Dynamiques neuronales contextuelles lors de la perception du temps dans le cortex prémoteur ventral des primates
Étude des dynamiques neuronales dans le cortex pré-moteur ventral lors de la perception du temps
Contexte académique
La perception du temps est l’un des problèmes centraux de la recherche en neurosciences, en particulier comment le cerveau encode les informations temporelles en fonction des demandes cognitives. Le temps peut être classé comme “long” ou “court”, ou être représenté précisément sous forme d’intervalles continus. Le cortex pré-moteur ventral (ventral premotor cortex, VPC) joue un rôle important dans le traitement des séquences complexes, comme le traitement du langage, mais son rôle spécifique dans l’estimation du temps n’a pas encore été pleinement exploré. Cette étude vise à examiner comment le VPC traite les informations temporelles chez les primates lors de la réalisation de tâches de comparaison d’intervalle de temps (time interval comparison task, TICT) et de catégorisation d’intervalle de temps (time interval categorization task, TCT).
Source de l’article
Cette étude a été menée par Héctor Díaz, Lucas Bayones, Manuel Álvarez et plusieurs autres chercheurs de l’Institut de physiologie cellulaire de l’Universidad Nacional Autónoma de México. L’article a été publié le 6 février 2025 dans les Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS) sous le titre « Contextual neural dynamics during time perception in the primate ventral premotor cortex ».
Méthodologie de l’étude
Conception expérimentale
L’étude se divise en deux tâches principales : la tâche de comparaison d’intervalle de temps (TICT) et la tâche de catégorisation d’intervalle de temps (TCT). Dans la TICT, les singes doivent comparer deux intervalles de temps successifs (int1 et int2), puis déterminer après un délai fixe lequel est le plus long. Dans la TCT, les singes doivent catégoriser un seul intervalle de temps en tant que “long” ou “court”. Pour chaque tâche, les chercheurs ont enregistré l’activité des neurones du VPC.
Sujets et méthodes
Deux singes ont été utilisés comme sujets d’expérimentation pour effectuer les tâches TICT et TCT. Pendant l’expérience, une sonde mécanique stimule la peau du bout des doigts du singe, qui réagit en appuyant sur un bouton. L’enregistrement de l’activité neuronale a été réalisé à l’aide d’électrodes placées dans le VPC, dont la position a été localisée avec précision par imagerie par résonance magnétique (IRM).
Analyse des données
Les chercheurs ont utilisé l’analyse en composantes principales (PCA) et l’information mutuelle (mutual information) pour analyser l’activité des populations neuronales. Plus particulièrement, ils ont développé une méthode d’analyse basée sur la similarité cosinus pour quantifier la similarité des états de population neuronale à différents points dans le temps.
Résultats principaux
Activité neuronale dans la TICT
Dans la TICT, l’activité des neurones du VPC montre une grande hétérogénéité. La plupart des neurones sont actifs pendant la présentation des intervalles de temps, tandis qu’une petite partie retient ces informations pendant la période de mémoire de travail. L’activité de la population neuronale dans la TICT présente une relation linéaire avec la durée des intervalles de temps. Pendant la période de retard, ce codage paramétrique est conservé.
Activité neuronale dans la TCT
Dans la TCT, l’activité des neurones montre des caractéristiques de classification. Les neurones affichent des modèles dynamiques différents selon la catégorie de l’intervalle de temps (long ou court). Pendant la période de retard, l’activité de la population neuronale se divise clairement en deux catégories, correspondant respectivement aux intervalles de temps “longs” et “courts”.
Analyse des dynamiques de groupe
Grâce à l’analyse PCA, les chercheurs ont constaté que le VPC présente des dynamiques de groupe différentes dans la TICT et la TCT. Dans la TICT, l’activité de groupe présente une relation linéaire paramétrique, tandis que dans la TCT, l’activité de groupe se sépare significativement en fonction de la catégorie de l’intervalle de temps. Ce changement dynamique indique que le VPC peut coder les informations temporelles de manière flexible en fonction des besoins de la tâche.
Conclusion
Cette étude montre que le VPC joue un rôle clé dans le codage et le maintien des intervalles de temps. Les neurones de la population codent les informations temporelles de manière paramétrique dans la TICT, tandis que dans la TCT, ils se divisent en fonction de la catégorie de l’intervalle de temps. Cette capacité d’adaptation dynamique souligne l’importance du VPC dans le traitement des informations temporelles, révélant comment le cerveau ajuste ses mécanismes de perception du temps en fonction des demandes cognitives.
Points forts de l’étude
- Codage temporel en fonction de la tâche : L’étude a montré que le VPC peut ajuster de manière flexible son mode de codage temporel en fonction des exigences de la tâche (comparaison ou classification).
- Analyse des dynamiques de groupe : Grâce à l’analyse PCA et à la similarité cosinus, les chercheurs ont révélé les mécanismes évolutifs des dynamiques neuronales lors de la perception du temps.
- Maintien paramétrique en mémoire de travail : Dans la TICT, le VPC peut maintenir en mémoire de travail une codification paramétrique des informations temporelles, offrant une nouvelle perspective sur le traitement du temps en mémoire de travail.
- Séparation dynamique de la classification : Dans la TCT, le VPC peut clairement séparer les intervalles de temps en “longs” et “courts” et maintenir cette information tout au long de la période de retard.
Valeur et signification
Cette étude élargit notre compréhension des fonctions du VPC et révèle les mécanismes neuronaux par lesquels le cerveau traite les informations temporelles dans différentes tâches cognitives. En particulier, les résultats montrent que le VPC ne se contente pas de coder la perception du temps, mais peut également maintenir ces informations en mémoire de travail, fournissant des indices importants sur la relation entre la perception du temps et le contrôle cognitif. De plus, les innovations méthodologiques de cette étude, telles que l’analyse des dynamiques de groupe basée sur la PCA, offrent de nouveaux outils pour l’étude future des mécanismes neuronaux dans des tâches cognitives complexes.
Cette étude apporte de nouvelles perspectives sur les bases neuronales de la perception du temps et jette les bases pour explorer les mécanismes neuronaux d’autres fonctions cognitives, telles que la prise de décision et la mémoire.