Recrutement en boucle fermée des interneurones striés prévient les comportements de toilettage compulsifs

Les comportements obsessionnels compulsifs ont toujours été associés à une hyperactivité du striatum. Les neurones GABAergiques positifs pour la parvalbumine (PVIs) dans le striatum jouent un rôle clé dans la régulation de l’activité striatale et l’inhibition des comportements moteurs inappropriés. Pour étudier le rôle potentiel des PVIs striataux dans la régulation des comportements obsessionnels compulsifs, les chercheurs ont évalué les comportements de surconsommation (utilisés comme indice comportemental des comportements compulsifs) chez des souris déficientes pour le gène Sapap3 (Sapap3-KO).

Contexte de la recherche : Les comportements compulsifs sont un symptôme central de diverses maladies neuropsychiatriques (comme le trouble obsessionnel compulsif) et de plus en plus de preuves suggèrent qu’ils sont liés à un dysfonctionnement de la boucle cortico-striatale. Des études antérieures ont révélé une diminution de la densité des PVIs dans la région striatale chez les patients souffrant de TOC et les modèles animaux présentant des comportements répétitifs pathologiques. Les PVIs sont capables de réguler l’activité des neurones de projection striataux via une puissante inhibition récurrente et sont donc considérés comme jouant un rôle important dans le contrôle des sorties comportementales. Cependant, le lien de causalité entre les PVIs et les comportements compulsifs n’a pas encore été élucidé.

Activation optogénétique continue Source de l’étude : Cette étude a été réalisée conjointement par Sirenia Lizbeth Mondragon-Gonzalez, Christiane Schreiweis et Eric Burguiere de l’Institut du Cerveau de Paris, en France, et les résultats ont été publiés dans la revue Nature Neuroscience.

Procédures et résultats de l’étude : (a) Procédures : Les chercheurs ont injecté bilatéralement le virus AAV5-hChR2-mCherry chez des souris Sapap3-KO, exprimant spécifiquement le canal cationique photosensible rhodopsine2 dans les PVIs. Des fibres optiques ont été implantées bilatéralement dans la région striatale recevant les afférences du cortex orbitofrontal latéral, permettant un contrôle optogénétique.

L’étude comprenait deux parties principales : 1) Activation optogénétique continue : activation lumineuse continue des PVIs (trains de 5 ms à 20 Hz, 10 mW), observant les changements des comportements compulsifs. 2) Activation optogénétique en boucle fermée : en enregistrant les potentiels de champ locaux (LFP) du cortex orbitofrontal latéral, une augmentation transitoire de la puissance dans la bande de fréquence delta (1-4 Hz) a été détectée avant l’apparition des comportements compulsifs, servant de biomarqueur. Un système de surveillance en ligne basé sur un réseau de neurones artificiels a été mis en place pour déclencher une activation optique brève (4 s) des PVIs striataux lors de la détection de ce biomarqueur LFP.

(b) Résultats principaux :
1) L’activation optogénétique continue des PVIs a réduit de 55,8 % le nombre d’épisodes de surliage et de 46,25 % leur durée chez les souris Sapap3-KO, les ramenant à des niveaux normaux, sans affecter d’autres comportements comme la marche ou le toilettage. 2) Une augmentation transitoire de la puissance dans la bande delta (1-4 Hz) des LFP du cortex orbitofrontal latéral a été observée environ 1 seconde avant les épisodes de surliage chez les souris Sapap3-KO, permettant de prédire leur survenue. 3) Le système d’activation optogénétique en boucle fermée a permis de détecter en temps réel ce biomarqueur LFP et d’activer les PVIs à temps, prévenant efficacement les épisodes de surliage avec une réduction de 59,37% du nombre d’épisodes et de 70,54% de leur durée, comparable à l’activation continue mais avec seulement 13% du temps de stimulation.

Signification et innovations de l’étude : 1) Cette étude démontre pour la première fois le rôle clé des PVIs striataux dans la régulation des comportements compulsifs, fournissant de nouvelles pistes pour élucider les circuits neuronaux sous-jacents. 2) La découverte d’un biomarqueur LFP des comportements compulsifs dans le cortex orbitofrontal latéral jette les bases pour la prédiction et l’intervention en temps réel. 3) Un système innovant d’activation optogénétique en boucle fermée basé sur l’apprentissage automatique a été établi, permettant la détection en temps réel et le contrôle des comportements sur demande, ouvrant de nouvelles perspectives thérapeutiques. 4) Par rapport à la stimulation continue, l’activation en boucle fermée réduit considérablement le temps de stimulation inutile, offrant des avantages en termes d’économie d’énergie et d’évitement d’effets secondaires potentiels.

Dans l’ensemble, cette étude combinant l’électrophysiologie, l’optogénétique et l’intelligence artificielle a permis des avancées majeures dans la compréhension des circuits neuronaux impliqués dans les comportements compulsifs, ainsi que dans la prédiction et le contrôle de ces comportements. Elle revêt une importance cruciale pour explorer les mécanismes pathologiques du TOC et développer de nouvelles stratégies thérapeutiques.