Augmentation des examens d'imagerie médicale aux urgences : association avec des expositions à court terme à la chaleur ambiante et à la pollution de l'air par particules
Association entre les expositions environnementales à court terme et l’utilisation des examens d’imagerie médicale aux urgences
Contexte académique
Le changement climatique et les expositions environnementales associées ont un impact négatif significatif sur la santé humaine, entraînant une augmentation de la demande de services de santé. Les expositions à la chaleur et à une mauvaise qualité de l’air sont étroitement liées à une augmentation des visites aux urgences et des hospitalisations. Avec la hausse continue des températures mondiales, la fréquence et l’intensité des vagues de chaleur devraient encore augmenter. Le changement climatique et ses causes profondes détériorent la qualité de l’air de deux manières : premièrement, la combustion de combustibles fossiles et d’autres activités humaines libèrent des polluants nocifs dans l’atmosphère, entraînant des émissions de gaz à effet de serre ; deuxièmement, les impacts du changement climatique, tels que l’augmentation des températures ambiantes et des feux de forêt plus fréquents, augmentent également la pollution de l’air, y compris les particules fines (PM2.5) et l’ozone au niveau du sol. Les PM2.5, des particules fines d’un diamètre inférieur ou égal à 2,5 micromètres, peuvent être inhalées en raison de leur petite taille, représentant une menace importante pour la santé humaine.
La radiologie occupe une place centrale dans le fonctionnement des systèmes de santé complexes. D’une part, la fourniture d’imagerie médicale génère des émissions importantes de gaz à effet de serre, nécessitant des mesures d’atténuation pour améliorer la durabilité environnementale ; d’autre part, des stratégies d’adaptation sont nécessaires pour faire face aux impacts actuels et futurs du changement climatique. Cependant, les données sur la relation entre les expositions environnementales liées au climat et l’utilisation à court terme de l’imagerie manquent, entravant la planification des urgences dans les services de radiologie. Par conséquent, cette étude vise à déterminer l’association entre les expositions à court terme à la chaleur ambiante et à la pollution par les particules avec l’utilisation de l’imagerie médicale aux urgences.
Source de l’article
Cette étude a été réalisée par le Dr Kate Hanneman et son équipe du Département d’imagerie médicale de l’Université de Toronto, en collaboration avec des chercheurs de l’École de santé publique de Harvard et du Réseau universitaire de santé de Toronto, entre autres. L’article a été publié en novembre 2024 dans la revue Radiology, sous le titre Increased Emergency Department Medical Imaging: Association with Short-Term Exposures to Ambient Heat and Particulate Air Pollution.
Conception et méthodes de l’étude
Conception de l’étude
Cette étude a utilisé un design croisé rétrospectif stratifié dans le temps, analysant les données quotidiennes d’utilisation de l’imagerie dans les services d’urgence de quatre hôpitaux universitaires du centre-ville de Toronto (Hôpital général de Toronto, Hôpital Western de Toronto, Hôpital Mount Sinai et Hôpital St. Michael) entre janvier 2013 et décembre 2022, et les a liées aux données environnementales locales quotidiennes, y compris les PM2.5 et la température ambiante. Le design croisé contrôle les facteurs de confusion individuels et régionaux connus et inconnus (comme l’âge, le sexe, la race et les facteurs de risque comportementaux). La méthode de stratification temporelle tient compte des tendances temporelles de l’exposition environnementale, permettant de contrôler simultanément les tendances à long terme sur plusieurs années, les facteurs de confusion variables dans le temps non mesurés et l’influence du jour de la semaine.
Sources des données
Les données quotidiennes d’utilisation de l’imagerie étaient basées sur les demandes et les exécutions d’examens d’imagerie directement enregistrées pour les patients des services d’urgence. Le nombre quotidien de visites aux urgences (volume de patients) a également été enregistré. Les données d’utilisation de l’imagerie ont été stratifiées par modalité (CT, radiographie, échographie et IRM) et par système d’organes (thorax, abdomen, neurologique et musculo-squelettique). Les données d’exposition environnementale comprenaient la température ambiante moyenne quotidienne et les concentrations de PM2.5, provenant de données historiques de mesures directes accessibles au public.
Analyse statistique
Des modèles de régression de Poisson conditionnels ont été utilisés pour évaluer l’association entre l’utilisation quotidienne de l’imagerie et les expositions environnementales, en contrôlant le jour de la semaine, le mois et l’année. Les résultats ont été exprimés en termes de risque relatif excédentaire et de risque absolu excédentaire, basés sur les ratios d’incidence (IRR) et leurs intervalles de confiance à 95 %. Les moyennes mobiles des PM2.5 et de la température quotidiennes ont également été calculées pour tenir compte des effets d’exposition retardés. Les données d’utilisation de l’imagerie ont été stratifiées par modalité et par système d’organes.
