Impact des agonistes des récepteurs du peptide-1 de type glucagon sur la fonction axonale dans la neuropathie périphérique diabétique

Impact des agonistes des récepteurs du GLP-1 sur la fonction axonale dans la neuropathie périphérique diabétique

Contexte académique

La neuropathie périphérique diabétique (Diabetic Peripheral Neuropathy, DPN) est l’une des complications les plus courantes chez les patients atteints de diabète de type 2 dans le monde, affectant environ 50 % des patients diabétiques. Les principaux symptômes de la DPN incluent des douleurs neuropathiques, des engourdissements et, dans les cas graves, une faiblesse musculaire et une atrophie. Bien que le traitement actuel de la DPN se concentre principalement sur le soulagement des symptômes, il n’existe encore aucune méthode efficace pour inverser ou arrêter la progression des lésions nerveuses. Ces dernières années, les agonistes des récepteurs du peptide-1 de type glucagon (Glucagon-Like Peptide-1, GLP-1) (GLP-1RA) ont attiré l’attention en raison de leurs multiples effets dans le traitement du diabète (tels que la stimulation de la sécrétion d’insuline, la réduction de la libération de glucagon et la perte de poids). De plus, des études ont montré que les récepteurs du GLP-1 sont exprimés dans le système nerveux périphérique, suggérant que les GLP-1RA pourraient avoir un potentiel thérapeutique pour la DPN.

Cette étude vise à explorer l’impact des GLP-1RA sur la fonction axonale des patients atteints de DPN, en particulier à travers des techniques de neurophysiologie (comme les tests d’excitabilité axonale) et une analyse par modélisation mathématique, afin de révéler les mécanismes potentiels par lesquels les GLP-1RA améliorent la DPN.

Source de l’article

Cet article a été co-écrit par Roshan Dhanapalaratnam, Tushar Issar, Ann M. Poynten, Kerry-Lee Milner, Natalie C. G. Kwai et Arun V. Krishnan. Les auteurs sont affiliés à l’Université de Nouvelle-Galles du Sud (UNSW Sydney), à l’hôpital Prince of Wales (Prince of Wales Hospital) et à l’Université de Wollongong (University of Wollongong) en Australie. L’étude a été publiée pour la première fois le 25 novembre 2024 dans le Journal of Neurophysiology, avec le DOI 10.1152/jn.00228.2024.

Déroulement de l’étude

Sujets et conception de l’étude

Cette étude a recruté 14 patients atteints de diabète de type 2, à qui des GLP-1RA (tels que le semaglutide ou le dulaglutide) avaient été prescrits dans le cadre de leur traitement clinique. De plus, les données de 10 patients ayant précédemment reçu un traitement par exénatide ont été incluses pour renforcer la puissance statistique de l’analyse. Tous les participants ont subi des évaluations cliniques, des études de conduction nerveuse et des tests d’excitabilité axonale au départ et trois mois après le début du traitement par GLP-1RA.

Méthodes expérimentales

  1. Évaluation clinique : Le score total de neuropathie (Total Neuropathy Score, TNS) a été utilisé pour évaluer la gravité de la neuropathie. Le TNS inclut les symptômes sensoriels et moteurs, la sensibilité à la piqûre, la perception des vibrations, l’examen de la force musculaire, les réflexes tendineux profonds ainsi que les tests de conduction nerveuse (tels que les potentiels d’action des nerfs sensitifs du nerf sural et les potentiels d’action musculaire composés du nerf tibial).

  2. Études de conduction nerveuse : En stimulant les nerfs sural et tibial, les amplitudes des potentiels d’action des nerfs sensitifs (SNAP) et des potentiels d’action musculaire composés (CMAP) ont été enregistrées pour évaluer la fonction de conduction nerveuse.

  3. Tests d’excitabilité axonale : Le logiciel QTrac et le protocole TROND ont été utilisés pour tester l’excitabilité axonale du nerf médian dans le membre supérieur des patients. Les tests incluaient la relation intensité-durée, l’électrotonus de seuil (threshold electrotonus) et le cycle de récupération (recovery cycle) pour évaluer les canaux ioniques voltage-dépendants et la fonction de la pompe Na⁺/K⁺-ATPase sur la membrane axonale.

  4. Analyse par modélisation mathématique : Le modèle de Bostock a été utilisé pour analyser les données d’excitabilité axonale, simulant les changements de perméabilité des canaux Na⁺ et K⁺ et des courants de la pompe Na⁺/K⁺-ATPase, afin d’expliquer les mécanismes par lesquels les GLP-1RA améliorent la fonction axonale.

