Prédire le risque de déclin neurocognitif après irradiation cérébrale chez les patients adultes atteints d'une tumeur cérébrale primaire

Contexte :

La radiothérapie est un traitement majeur pour les patients atteints d’une tumeur cérébrale, mais elle peut entraîner un déclin des fonctions cognitives, ce qui est l’une des complications les plus préoccupantes. Il n’existe actuellement aucun outil dans la pratique clinique pour évaluer le risque de déclin cognitif chez les patients. L’objectif de cette étude est d’établir un modèle de prédiction des risques basé sur des facteurs cliniques et de dose-volume, afin de fournir une base pour l’optimisation du plan de traitement par radiothérapie et la récupération post-opératoire.

Institutions et auteurs :

Cette étude a été réalisée par le département de radiothérapie (clinique MAASTRO) et l’école des sciences du cancer et de la reproduction (GROW) du centre médical de l’université de Maastricht aux Pays-Bas. La première auteure est Fariba Tohidinezhad et l’auteure correspondante est le Dr Alberto Traverso. Les auteurs proviennent également des services de neuropsychologie, de neurologie et autres services pertinents du centre médical de l’université de Maastricht.

Méthodologie de recherche :

1) Sujets : 219 patients atteints d’une tumeur cérébrale primaire ayant reçu une radiothérapie curative (photons ou protons) entre 2019 et 2022.

2) Outils d’évaluation : Le déclin cognitif a été objectivement évalué à l’aide du test d’association verbale contrôlée (COWA), du test d’apprentissage de mots révisé de Hopkins (HVLTR) et du Trail Making Test (TMT).

3) Facteurs prédictifs : Les facteurs cliniques tels que les données démographiques, les caractéristiques tumorales, les informations sur le traitement, les comorbidités et les médicaments, ainsi que les paramètres de dose-volume de multiples régions cérébrales ont été pris en compte.

4) Analyses statistiques : Après une analyse univariée, des modèles cliniques, de dose-volume et combinés ont été établis à l’aide d’une régression logistique multivariée. La capacité discriminante (aire sous la courbe ROC), la capacité de calibrage (erreur absolue moyenne) et les analyses des courbes de décision nette ont été réalisées pour la validation interne.

Principaux résultats :

1) À 6 mois, 1 an et 2 ans, respectivement 50 %, 44,5 % et 42,7 % des patients ont présenté un déclin cognitif.

2) Les facteurs prédictifs du déclin cognitif à 6 mois dans le modèle combiné incluaient : âge > 56 ans, surpoids, obésité, chimiothérapie, V20Gy cérébrale ≥ 20 %, volume du tronc cérébral ≥ 26 cc, volume de l’hypothalamus ≥ 0,5 cc.

3) Dans le modèle de déclin cognitif à 1 an, les facteurs de risque étaient une tumeur temporale et une dose maximale à l’hippocampe gauche ≥ 7 Gy.

4) Les facteurs de risque de déclin cognitif à 2 ans comprenaient une dose maximale cérébrale ≥ 54 Gy et une dose maximale au cervelet ≥ 27 Gy.

5) L’analyse de la courbe de décision a montré que le modèle combiné avait le bénéfice net le plus élevé, avec des AUC respectives de 0,79, 0,72 et 0,69 à 6 mois, 1 an et 2 ans.

Signification de l’étude :

Cette étude a établi un modèle de prédiction du risque de déclin cognitif incluant des facteurs cliniques et de dose-volume, qui peut être utilisé pour l’évaluation des risques individuels. Il fournit une base pour l’optimisation de la stratégie de radiothérapie, le dépistage des patients à haut risque et les interventions de réadaptation. Le modèle suggère que la protection de l’hippocampe et du cervelet pourrait réduire le risque de déclin cognitif. Ces résultats apportent de nouvelles preuves pour optimiser les plans de traitement par radiothérapie.

Caractéristiques de l’étude :

1) C’est la première fois qu’un modèle de prédiction du risque de déclin cognitif chez l’adulte intégrant des facteurs prédictifs complets est établi.

2) Des tests neuropsychologiques standardisés ont été utilisés pour évaluer objectivement les fonctions cognitives.

3) Les paramètres de dose-volume de multiples régions cérébrales ont été analysés, élucidant leur relation avec les déficits cognitifs.

4) Le modèle prédictif a une bonne capacité discriminante, de calibrage et un bénéfice net de décision.

5) Le modèle prédictif est facile à appliquer en clinique et peut servir de référence pour la prise de décision clinique et les interventions de réadaptation.

Cette étude contribue à évaluer le risque de déficits cognitifs induits par la radiothérapie et fournit un soutien décisionnel pour un traitement et des interventions personnalisés.