35 Hz) dans le noyau subthalamique (Subthalamic Nucleus, STN) sont considérées comme le principal biomarqueur électrophysiologique de la maladie de Parkinson. Cependant, bien que ces oscillations soient utilisées comme signaux de rétroaction dans les systèmes DBS, les limites précises des plages d’oscillations “pathologiques” restent floues, en particulier lorsque les patients sont dans différents états (par exemple, sous ou sans lévodopa). Par conséquent, l’optimisation des paramètres de stimulation et l’identification des meilleurs biomarqueurs adaptés à différentes conditions des patients restent une priorité de recherche.
Source de l’article
Cet article a été rédigé par Ksenia Sayfulina, Veronika Filyushkina, Svetlana Usova et d’autres chercheurs, affiliés au Laboratoire de neurophysiologie cellulaire humaine de l’Institut de chimie physique de l’Académie des sciences de Russie, au Centre national de recherche médicale en neurochirurgie N.N. Burdenko et au Centre d’études avancées de Moscou. L’article a été publié en 2025 dans la revue European Journal of Neuroscience sous le titre Periodic and aperiodic components of subthalamic nucleus activity reflect different aspects of motor impairment in Parkinson’s disease.
Méthodologie et résultats
Méthodologie
Sujets de l’étude
L’étude a inclus 14 patients atteints de la maladie de Parkinson (âgés de 36 à 64 ans, moyenne de 51,9 ans, dont 10 femmes). Tous les patients ont subi une implantation bilatérale d’électrodes DBS directionnelles dans le STN, et des enregistrements ont été effectués via des électrodes externalisées après l’opération.Collecte des données
Les potentiels locaux de champ (Local Field Potential, LFP) du STN ont été enregistrés au repos les 1er et 5e jours postopératoires. Les enregistrements ont été divisés en deux parties : avant et après l’administration de lévodopa. Avant l’administration, les patients ont été privés de lévodopa pendant une nuit ; après l’administration, ils ont reçu 1,5 fois leur dose habituelle de lévodopa.Traitement et analyse des données
Le prétraitement des données comprenait un filtrage passe-bande (1-500 Hz), un filtrage coupe-bande et l’exclusion des segments contenant des artefacts par inspection visuelle. Les chercheurs ont calculé la densité spectrale de puissance (Power Spectral Density, PSD) dans la plage de 2 à 49 Hz en utilisant la méthode de Welch et ont séparé les composantes périodiques et apériodiques en utilisant la méthode proposée par Donoghue et al. (2020). Les composantes périodiques se manifestent sous forme de pics d’oscillation, tandis que les composantes apériodiques suivent une loi spectrale de type 1/fβ.Analyse par clustering
Pour identifier des sous-bandes de fréquence dans la plage de 5 à 35 Hz présentant des propriétés oscillatoires distinctes, les chercheurs ont effectué une analyse de clustering sur les pics d’oscillation. En se basant sur la hauteur, la largeur et la fréquence des pics d’oscillation, ils ont utilisé la méthode de clustering hiérarchique de Ward pour diviser les pics en quatre groupes, correspondant aux plages de 5-14 Hz, 14-20 Hz, 20-28 Hz et 28-35 Hz.Modèles statistiques
Les chercheurs ont utilisé des modèles linéaires à effets mixtes (Linear Mixed Effects Model, LMEM) pour analyser la relation entre l’activité du STN et l’état médicamenteux/les symptômes moteurs. Les modèles ont pris en compte les variations individuelles des patients comme intercept aléatoire.
Résultats principaux
Effet de la lévodopa sur l’activité du STN
L’administration de lévodopa a significativement supprimé l’activité oscillatoire dans la plage de 11 à 32 Hz et a augmenté la pente de la composante apériodique. Les changements de la pente apériodique étaient corrélés à l’amélioration des symptômes moteurs.Relation entre l’activité oscillatoire et les troubles moteurs
À l’état non médicamenteux, l’amplitude des pics d’oscillation dans la plage de 14 à 20 Hz était significativement corrélée aux troubles moteurs globaux (y compris la bradykinésie, la rigidité et les tremblements). À l’état médicamenteux, l’amplitude des pics d’oscillation dans la plage de 7 à 11 Hz était significativement corrélée à la bradykinésie.Relation entre la composante apériodique et l’amélioration des symptômes
L’augmentation de la pente apériodique était négativement corrélée à l’amélioration de la bradykinésie, tandis qu’elle était faiblement positivement corrélée à l’amélioration de la rigidité. Cela suggère que la composante apériodique pourrait être un biomarqueur efficace pour évaluer l’amélioration des symptômes.
Conclusions et implications
Conclusions
L’étude montre que les composantes périodiques et apériodiques de l’activité du STN reflètent différents aspects des troubles moteurs dans la maladie de Parkinson. À l’état non médicamenteux, l’activité oscillatoire dans la bande bêta basse (14-20 Hz) est associée aux troubles moteurs globaux, tandis qu’à l’état médicamenteux, l’activité oscillatoire dans la bande alpha (7-11 Hz) est associée à la bradykinésie. De plus, les changements de la pente apériodique sont significativement corrélés à l’amélioration des symptômes moteurs, ce qui en fait un biomarqueur potentiel pour évaluer l’efficacité du traitement.
Valeur scientifique et applicative
Cette étude apporte de nouvelles perspectives sur les biomarqueurs électrophysiologiques de la maladie de Parkinson, en particulier en séparant les composantes périodiques et apériodiques pour révéler les associations entre différentes bandes d’oscillations et les troubles moteurs. Ces découvertes contribuent non seulement à la compréhension des mécanismes neuronaux de la maladie de Parkinson, mais elles offrent également des pistes pour l’optimisation des systèmes DBS adaptatifs. Par exemple, il serait possible d’ajuster les bandes de fréquence des signaux de rétroaction en fonction de l’état médicamenteux du patient, améliorant ainsi l’efficacité du traitement.
Points forts de l’étude
- Méthodologie innovante : L’analyse par clustering a permis d’identifier des sous-bandes fonctionnelles dans l’activité oscillatoire du STN, révélant des associations entre différentes bandes de fréquence et les troubles moteurs.
- Utilisation de la composante apériodique : C’est la première fois que les changements de la pente apériodique sont rapportés comme étant corrélés à l’amélioration des symptômes moteurs, fournissant des preuves pour son utilisation comme biomarqueur.
- Analyse multi-états : L’étude a pris en compte à la fois les états médicamenteux et non médicamenteux, révélant des changements dans les bandes de fréquence “pathologiques” selon l’état du patient.
Autres informations pertinentes
L’étude propose également une stratégie de DBS adaptative basée sur l’activité oscillatoire et la composante apériodique, suggérant d’utiliser les oscillations bêta basses comme signal de rétroaction à l’état non médicamenteux, puis de passer aux oscillations alpha à l’état médicamenteux. De plus, la pente apériodique pourrait être utilisée pour évaluer l’efficacité de la stimulation et ajuster les paramètres de stimulation.
Cette étude ouvre de nouvelles perspectives pour le traitement par neuromodulation de la maladie de Parkinson et jette des bases importantes pour les futures recherches cliniques et fondamentales.