Identification des personnes atteintes du syndrome de Lynch parmi les patients présentant un cancer colorectal en Angleterre : analyse de base du parcours diagnostique
Analyse du parcours diagnostique du syndrome de Lynch
Introduction
Le syndrome de Lynch (LS) est un syndrome de prédisposition héréditaire au cancer, principalement responsable du cancer colorectal (CRC), du cancer de l’endomètre et de plusieurs autres types de cancers. Bien que l’incidence du syndrome de Lynch chez les patients atteints de cancer et son importance pour la santé publique soient de plus en plus reconnues, son taux de diagnostic réel reste extrêmement faible, avec plus de 95% des patients atteints du syndrome de Lynch qui ne seraient pas correctement diagnostiqués selon les estimations. Cependant, en 2017, le National Health Service (NHS) britannique a publié de nouvelles directives recommandant que tous les cas de cancer colorectal soient testés pour la déficience du système de réparation des mésappariements de l’ADN (dMMR) afin de mieux identifier ces patients et d’améliorer leur pronostic.
Contexte de la recherche
Cette étude a été menée par une équipe de recherche comprenant Fiona E. McRonald, Joanna Pethick, Francesco Santaniello et d’autres, affiliés à plusieurs institutions dont le National Disease Registration Service (NCRAS) d’Angleterre et le Guy’s and St. Thomas’ NHS Foundation Trust. Les résultats de l’étude ont été publiés en 2024 dans l’European Journal of Human Genetics. L’étude a utilisé un ensemble de données nationales du NCRAS dans le but d’évaluer la mise en œuvre pratique des directives diagnostiques publiées en 2017.
Méthodologie
Les données de l’étude couvrent tous les cas de cancer colorectal diagnostiqués en Angleterre en 2019. Par le biais d’une analyse rétrospective, l’équipe de recherche a collecté et organisé les données relatives à 37 662 tumeurs colorectales, comprenant des informations démographiques sur les patients, des informations sur les tumeurs et des données de diagnostic de laboratoire pour le dMMR.
Plus précisément, l’analyse des données de l’étude comprend : 1. Données du registre du cancer : Une base de données du registre du cancer basée sur la population créée par le NCRAS. 2. Données de tests génomiques somatiques : Obtenues à partir de résumés de données personnalisés fournis par des laboratoires génétiques individuels et via l’ensemble de données obligatoire national sur les résultats et services du cancer (COSD). 3. Données germinales : Données des gènes MMR après pseudonymisation et traitement par un pipeline bio-informatique.
De plus, l’équipe de recherche a effectué des analyses statistiques descriptives, des tests du chi-carré, des tests t et des analyses de régression pour examiner les associations entre les variables démographiques et les résultats des tests dMMR ainsi que le suivi.
Principales découvertes
Tests somatiques :
- Sur les 37 662 tumeurs colorectales diagnostiquées en 2019, seules 44% ont fait l’objet d’un test dMMR.
- L’IHC (immunohistochimie) était la méthode de test la plus courante, représentant 89%, suivie par le test MSI (instabilité des microsatellites) à 8%.
- 16% des tumeurs présentaient une dMMR, dont 85% avec une déficience en protéine MLH1, mais seulement 54% ont ensuite fait l’objet de tests somatiques supplémentaires.
Disparités dans les tests de suivi :
- Les taux de tests dMMR variaient considérablement selon les régions, avec une différence de plus de quatre fois entre les régions les plus élevées et les plus basses.
- Des disparités régionales significatives ont également été observées dans les tests de suivi (somatiques ou germinaux), avec des taux insuffisants de tests somatiques et germinaux suivant les tests dMMR.
Tests germinaux :
- Dans l’ensemble, seulement 1,3% des patients atteints de cancer colorectal ont subi un test germinal des gènes MMR.
- Selon les critères du répertoire national des tests génétiques, 507 patients étaient éligibles aux tests germinaux en 2019, mais seulement 180 patients (36%) ont effectivement subi un test germinal des gènes MMR.
Conclusion et importance
Grâce à une analyse détaillée du parcours de test des patients atteints de cancer colorectal en Angleterre en 2019, l’étude a tiré les principales conclusions suivantes :
Faibles taux de tests et sous-diagnostic : Malgré les directives du NICE (National Institute for Health and Care Excellence) exigeant le test de tous les patients atteints de cancer colorectal, le taux réel de tests était inférieur à 50%, révélant des inégalités régionales importantes. Ce faible taux de tests soutient davantage l’idée que le syndrome de Lynch est gravement sous-diagnostiqué.
Problème de délais : Des retards importants ont été observés tout au long du parcours, de l’diagnostic initial aux tests MMR fonctionnels, aux tests somatiques supplémentaires et aux tests germinaux, limitant l’efficacité du diagnostic et la rapidité du suivi.
Nécessité de renforcer la mise en œuvre des politiques : L’étude suggère que si les directives diagnostiques du NICE étaient pleinement mises en œuvre, environ 700 nouveaux cas de syndrome de Lynch pourraient être identifiés chaque année, améliorant considérablement les taux de survie des patients et réduisant les coûts de santé.
Importance de la collecte de données nationales : Cette étude démontre la nécessité et le potentiel de lier les registres du cancer à l’échelle nationale avec les données de tests moléculaires (somatiques et germinaux), une approche qui fournira une référence solide pour les améliorations diagnostiques futures.
Cette étude révèle non seulement l’état actuel et les défis de la mise en œuvre du parcours diagnostique du syndrome de Lynch en Angleterre, mais fournit également des données de base importantes pour les améliorations futures et la mise en œuvre des politiques. Grâce à un suivi et une analyse continus des données, nous pouvons promouvoir le développement des technologies de diagnostic du cancer à plus grande échelle et améliorer le niveau global de santé publique.