La Mélatonine Atténue la Restriction de Croissance Fœtale Induite par une Exposition à Haute Température via l'Axe Intestin-Placenta-Fœtus chez les Souris Gestantes

La Mélatonine atténue la restriction de croissance fœtale induite par une exposition à haute température via l’axe intestin-placenta-fœtus

Contexte de la recherche

Le réchauffement climatique global représente une menace majeure pour la santé humaine, en particulier pour les femmes enceintes et les fœtus. Des études montrent que l’exposition à des températures élevées augmente le risque de résultats de grossesse défavorables tels que l’accouchement prématuré, la mortinatalité, l’insuffisance placentaire et la restriction de croissance fœtale. Bien que des recherches aient exploré l’impact direct du stress thermique (Heat Stress, HS) sur les fonctions reproductives, le rôle potentiel du microbiote intestinal dans ce contexte n’a pas encore été pleinement exploré. Le microbiote intestinal joue un rôle crucial dans le développement et la croissance du fœtus via l’axe intestin-placenta. Des études ont montré que la dysbiose microbienne intestinale est étroitement liée à des complications de la grossesse (comme la pré-éclampsie) et à la restriction de croissance fœtale. De plus, l’inflammation joue un rôle important dans les résultats de grossesse défavorables, et la mélatonine (Melatonin, MEL), une hormone endogène aux propriétés antioxydantes et anti-inflammatoires, a démontré un potentiel pour atténuer l’inflammation et le stress oxydatif pendant la grossesse.

Cette étude explore pour la première fois le mécanisme par lequel la mélatonine atténue la restriction de croissance fœtale induite par le stress thermique en modulant le microbiote intestinal, offrant ainsi de nouvelles cibles d’intervention pour les impacts négatifs de l’augmentation des températures mondiales sur les populations vulnérables.

Source de l’étude

Cette recherche a été menée par l’équipe de Jia-Jin Wu, Xiaoyu Zheng, Caichi Wu et leurs collaborateurs, issus de l’École des sciences animales de l’Université agricole de Chine du Sud, de l’École de biologie et d’agriculture Henry Fok de l’Université de Shaoguan, et du Laboratoire agricole moderne de Lingnan, entre autres institutions. L’article a été publié en février 2024 dans le Journal of Advanced Research, sous le titre Melatonin alleviates high temperature exposure induced fetal growth restriction via the gut-placenta-fetus axis in pregnant mice.

Déroulement et résultats de la recherche

1. Conception de l’étude et modèle animal

Les chercheurs ont d’abord établi un modèle de souris gestantes exposées à un stress thermique, en les divisant en trois groupes : groupe témoin (CON), groupe stress thermique (HS) et groupe stress thermique + mélatonine (HS+MEL). Les groupes HS et HS+MEL étaient exposés à une température de 38°C de 12h00 à 14h00 chaque jour, puis maintenus à 25±2°C le reste du temps. Le groupe HS+MEL recevait également une dose orale de mélatonine à 10 mg/L.

2. Évaluation de la restriction de croissance fœtale

L’étude a révélé que le stress thermique entraînait une réduction significative du poids des souris gestantes, ainsi qu’une diminution du poids fœtal et du poids placentaire. Cependant, la supplémentation en mélatonine a significativement atténué ces effets négatifs, restaurant le poids fœtal et la fonction placentaire. Cela démontre que la mélatonine peut efficacement atténuer la restriction de croissance fœtale induite par le stress thermique.

3. Évaluation de la fonction de la barrière intestinale

Le stress thermique a augmenté de manière significative l’expression des marqueurs de stress oxydatif et d’inflammation dans l’intestin des souris gestantes, tout en réduisant l’expression des protéines de jonction serrée intestinale (comme l’occludine et la claudine-1), indiquant une altération de la fonction de barrière intestinale. La supplémentation en mélatonine a significativement amélioré ces paramètres, restaurant la fonction de barrière intestinale.

