L'évolution continue du SARS-CoV-2 entraîne l'échappement à l'immunité humorale induite par les vaccins à ARNm

L’évolution continue du SARS-CoV-2 entraîne son échappement à l’immunité humorale induite par les vaccins à ARNm

Contexte académique

Depuis son apparition fin 2019, le virus SARS-CoV-2 a subi une évolution continue, donnant naissance à plusieurs variants. Ces variants ont accru leur capacité de transmission et d’échappement immunitaire, en particulier face à l’immunité humorale induite par les vaccins. Bien que les vaccins à ARNm aient démontré une efficacité remarquable dans la prévention des infections, des hospitalisations et des décès liés au COVID-19, l’émergence de variants comme Omicron a progressivement réduit l’efficacité des vaccins. Pour répondre à ce défi, les chercheurs ont continuellement mis à jour les formulations vaccinales, mais l’évolution rapide du virus continue de menacer l’efficacité des vaccins.

Cet article, rédigé par Alex L. Roederer, Yi Cao, Kerri St. Denis et leur équipe du Ragon Institute of MGH, MIT, and Harvard, a été publié le 17 décembre 2024 dans la revue Cell Reports Medicine. L’étude vise à explorer comment l’évolution continue du SARS-CoV-2 affecte l’immunité humorale induite par les vaccins à ARNm et à évaluer la capacité des vaccins mis à jour à neutraliser les variants.

Processus de recherche

1. Construction d’une bibliothèque de pseudovirus

L’équipe de recherche a construit une bibliothèque de pseudovirus contenant 131 mutations individuelles, couvrant 50 variants du SARS-CoV-2. Les pseudovirus ont été générés en exprimant la protéine Spike du SARS-CoV-2 sur des particules de lentivirus, codant également un gène rapporteur de luciférase. Ces pseudovirus ont été utilisés pour évaluer la capacité des anticorps induits par les vaccins à neutraliser différentes mutations.

2. Tests de neutralisation

L’équipe a effectué des tests de neutralisation sur 20 vaccinés n’ayant jamais été infectés par le COVID-19 (ayant reçu deux doses de vaccin à ARNm) et sur 22 vaccinés ayant reçu une troisième dose de vaccin à ARNm. Les tests ont consisté à mélanger les pseudovirus avec le sérum des participants, puis à ajouter des cellules cibles exprimant ACE2, en mesurant l’activité de la luciférase pour évaluer la neutralisation.

3. Tests de liaison ACE2

Pour évaluer l’impact des différentes mutations sur la capacité de liaison à ACE2, l’équipe a effectué des tests de liaison ACE2 sur 220 constructions d’expression de la protéine Spike. La force de liaison entre ACE2 et la protéine Spike a été mesurée par cytométrie en flux.

4. Analyse des données

L’équipe a utilisé les données des tests de neutralisation à haut débit et des tests de liaison ACE2 pour analyser la capacité des différentes mutations à échapper à l’immunité humorale induite par les vaccins, et a exploré l’impact des mutations sur la liaison à ACE2 et l’efficacité de l’infection virale.

Résultats principaux

1. La vaccination primaire révèle des zones de vulnérabilité dans le paysage mutationnel

Le sérum des vaccinés primaires a montré une forte capacité de neutralisation contre le pseudovirus de Wuhan, mais un échappement significatif face à plusieurs mutations individuelles, en particulier dans les domaines N-terminal (NTD) et de liaison au récepteur (RBD). La plupart des mutations d’échappement ont réduit la capacité de liaison à ACE2, indiquant un compromis entre l’échappement immunitaire et la liaison au récepteur.

2. La vaccination de rappel à ARNm améliore significativement la neutralisation des mutants du SARS-CoV-2

La troisième dose de vaccin à ARNm a significativement amélioré la capacité de neutralisation de la plupart des mutants, en particulier ceux apparus avant le variant Delta. Cependant, certaines mutations (comme P26S, Y453F, V1176F et M1229I) ont encore montré un échappement significatif face au sérum des vaccinés ayant reçu une dose de rappel.

3. Les mutations individuelles d’Omicron révèlent des sites de résistance face au sérum des vaccinés ayant reçu une dose de rappel

Plusieurs mutations du variant Omicron (comme V445P, N460K et F486P) ont montré une capacité d’échappement significative, bien que ces mutations aient également réduit la liaison à ACE2. Cela suggère un équilibre complexe entre l’échappement immunitaire et la liaison au récepteur.

4. Les vaccins spécifiques aux variants améliorent significativement la largeur de neutralisation

Le vaccin mis à jour ciblant le variant XBB.1.5 a significativement amélioré la capacité de neutralisation de la plupart des variants, mais cette capacité reste limitée face aux derniers variants comme JN.1, KP.2 et KP.3. Cela indique que l’évolution continue du SARS-CoV-2 continue de poser un défi à l’efficacité des vaccins.

Conclusion

L’étude montre que, bien que les vaccins à ARNm aient été très efficaces pour prévenir le COVID-19, l’évolution continue du SARS-CoV-2 lui permet d’échapper à l’immunité humorale induite par les vaccins. Les vaccins mis à jour (comme le vaccin XBB.1.5) ont significativement amélioré la capacité de neutralisation de la plupart des variants, mais cette capacité reste limitée face aux derniers variants (comme JN.1, KP.2 et KP.3). L’étude souligne l’importance d’une surveillance continue de l’évolution du virus et du développement de vaccins capables d’induire une immunité neutralisante large.

Points forts de l’étude

  1. Évaluation complète de l’impact des mutations sur l’échappement immunitaire : L’étude a construit une bibliothèque de pseudovirus contenant 131 mutations individuelles, permettant une évaluation complète de la capacité des différentes mutations à échapper à l’immunité humorale induite par les vaccins.
  2. Révélation de la relation complexe entre l’évolution virale et l’échappement immunitaire : L’étude a montré que le virus doit faire un compromis entre l’échappement immunitaire et la liaison au récepteur, certaines mutations réduisant la liaison à ACE2 tout en permettant l’échappement immunitaire.
  3. Évaluation de l’efficacité des vaccins mis à jour : L’étude a évalué la capacité des vaccins mis à jour (comme le vaccin XBB.1.5) à neutraliser les derniers variants, montrant une efficacité limitée face aux variants les plus récents.

Signification de l’étude

Cette étude fournit des insights importants pour comprendre l’évolution continue du SARS-CoV-2 et son impact sur l’efficacité des vaccins. Les résultats soulignent l’importance de développer des vaccins capables d’induire une immunité neutralisante large et fournissent une base scientifique pour la conception et la mise à jour des vaccins à l’avenir.