Thiazoplanomicin, un nouvel antibiotique peptidique thiazolique provenant de l'actinomycète Actinoplanes sp. MM794L-181F6

Découverte et étude du nouvel antibiotique Thiazoplanomicin

Contexte académique

Ces dernières années, le problème de la résistance aux antibiotiques est devenu de plus en plus grave, en particulier pour Neisseria gonorrhoeae (le gonocoque), un agent pathogène sexuellement transmissible courant qui peut rapidement développer une résistance, rendant les antibiotiques traditionnels comme la pénicilline, la tétracycline et la ciprofloxacine de moins en moins efficaces. Actuellement, la ceftriaxone est le principal médicament utilisé pour traiter la gonorrhée, mais avec l’émergence de souches résistantes, la recherche de nouveaux antibiotiques est devenue une priorité. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) et le Partenariat mondial pour la recherche et le développement des antibiotiques (GARDP) soulignent que le développement d’antibiotiques avec de nouveaux mécanismes d’action ou de nouvelles structures squelettiques est essentiel pour lutter contre la gonorrhée résistante.

Dans ce contexte, une équipe de recherche japonaise de l’Institute of Microbial Chemistry (BIKAKEN) a isolé une nouvelle souche d’actinobactérie, Actinoplanes sp. MM794L-181F6, à partir de litière de feuilles, et en a extrait un nouvel antibiotique de la famille des thiazolylpeptides, nommé Thiazoplanomicin. Cet antibiotique montre une activité antibactérienne significative contre les souches résistantes de Neisseria gonorrhoeae, offrant une nouvelle solution pour lutter contre la résistance aux antibiotiques.

Source de l’article

Cette recherche a été dirigée par Yasuhiro Takehana, Hideyuki Muramatsu, Masaki Hatano et d’autres chercheurs de l’Institute of Microbial Chemistry (BIKAKEN) et du National Institute of Infectious Diseases (NIID). L’article de recherche a été publié en ligne le 28 octobre 2024 dans The Journal of Antibiotics, sous le titre « Thiazoplanomicin, a new thiazolyl peptide antibiotic from the leaf-litter actinomycete Actinoplanes sp. MM794L-181F6 ».

Processus et résultats de la recherche

1. Criblage et isolement

L’équipe de recherche a d’abord isolé la souche d’actinobactérie Actinoplanes sp. MM794L-181F6 à partir de litière de feuilles collectée dans le district d’Iwafune, préfecture de Niigata, au Japon, et a obtenu ses métabolites par fermentation. Ensuite, les chercheurs ont utilisé du n-butanol pour extraire les composés actifs du bouillon de fermentation, puis les ont purifiés par chromatographie sur colonne de silice, chromatographie sur Sephadex LH-20 et chromatographie liquide haute performance (HPLC) préparative. Finalement, les chercheurs ont isolé le composé actif à partir de 3,8 litres de bouillon de fermentation et ont identifié sa masse moléculaire à 1236,1520 par LC-HR-ESI-MS (spectrométrie de masse à ionisation électrospray à haute résolution couplée à la chromatographie liquide).

2. Identification de la structure

Grâce à la résonance magnétique nucléaire (RMN), à la cristallographie aux rayons X et à l’analyse des produits de dégradation, les chercheurs ont déterminé la structure chimique du Thiazoplanomicin. Ce composé est un antibiotique thiazolylpeptide polycyclique similaire à la Nocathiacine, avec cinq cycles thiazole et un cycle hydroxypyridine. Sa formule moléculaire est C51H41N13O15S5, et sa structure a été confirmée par des techniques de RMN bidimensionnelle (telles que 1H-1H COSY, 1H-13C HMQC, 1H-15N HSQC, etc.).

3. Tests d’activité antibactérienne

Le Thiazoplanomicin a montré une activité antibactérienne significative contre plusieurs souches résistantes de Neisseria gonorrhoeae, avec des concentrations minimales inhibitrices (CMI) comprises entre 0,0312 et 0,125 µg/ml. De plus, ce composé a également montré une forte activité antibactérienne contre les bactéries Gram-positives (comme Staphylococcus aureus et Streptococcus pyogenes), avec des CMI aussi basses que 0,0005 µg/ml. Cependant, le Thiazoplanomicin n’a montré aucune activité antibactérienne contre Escherichia coli, ce qui est cohérent avec le spectre d’activité des autres antibiotiques thiazolylpeptides.

4. Étude du mécanisme d’action

Les chercheurs ont émis l’hypothèse que le mécanisme d’action du Thiazoplanomicin pourrait être similaire à celui de la Nocathiacine, en inhibant le processus de traduction bactérienne pour exercer son activité antibactérienne. En particulier, ce composé pourrait se lier au ribosome et inhiber l’activité du facteur d’élongation G (EF-G), empêchant ainsi la synthèse des protéines. Ce mécanisme est similaire à celui d’autres antibiotiques thiazolylpeptides (comme la Thiostreptone), mais l’activité du Thiazoplanomicin contre Neisseria gonorrhoeae est rapportée pour la première fois.

Conclusion et signification

La découverte du Thiazoplanomicin offre une nouvelle option thérapeutique pour lutter contre la gonorrhée résistante. Sa structure chimique unique et sa forte activité antibactérienne en font un candidat important pour le développement de nouveaux antibiotiques. De plus, cette recherche démontre le potentiel de criblage d’antibiotiques à partir d’environnements naturels (comme la litière de feuilles), ouvrant de nouvelles perspectives pour le développement futur d’antibiotiques.

Points forts de la recherche

  1. Découverte d’un nouvel antibiotique : Le Thiazoplanomicin est un nouvel antibiotique thiazolylpeptide avec une structure chimique unique et une forte activité antibactérienne.
  2. Activité contre les souches résistantes de Neisseria gonorrhoeae : Ce composé montre une activité antibactérienne significative contre plusieurs souches résistantes de Neisseria gonorrhoeae, comblant une lacune dans les antibiotiques existants.
  3. Nouvelles perspectives sur le mécanisme d’action : L’étude révèle que le Thiazoplanomicin pourrait exercer son activité antibactérienne en inhibant l’activité de l’EF-G, offrant une nouvelle cible pour la conception de médicaments.

Autres informations utiles

L’équipe de recherche a également déterminé la configuration absolue des résidus d’acides aminés clés dans le Thiazoplanomicin par cristallographie aux rayons X, confirmant davantage sa similarité structurelle avec la Nocathiacine. De plus, l’étude démontre le potentiel de criblage d’antibiotiques à partir d’environnements naturels (comme la litière de feuilles), ouvrant de nouvelles perspectives pour le développement futur d’antibiotiques.

La découverte du Thiazoplanomicin offre non seulement une nouvelle solution pour lutter contre la résistance aux antibiotiques, mais ouvre également de nouvelles voies pour la recherche future sur les antibiotiques.