4. Analyse du microbiote intestinal

En utilisant le séquençage du gène 16S rRNA, les chercheurs ont constaté que le stress thermique provoquait une dysbiose du microbiote intestinal, caractérisée par une réduction des bactéries bénéfiques (comme Butyricimonas) et une augmentation des bactéries productrices de LPS (Lipopolysaccharide, comme Aliivibrio). La supplémentation en mélatonine a rétabli de manière significative l’équilibre de ces microbiotes, réduisant la production de LPS.

5. Dommages du LPS sur le placenta et le fœtus

L’étude a montré que le stress thermique augmentait significativement les niveaux de LPS dans le sérum, le placenta et le fœtus, activant ainsi la voie de signalisation TLR4/MAPK/VEGF dans le placenta, ce qui a entraîné une altération de la fonction de barrière placentaire et une perturbation du transport des nutriments. La supplémentation en mélatonine a significativement réduit les niveaux de LPS et inhibé la voie de signalisation inflammatoire, restaurant ainsi la fonction placentaire.

6. Vérification de la dépendance microbienne

Grâce à des modèles de souris pseudo-stériles et des expériences de transplantation de microbiote fécal, les chercheurs ont confirmé que l’effet protecteur de la mélatonine dépendait en partie du microbiote intestinal. La transplantation de microbiote fécal des groupes HS et HS+MEL à des souris traitées aux antibiotiques a montré que les souris recevant le microbiote HS présentaient une restriction de croissance fœtale et une dysfonction placentaire plus sévères.

7. Expérience de défi au LPS

Pour valider davantage le rôle du LPS, les chercheurs ont établi un modèle de souris gestantes exposées au LPS. L’exposition au LPS a significativement réduit le poids fœtal et placentaire et augmenté l’expression des marqueurs inflammatoires dans l’intestin et le placenta. La supplémentation en mélatonine a significativement atténué ces effets négatifs, confirmant son rôle dans la réduction de la restriction de croissance fœtale induite par le LPS.

Conclusions de l’étude

Cette étude révèle pour la première fois le mécanisme par lequel la mélatonine atténue la restriction de croissance fœtale induite par le stress thermique en régulant le microbiote intestinal et l’axe intestin-placenta-fœtus. Plus précisément, la mélatonine rétablit les bactéries bénéfiques et inhibe les bactéries productrices de LPS, réduisant ainsi la production de LPS et la réponse inflammatoire systémique, ce qui restaure la fonction placentaire et la croissance fœtale. Cette découverte offre de nouvelles stratégies d’intervention pour les impacts négatifs du réchauffement climatique sur les populations vulnérables.

Points forts de l’étude

  1. Première révélation du rôle du microbiote intestinal dans la restriction de croissance fœtale induite par le stress thermique.
  2. Découverte que la mélatonine atténue la restriction de croissance fœtale en modulant le microbiote intestinal et en inhibant les bactéries productrices de LPS.
  3. Validation de la dépendance microbienne de la mélatonine grâce à des modèles de souris pseudo-stériles et des transplantations de microbiote fécal.
  4. Offre de nouvelles stratégies potentielles de nutrition ou de pharmacologie pour la santé des femmes enceintes et des fœtus dans des environnements à haute température.

Valeur applicative et perspectives futures

Cette étude fournit non seulement une nouvelle base scientifique pour comprendre l’impact des températures élevées sur les résultats de la grossesse, mais elle soutient également le développement d’interventions basées sur la mélatonine. Les recherches futures pourraient explorer davantage le rôle protecteur de la mélatonine face à d’autres stress environnementaux (comme la pollution ou les infections) et évaluer sa sécurité et son efficacité chez les humains pendant la grossesse. De plus, des interventions ciblant le microbiote intestinal (comme les probiotiques ou les prébiotiques) pourraient également constituer des stratégies potentielles pour atténuer la restriction de croissance fœtale.

Grâce à cette étude approfondie, nous avons non seulement mis en lumière les menaces potentielles des environnements à haute température sur la santé maternelle et infantile, mais nous avons également fourni une base scientifique pour élaborer des interventions ciblées. Alors que le changement climatique mondial continue de s’intensifier, l’importance de cette recherche ne fera que croître.