Analyse des données

Toutes les données ont été analysées à l’aide de SPSS 26.0. Des tests t appariés ont été utilisés pour comparer les changements avant et après le traitement, et une ANOVA avec analyse post hoc de Dunnett a été utilisée pour comparer les résultats entre les groupes de patients et les témoins. De plus, une analyse de régression multiple a été réalisée pour évaluer l’impact des changements de l’HbA1c et de l’IMC sur les résultats de l’excitabilité axonale.

Résultats principaux

  1. Amélioration des scores cliniques : Après trois mois de traitement par GLP-1RA, le TNS des patients a significativement diminué (TNS initial 3,7±4,5, TNS post-traitement 2,3±3,4, p=0,005), indiquant une amélioration des symptômes de neuropathie.

  2. Amélioration de la conduction nerveuse : L’amplitude du SNAP du nerf sural a significativement augmenté après le traitement (initial 11,9±8,5 μV, post-traitement 14,2±9,2 μV, p=0,013), tandis que l’amplitude du CMAP du nerf tibial n’a pas montré de changement significatif (p=0,511).

  3. Changements dans l’excitabilité axonale : Après le traitement par GLP-1RA, les paramètres d’excitabilité axonale ont montré une amélioration de la fonction de la pompe Na⁺/K⁺-ATPase et de la perméabilité au Na⁺. Plus précisément, l’électrotonus de seuil dépolarisant (depolarizing threshold electrotonus) à 10-20 ms a significativement augmenté (initial 67,22±4,63 %, post-traitement 69,13±6,07 %, p=0,019), ainsi que l’accommodation S2 (S2 accommodation) et la sous-excitabilité (subexcitability).

  4. Support par modélisation mathématique : L’analyse par modélisation mathématique a montré qu’après le traitement par GLP-1RA, la réduction de la perméabilité au Na⁺ de la membrane axonale était moins sévère et que le courant de la pompe Na⁺/K⁺-ATPase augmentait, soutenant davantage le mécanisme par lequel les GLP-1RA inversent la dysfonction axonale en améliorant la fonction de la pompe Na⁺/K⁺-ATPase.

Conclusion et signification

Cette étude démontre que le traitement par GLP-1RA améliore significativement les scores cliniques, la fonction de conduction nerveuse et l’excitabilité axonale des patients atteints de DPN. Grâce à l’analyse par modélisation mathématique, l’étude révèle que les GLP-1RA améliorent la fonction axonale en augmentant l’activité de la pompe Na⁺/K⁺-ATPase et en améliorant la perméabilité au Na⁺. Cette découverte fournit une base scientifique importante pour l’utilisation des GLP-1RA comme traitement potentiel de la DPN et suggère que les GLP-1RA pourraient avoir le potentiel d’inverser les dommages nerveux.

Points forts de l’étude

  1. Découverte importante : Le traitement par GLP-1RA améliore significativement la fonction axonale des patients atteints de DPN, ce qui est la première fois que ce mécanisme est révélé grâce à des tests d’excitabilité axonale et à une modélisation mathématique.

  2. Méthode innovante : L’étude a utilisé des tests d’excitabilité axonale avancés et le modèle mathématique de Bostock, permettant une analyse approfondie des changements dans les canaux ioniques et la fonction des pompes sur la membrane axonale, offrant ainsi une nouvelle perspective pour comprendre les mécanismes pathologiques de la DPN.

  3. Signification clinique : Les GLP-1RA non seulement améliorent le contrôle glycémique et la perte de poids chez les patients diabétiques, mais pourraient également apporter des bénéfices cliniques supplémentaires aux patients atteints de DPN en améliorant la fonction axonale.

Autres informations utiles

L’étude a également révélé que l’amélioration de la fonction axonale par les GLP-1RA était indépendante des changements de l’HbA1c et de l’IMC, suggérant que les effets thérapeutiques des GLP-1RA sur la DPN pourraient être indépendants de leurs effets métaboliques. Cette découverte ouvre de nouvelles perspectives pour la recherche sur les effets neuroprotecteurs des GLP-1RA.


Grâce à cette étude, le potentiel des GLP-1RA dans le traitement de la neuropathie périphérique diabétique est davantage confirmé, et des études à plus long terme pourraient être nécessaires pour évaluer leurs effets durables et leur valeur clinique.