Impact des acides gras oméga-3 sur l'hypertriglycéridémie, la lipidomique et le microbiome intestinal chez les patients diabétiques de type 2
Impact des acides gras oméga-3 sur les lipides et la flore intestinale chez les patients atteints de diabète de type 2
Présentation du contexte
Le diabète de type 2 (Diabète de Type 2, T2D) est une maladie métabolique courante à l’échelle mondiale, souvent associée à des anomalies lipidiques, telles que l’hypertriglycéridémie (Hypertriglycéridémie, HTG). Les anomalies lipidiques sont un facteur de risque important pour les maladies cardiovasculaires (Maladies Cardiovasculaires, CVD), en particulier le niveau élevé de triglycérides (Triglycérides, TG) est étroitement lié aux événements cardiovasculaires. Bien que les statines aient obtenu des résultats significatifs dans le contrôle du cholestérol, l’hypertriglycéridémie reste un problème clinique urgent.
Les acides gras oméga-3, en particulier l’acide eicosapentaénoïque (Eicosapentaenoic Acid, EPA) et l’acide docosahexaénoïque (Docosahexaenoic Acid, DHA) riches dans l’huile de poisson, ont démontré leur potentiel pour réduire les niveaux de triglycérides. Cependant, les effets de la supplémentation en huile de poisson sur la lipidomique (Lipidomics) et la flore intestinale (Gut Microbiome) chez les patients T2D, ainsi que les mécanismes par lesquels ces facteurs régulent conjointement les niveaux de triglycérides, restent encore peu clairs. De plus, il existe des différences significatives dans la réponse individuelle à la supplémentation en huile de poisson, dont les causes n’ont pas été entièrement éclaircies.
Pour combler ces lacunes, Jieli Lu et son équipe ont mené une étude contrôlée randomisée en double aveugle visant à explorer l’impact de la supplémentation en huile de poisson sur la lipidomique et la flore intestinale chez les patients T2D avec hypertriglycéridémie, et à identifier les caractéristiques de base permettant de prédire l’efficacité de la réduction des triglycérides par l’huile de poisson.
Source de l’article
Cette étude a été réalisée par Jieli Lu, Ruixin Liu, Huahui Ren et d’autres chercheurs provenant de plusieurs institutions, notamment l’Institut de recherche sur les maladies endocriniennes et métaboliques de l’hôpital Ruijin de l’École de médecine de l’université Jiao Tong de Shanghai, BGI Research, et l’Académie de recherche génomique de Shenzhen. Elle a été publiée dans le journal Med le 10 janvier 2025.
Procédure et résultats de l’étude
1. Conception de l’étude et participants
L’étude a inclus 309 patients chinois atteints de T2D avec hypertriglycéridémie, qui ont été randomisés en deux groupes : un groupe huile de poisson (153 personnes) et un groupe placebo (156 personnes), pour une intervention de 12 semaines. Le groupe huile de poisson a reçu quotidiennement 4 grammes d’huile de poisson, tandis que le groupe placebo a reçu de l’huile de maïs. L’indicateur principal était la variation des niveaux sériques de triglycérides et les caractéristiques de la lipidomique, tandis que les indicateurs secondaires comprenaient les changements de la flore intestinale et d’autres variables métaboliques.
2. Résultats cliniques
Les résultats montrent que le groupe huile de poisson a vu ses niveaux de triglycérides diminuer significativement après 12 semaines, avec une baisse moyenne de 1,51 mmol/L (intervalle de confiance de 95% : -2,01 à -1,01), ce qui est nettement supérieur au groupe placebo (-0,66 mmol/L, p=0,02). De plus, le groupe huile de poisson a également montré une amélioration significative des niveaux de cholestérol LDL (Low-Density Lipoprotein Cholesterol).
