Contrôle par rétroaction négative des circuits alimentaires hypothalamiques par le goût des aliments

Le goût des aliments a un impact significatif sur la motivation alimentaire des animaux. Des études antérieures montrent que le goût, en tant que signal de rétroaction positive, peut augmenter la motivation alimentaire des animaux. Cependant, ces dernières années, les recherches se sont multipliées quant à savoir si le goût joue également un rôle dans l’inhibition de l’alimentation et aide à réaliser un contrôle de rétroaction négative sur l’alimentation. La perception des nutriments dans l’intestin est relativement lente, tandis que la stimulation gustative est instantanée, ce qui suggère que le goût peut jouer un rôle dans la régulation de l’arrêt de l’alimentation. Dans les études humaines, il a été prouvé que le comportement de mâcher des aliments augmente davantage la sensation de satiété que les aliments directement livrés par le tractus gastro-intestinal, soutenant ainsi le rôle de rétroaction négative du goût dans le processus de l’alimentation. Cependant, au niveau des mécanismes neuronaux, la façon dont le goût intervient dans l’arrêt de l’alimentation reste un mystère.

Deux, Origine de l’étude

Cette étude a été réalisée conjointement par Tara J. Aitken, Zhengya Liu, Chris Barnes et Zachary A. Knight de l’Université de Californie à San Francisco (University of California, San Francisco) et publiée dans la revue “Neuron”. Cette recherche a exploré en profondeur l’impact du goût des aliments sur l’activité des neurones promoteurs de l’alimentation (agouti-related peptide, AGRP) dans l’hypothalamus, et a révélé l’effet dynamique des signaux gustatifs sur la régulation du processus de l’alimentation, à l’aide de techniques telles que l’optogénétique neuronale et la photométrie par fibres optiques.

Trois, Méthodes de recherche

1. Conception du protocole expérimental

L’étude a d’abord enregistré l’activité dynamique des neurones AGRP pendant le processus d’alimentation. L’expérience utilisait la technologie de l’optogénétique pour manipuler les souris et enregistrer les changements d’activité des neurones AGRP pendant le processus d’alimentation. En outre, l’étude a également utilisé la technique de « stimulation optogénétique en boucle fermée » pour inverser en temps réel l’inhibition induite par le goût des neurones AGRP, prolongeant ainsi la durée de l’alimentation. Pour analyser plus en détail le mécanisme du goût dans la régulation du processus d’alimentation, l’expérience a également utilisé le système Davis Rig pour effectuer un « test gustatif de court contact » et explorer la réaction des souris à différents goûts.

2. Objets de l’expérience et échantillons

L’expérience a impliqué des souris, enregistrant l’activité de leurs neurones AGRP lors de la consommation d’un régime liquide Ensure, et explorant aussi l’influence des goûts sucrés et gras sur des neurones AGRP. En outre, l’étude a également testé différentes substances non nutritives (comme des édulcorants, des huiles imitant les lipides), pour analyser s’il existe des signaux gustatifs inhibiteurs indépendants de l’état nutritionnel.

3. Méthodes d’analyse des données

Les données expérimentales ont été recueillies via diverses techniques, y compris la photométrie par fibres optiques pour un enregistrement en temps réel de l’activité neuronale. L’analyse des données a principalement utilisé la méthode de la normalisation par z-score pour quantifier les changements dynamiques des neurones AGRP dans différents états d’alimentation, et a utilisé la conception d’expérience aléatoire pour exclure les facteurs externes perturbateurs. Par des expériences d’optogénétique, il a été vérifié la relation causale entre l’activité des neurones AGRP sous contrôle en boucle fermée et le comportement alimentaire.

Quatre, Principaux résultats

1. Réaction inhibitrice instantanée des neurones AGRP au goût des aliments

L’expérience a révélé que, lorsqu’une souris entre en contact avec le goût des aliments, l’activité de ses neurones AGRP est significativement inhibée. Plus précisément, le phénomène d’inhibition des neurones AGRP apparaît dès le premier instant où la souris lèche les aliments et persiste jusqu’à la fin de chaque séance de consommation. Cette réponse inhibitrice est indépendante de l’état nutritionnel de la souris et ne dépend pas de la rétroaction négative gastro-intestinale, mais est directement déclenchée par les signaux gustatifs. Il est à noter que cette inhibition induite par le goût est particulièrement marquée pour les aliments riches en calories et les édulcorants.

2. Relation entre l’inhibition des neurones AGRP et l’arrêt de l’alimentation

Grâce à la technique de stimulation optogénétique en boucle fermée, l’étude a révélé que, si l’on empêche l’inhibition instantanée des neurones AGRP, la durée d’alimentation de la souris est considérablement prolongée. Cela indique que l’inhibition des neurones AGRP pourrait jouer un rôle dans la régulation de l’arrêt du processus alimentaire. Ce mécanisme diffère des résultats antérieurs sur la « faim persistante », car dans cette étude, l’effet de la stimulation en boucle fermée est instantané et ne génère pas de réponse de faim prolongée. Cela révèle également que la modulation de la sensation de satiété par les neurones AGRP au cours du début et de la continuité de l’alimentation fonctionne de manière fondamentalement différente.