Résultats de l’étude
Utilisation de l’imagerie aux urgences
Entre 2013 et 2022, 1 666 420 examens d’imagerie ont été réalisés dans les quatre services d’urgence, avec une moyenne de 428 examens par jour. Parmi ceux-ci, 790 619 étaient des radiographies, 508 950 des scanners CT, 187 289 des échographies et 15 953 des IRM. Le nombre moyen de visites quotidiennes aux urgences était de 659. L’utilisation de l’imagerie et le nombre de visites aux urgences ont diminué en 2020, puis se sont progressivement rétablis.
Expositions environnementales
Entre 2013 et 2022, la température ambiante moyenne quotidienne était de 9,0 °C, et la concentration moyenne quotidienne de PM2.5 était de 7,9 μg/m³. Au cours de la période d’étude, il y a eu 602 jours d’exposition à la chaleur (température moyenne > 20 °C) et 552 jours d’exposition à la pollution de l’air (PM2.5 moyenne > 12 μg/m³).
Exposition à la chaleur et utilisation de l’imagerie
La température ambiante moyenne était significativement associée à l’utilisation de l’imagerie le jour de l’exposition (lag 0) et les 1 à 4 jours suivants (lag 1-4), avec l’effet le plus important le jour de l’exposition. Une augmentation de 10 °C de la moyenne mobile sur 2 jours de la température était associée à une augmentation globale de 5,1 % de l’utilisation de l’imagerie (IRR = 1,051). Les jours d’exposition à la chaleur (température moyenne > 20 °C) étaient associés à une augmentation de 2,0 % de l’utilisation de l’imagerie le même jour.
Exposition à la pollution de l’air et utilisation de l’imagerie
La concentration moyenne de PM2.5 était significativement associée à l’utilisation de l’imagerie le jour de l’exposition et les 1 à 5 jours suivants, avec l’effet le plus important le jour suivant l’exposition (lag 1). Une augmentation de 10 μg/m³ de la moyenne mobile sur 3 jours de la concentration de PM2.5 était associée à une augmentation globale de 4,0 % de l’utilisation de l’imagerie (IRR = 1,040). Les jours d’exposition à la pollution de l’air (PM2.5 moyenne > 12 μg/m³) étaient associés à une augmentation de 2,4 % de l’utilisation de l’imagerie le même jour.
Analyse stratifiée par modalité et système d’organes
Les expositions à la chaleur et à la pollution de l’air étaient significativement associées à une augmentation de l’utilisation des radiographies et des scanners CT, mais pas à celle des échographies ou des IRM. L’analyse stratifiée par système d’organes a montré que les expositions à la chaleur et à la pollution de l’air étaient significativement associées à une augmentation de l’utilisation de l’imagerie thoracique, neurologique et musculo-squelettique, tandis que l’exposition à la pollution de l’air était également associée à une augmentation de l’utilisation de l’imagerie abdominale.
Discussion et conclusion
Les expositions climatiques extrêmes sont étroitement liées à une augmentation de la demande de soins de santé, y compris les visites aux urgences. Cependant, les données sur la relation entre les expositions environnementales et l’utilisation de l’imagerie restent limitées. Cette étude, utilisant une analyse croisée stratifiée dans le temps, a révélé que les expositions à court terme à la chaleur et aux PM2.5 étaient significativement associées à une augmentation de l’utilisation de l’imagerie aux urgences, en particulier pour les radiographies et les scanners CT. Bien que les effets individuels quotidiens soient modestes, l’impact cumulatif est significatif. Ces résultats fournissent une base pour des recherches futures visant à explorer les impacts à long terme du changement climatique sur l’imagerie médicale et à élaborer des stratégies d’adaptation.
Points forts de l’étude
- Découverte importante : Les expositions à court terme à la chaleur et à la pollution par les particules sont significativement associées à une augmentation de l’utilisation des radiographies et des scanners CT aux urgences.
- Innovation méthodologique : L’utilisation d’un design croisé stratifié dans le temps a permis de contrôler efficacement les facteurs de confusion, fournissant des données fiables sur la relation entre les expositions environnementales et l’utilisation de l’imagerie.
- Valeur pratique : Les résultats de cette étude fournissent des bases pour les services de radiologie afin de faire face à une augmentation potentielle de la demande d’imagerie liée au climat, aidant à la planification des urgences.
Importance de l’étude
Cette étude est la première à explorer systématiquement la relation entre les expositions environnementales à court terme et l’utilisation de l’imagerie aux urgences, comblant une lacune dans ce domaine. Les résultats ont non seulement une valeur scientifique importante, mais fournissent également un soutien aux systèmes de santé pour la planification des urgences et l’élaboration de politiques environnementales. Avec l’aggravation du changement climatique et de la pollution de l’air, ces découvertes aideront les systèmes de santé à mieux relever les défis futurs.