La thérapie anti-angiogénique comme traitement potentiel de l'adénomyose

Thérapie anti-angiogénique comme traitement potentiel de l’adénomyose

Contexte académique

L’adénomyose (Adenomyosis) est une maladie gynécologique courante caractérisée par l’invasion du tissu endométrial dans le myomètre de l’utérus, entraînant des saignements utérins anormaux, une dysménorrhée et une infertilité. Bien que cette maladie ait un impact majeur sur la qualité de vie des femmes et sur la santé publique, son étiologie reste encore mal comprise. À ce jour, le traitement de l’adénomyose repose principalement sur des thérapies hormonales. Cependant, de nombreuses patientes, confrontées à des effets secondaires significatifs ou à une atténuation insuffisante des symptômes, doivent se tourner vers des méthodes plus radicales telles que l’embolisation des artères utérines ou l’hystérectomie. Pourtant, ces options ne sont pas adaptées aux femmes souhaitant conserver leur fertilité.

Ces dernières années, des études ont révélé une augmentation significative de l’expression des marqueurs de l’angiogenèse (Angiogenesis) dans les tissus endométriaux des patientes atteintes d’adénomyose, suggérant que l’angiogenèse pourrait jouer un rôle clé dans le développement de la maladie. L’angiogenèse, processus par lequel de nouveaux capillaires sont formés à partir de vaisseaux existants, intervient dans des processus physiologiques et pathologiques. Sur cette base, les chercheurs posent l’hypothèse que la thérapie anti-angiogénique pourrait constituer une stratégie thérapeutique prometteuse pour l’adénomyose.

Source de l’article

Cet article a été rédigé par Marissa J. Harmsen, Lynda J. M. Juffermans, Muara O. Kroon, Arjan W. Griffioen et Judith A. F. Huirne, affiliés à l’Amsterdam University Medical Center (Amsterdam UMC) des Pays-Bas, notamment aux départements de gynécologie-obstétrique, au laboratoire d’angiogenèse oncologique et au centre de recherche sur le cancer d’Amsterdam. L’article a été publié en 2025 dans la revue Angiogenesis sous le titre : Anti-angiogenic therapy as potential treatment for adenomyosis.

Déroulement de l’étude

1. Modèle animal : développement et validation

L’étude a d’abord établi un modèle murin d’adénomyose sur des souris CD-1. Les souris nouveau-nées ont reçu du tamoxifène (1 mg/kg) par voie orale entre les 2e et 5e jours suivant leur naissance pour induire l’adénomyose. À six semaines, les souris ont été réparties en trois groupes : le premier a reçu une faible dose d’axitinib (3 mg/kg, n=34), le deuxième une dose élevée d’axitinib (25 mg/kg, n=34), et le troisième un placebo (n=34). L’évaluation a porté sur la prévalence et la gravité de l’adénomyose via des analyses histologiques, et un indice de gravité de l’adénomyose (Adenomyosis Severity Index) a été calculé.

2. Analyses histologiques et immunohistochimiques

Les tissus utérins des souris ont été divisés en deux parties : l’une pour l’inclusion en paraffine, suivie de colorations H&E (hématoxyline-éosine) et d’analyses immunohistochimiques (IHC), et l’autre pour extraire l’ARN et effectuer des analyses PCR quantitatives en temps réel (RT-qPCR). Les marqueurs tels que l’α-actine musculaire lisse (α-SMA), le CD31 et la vimentine (Vimentin) ont été étudiés afin d’évaluer les changements structurels et la densité vasculaire.

3. Analyse de l’expression des gènes

Via RT-qPCR, l’expression de gènes liés à l’angiogenèse (tels que VEGF-A, VEGF-R1, VEGF-R2, PLGF et BFGF) a été mesurée pour évaluer l’effet du traitement par axitinib sur l’angiogenèse.

Principaux résultats

1. Modèle d’adénomyose validé avec succès

Toutes les souris traitées au tamoxifène ont développé une adénomyose, tandis que celles ayant reçu le placebo n’ont pas présenté la maladie. Les analyses histologiques ont montré une infiltration ectopique des glandes endométriales dans le myomètre et une désorganisation claire des structures musculaires chez les souris traitées au tamoxifène.

2. L’effet de l’axitinib sur la gravité de l’adénomyose

  • Prévalence : Les taux de prévalence de l’adénomyose étaient similaires entre les groupes (axi3 : 90,0 %, axi25 : 85,3 %, placebo : 88,2 %).
  • Gravité : Dans le groupe traité avec une forte dose d’axitinib, la prévalence des adénomyoses de grade élevé (23) était significativement inférieure à celle du groupe placebo (55,9 % contre 79,4 %). L’indice de gravité de l’adénomyose a été réduit de 48 % chez les souris recevant une faible dose d’axitinib par rapport au groupe placebo.
  • Expression génétique : Les gènes liés à l’angiogenèse, comme VEGF-R1, VEGF-R2 et CD31, ont vu leur expression considérablement réduite après le traitement par axitinib.

3. Changements dans les paramètres de la paroi utérine et la densité vasculaire

Les souris traitées par axitinib présentaient une épaisseur myométriale plus faible et une densité vasculaire inférieure comparées aux souris du groupe placebo, suggérant un effet thérapeutique significatif dans la réduction des symptômes pathologiques de l’adénomyose.

Conclusion et portée

L’étude a démontré que l’axitinib, agent anti-angiogénique, réduit significativement la gravité de l’adénomyose en limitant l’infiltration ectopique de l’endomètre et en préservant la structure myométriale. Ces résultats offrent une nouvelle approche prometteuse pour traiter l’adénomyose, en particulier pour les patientes souhaitant préserver leur fertilité. Par ailleurs, cette recherche suggère qu’une faible dose de médicament anti-angiogénique suffit pour obtenir des effets cliniques notables, minimisant ainsi les risques d’effets secondaires.

Points forts de l’étude

  1. Stratégie thérapeutique innovante : Première application de la thérapie anti-angiogénique au modèle murin d’adénomyose, avec des résultats significatifs.
  2. Faible dose thérapeutique : Les résultats indiquent qu’une faible dose d’axitinib est efficace, ce qui constitue une avancée majeure pour les applications cliniques.
  3. Évaluation multidimensionnelle : L’effet thérapeutique a été étudié en détail grâce à des méthodes complètes d’analyse histologique, immunohistochimique et génique.

Perspectives futures

Malgré ces résultats prometteurs, des recherches supplémentaires sont nécessaires pour explorer la sécurité, le meilleur moment d’administration du traitement et la possibilité d’une application locale des médicaments anti-angiogéniques. En outre, l’étude des mécanismes communs entre différents agents anti-angiogéniques et l’analyse des effets secondaires potentiels restent des priorités.

Cette recherche ouvre une voie nouvelle et innovante pour le traitement de l’adénomyose et possède une grande valeur scientifique et un fort potentiel d’application clinique.