3. Analyse lipidomique
En utilisant la technologie de chromatographie liquide à ultra-haute performance couplée à la spectrométrie de masse à haute résolution, l’équipe de recherche a constaté que la supplémentation en huile de poisson a considérablement modifié le profil lipidique sérique des patients. Après la supplémentation en huile de poisson, 56,6% des lipides ont diminué significativement, en particulier les triglycérides peu saturés, les phosphatidylcholines (Phosphatidylcholines, PC), les phosphatidylethanolamines (Phosphatidylethanolamines, PE) et les céramides (Ceramides, Cer). De plus, les lipides contenant de l’EPA et du DHA ont augmenté de manière significative dans le groupe huile de poisson.
4. Analyse de la flore intestinale
L’analyse de la flore intestinale a montré que la supplémentation en huile de poisson avait un impact mineur sur la diversité et la composition globale de la flore intestinale. Cependant, les caractéristiques de la flore intestinale à la ligne de base pouvaient prédire de manière significative l’efficacité de la réduction des triglycérides par l’huile de poisson. L’équipe de recherche a construit un indice de triglycérides de la flore intestinale (Gut Microbiota Triglyceride Index, GMTGI) basé sur 112 espèces bactériennes liées aux triglycérides, et a constaté que les patients ayant une valeur GMTGI plus élevée à la ligne de base avaient une meilleure réponse à l’huile de poisson.
5. Modèles prédictifs et exploration des mécanismes
En utilisant des modèles de forêt aléatoire (Random Forest Model), les chercheurs ont découvert que les caractéristiques de la flore intestinale à la ligne de base étaient supérieures aux phénotypes cliniques et aux caractéristiques lipidiques pour distinguer les répondants (Responders, Rs) des non-répondants (Non-responders, Nrs). Certaines caractéristiques microbiennes de base et des voies métaboliques (comme la voie de dégradation de l’L-histidine III) étaient fortement corrélées à la réduction des triglycérides. De plus, l’analyse médiationnelle (Mediation Analysis) a révélé que certains métabolites lipidiques jouaient un rôle important dans la médiation entre les caractéristiques microbiennes de base et l’efficacité de la réduction des triglycérides par l’huile de poisson.
Conclusion et importance de l’étude
Cette étude révèle pour la première fois systématiquement l’impact de la supplémentation en huile de poisson sur la lipidomique et la flore intestinale chez les patients T2D, et souligne la valeur des caractéristiques de la flore intestinale à la ligne de base comme facteur prédictif de l’efficacité de la réduction des triglycérides par l’huile de poisson. Ces résultats fournissent une nouvelle base scientifique pour l’utilisation de l’huile de poisson chez les patients T2D et hypertriglycéridémiques, et ouvrent la voie à des stratégies d’intervention nutritionnelle personnalisée.
Points forts de l’étude
- Réduction significative des triglycérides : La supplémentation en huile de poisson a significativement réduit les niveaux de triglycérides chez les patients T2D, confirmant son efficacité dans la gestion des lipides.
- Changements lipidomiques : Première révélation complète de l’impact profond de l’huile de poisson sur le profil lipidique sérique chez les patients T2D, en particulier l’augmentation des triglycérides hautement insaturés et la réduction des triglycérides peu saturés.
- Association entre la flore intestinale et l’efficacité de la réduction des triglycérides : Découverte que les caractéristiques de la flore intestinale à la ligne de base peuvent prédire de manière significative l’efficacité de la réduction des triglycérides par l’huile de poisson, offrant de nouvelles perspectives pour des interventions personnalisées.
- Méthodes innovantes de recherche : Utilisation de modèles de forêt aléatoire et d’analyse médiationnelle pour explorer en profondeur les relations complexes entre la flore intestinale, la métabolisation des lipides et l’efficacité de l’huile de poisson.
Limitations et directions futures
Cette étude ne concerne que la population chinoise, et il convient de vérifier si les résultats s’appliquent à d’autres groupes ethniques. De plus, la durée de l’intervention est relativement courte, et les effets à long terme doivent être étudiés davantage. Des recherches futures devraient inclure des études transpopulaires et à long terme pour valider et généraliser ces découvertes.
Cette étude approfondit notre compréhension de l’utilisation de l’huile de poisson chez les patients T2D et fournit des bases scientifiques importantes pour des interventions nutritionnelles personnalisées basées sur la flore intestinale.