3. Intégration des signaux de rétroaction gustative par les neurones DMH-LEPR

Dans des expériences supplémentaires, l’équipe de recherche a enregistré l’activité des neurones exprimant le récepteur à la leptine (LEPR) situés dans la région du dorsomédial de l’hypothalamus (Dorsomedial Hypothalamus, DMH). Les résultats ont montré que les neurones DMH-LEPR présentent une réponse d’activation temporelle significative au goût sucré et gras des aliments, affichant un schéma d’activité opposé à celui des neurones AGRP à chaque instant où les souris lèchent les aliments. La réponse d’activation des neurones DMH-LEPR présente des préférences spécifiques aux différents indices gustatifs, permettant ainsi de moduler la rétroaction négative des neurones AGRP sous différentes stimulations gustatives.

4. Effet synergique des signaux gustatifs et gastro-intestinaux

Pour explorer l’effet synergique des signaux gustatifs et gastro-intestinaux, l’équipe de recherche a réalisé des expériences d’injection de nutriments intra-gastriques chez les souris. Les résultats ont montré que la présence de nutriments peut renforcer l’effet d’activation des signaux gustatifs sur les neurones DMH-LEPR, augmentant l’intensité de la réponse au fur et à mesure que le processus d’alimentation se poursuit. Cet effet synergique fournit un mécanisme neuronal sur la façon dont les signaux gustatifs et gastro-intestinaux promeuvent conjointement la satiété.

Cinq, Signification et valeur de l’étude

1. Révélation d’une nouvelle fonction du goût dans la rétroaction négative du contrôle de l’alimentation

Cette recherche a révélé l’effet de rétroaction négative du goût dans le processus alimentaire, modifiant la perception traditionnelle du goût seulement en tant que signal de rétroaction positive. Les signaux gustatifs ne sont pas seulement une motivation pour se nourrir, mais jouent également un rôle clé dans l’arrêt de l’alimentation. Cela offre une nouvelle perspective pour comprendre le rôle du goût des aliments dans le comportement alimentaire, en particulier dans la conception de stratégies de contrôle alimentaire basées sur la régulation gustative.

2. Mécanisme de régulation dynamique des neurones AGRP et DMH-LEPR

En explorant l’interaction entre les neurones AGRP et DMH-LEPR dans le processus alimentaire, la recherche a révélé le rôle synergique de ces deux types de neurones dans la rétroaction gustative et l’arrêt alimentaire. Les neurones AGRP sont responsables de l’inhibition de la motivation alimentaire, tandis que les neurones DMH-LEPR sont chargés d’intégrer les indices gustatifs. Ce mécanisme fournit des preuves concrètes pour comprendre comment les circuits neuronaux régulent la sensation de satiété pendant l’alimentation.

3. Modèle de régulation neuronale multidimensionnelle de la rétroaction gustative

L’étude montre que les neurones DMH-LEPR peuvent intégrer diverses informations gustatives et nutritionnelles provenant de la cavité buccale et du tractus gastro-intestinal pour évaluer globalement les aliments. Ce mécanisme de régulation offre une référence pour comprendre comment les animaux ajustent leur comportement alimentaire sous une rétroaction sensorielle multiple, et revêt une importance orientant la base neuronale des recherches futures sur le comportement alimentaire.

Six, Points forts et innovations de la recherche

1. Rôle de rétroaction négative du goût dans l’arrêt de l’alimentation

Cette étude a révélé le rôle clé des signaux gustatifs dans l’inhibition du processus alimentaire, remettant en question la perception traditionnelle du goût en tant que simple rétroaction positive, offrant de nouveaux cadres théoriques pour comprendre la régulation alimentaire.

2. Expérience de manipulation optogénétique en boucle fermée des neurones AGRP

À travers la manipulation optogénétique en boucle fermée, cette recherche a vérifié le rôle de régulation instantanée du goût dans le comportement alimentaire par l’inhibition dépendante des signaux gustatifs des neurones AGRP, prouvant l’effet de régulation du goût sur la sensation de satiété pendant le processus alimentaire.

3. Intégration multidimensionnelle du goût par les neurones DMH-LEPR

La découverte des neurones DMH-LEPR dans cette recherche montre que différents signaux gustatifs sont intégrés par divers sous-groupes neuronaux, offrant de nouvelles pistes de recherche pour la régulation conjointe des signaux gustatifs et nutritionnels.

Sept, Conclusions et perspectives

Cette recherche contribue de manière significative à la compréhension de la régulation du comportement alimentaire par les signaux gustatifs. Elle a non seulement révélé la fonction de rétroaction négative du goût dans l’arrêt de l’alimentation, mais a également clarifié le rôle clé des neurones AGRP et DMH-LEPR dans l’hypothalamus. Cette découverte aide à comprendre les multiples rôles du goût alimentaire dans la sensation de satiété et le contrôle de l’alimentation. À l’avenir, explorer plus avant les mécanismes en aval de ces circuits neuronaux, ainsi que l’interaction entre les signaux sensoriels et les signaux gustatifs dans la régulation du comportement alimentaire, fournira une base théorique pour résoudre des problèmes tels que l’obésité et les troubles alimentaires.