La propagation de l'α-synucléine pathologique du rein au cerveau peut contribuer à la maladie de Parkinson
Le lien pathologique entre les maladies rénales et la maladie de Parkinson
Contexte académique
La maladie de Parkinson (Parkinson’s disease, PD) est une maladie neurodégénérative courante dont la principale caractéristique pathologique est l’agrégation anormale de la protéine α-synucléine (α-synuclein, α-syn) dans le cerveau, formant des corps de Lewy (Lewy bodies, LBs) et des neurites de Lewy (Lewy neurites, LNs). Ces dernières années, de plus en plus d’études ont montré que l’agrégation pathologique de l’α-syn peut débuter dans les organes périphériques et se propager au système nerveux central (SNC) de manière similaire aux prions. Bien que des études aient déjà démontré que l’incidence de la maladie de Parkinson est significativement accrue chez les patients atteints d’insuffisance rénale chronique (chronic renal failure, CKD), les mécanismes spécifiques reliant ces deux affections restent flous. Par conséquent, cette étude vise à explorer le rôle des reins dans la propagation de la pathologie de l’α-syn et à révéler le lien potentiel entre les maladies rénales et la maladie de Parkinson.
Origine de l’article
Cet article a été réalisé par Xin Yuan, Shuke Nie, Yingxu Yang et al., issus de l’Hôpital Renmin de l’Université de Wuhan, du Collège de Médecine Tongji de l’Université des Sciences et Technologies de Huazhong et d’autres institutions. Il a été publié en 2024 dans la revue Nature Neuroscience. L’équipe de recherche a systématiquement exploré le rôle clé des reins dans la propagation de la pathologie de l’α-syn grâce à des analyses d’échantillons cliniques, des expériences animales et des approches de biologie moléculaire.
Processus de recherche et résultats
1. Analyse des échantillons cliniques
L’équipe de recherche a tout d’abord procédé à une analyse immunohistochimique des échantillons rénaux de 11 patients atteints de la maladie de Parkinson ou de démence à corps de Lewy (dementia with Lewy bodies, DLB). Ils ont découvert que 10 de ces patients présentaient des dépôts de α-syn phosphorylée (pα-syn) dans leurs reins, notamment dans les fibres nerveuses autour des petits vaisseaux sanguins. De plus, l’étude a été étendue à 20 patients atteints de maladies rénales chroniques, révélant que 17 d’entre eux présentaient également des dépôts pathologiques d’α-syn dans leurs reins, bien qu’ils n’aient pas d’antécédents de maladie de Parkinson. Ce résultat indique que les dépôts pathologiques d’α-syn pourraient être répandus dans les reins des patients atteints de maladies rénales et pourraient servir de marqueur précoce de la pathologie de la maladie de Parkinson.
2. Construction de modèles animaux et expériences
Pour vérifier davantage le rôle des reins dans la propagation de la pathologie de l’α-syn, l’équipe de recherche a construit plusieurs modèles murins. Premièrement, ils ont injecté des monomères d’α-syn ou des fibrilles préformées d’α-syn (preformed fibrils, PFFs) par voie intraveineuse pour observer la distribution de l’α-syn dans les reins et le cerveau. Les résultats montrent que l’α-syn est rapidement éliminé dans les reins des souris saines, mais que cette capacité de nettoyage est significativement réduite chez les souris souffrant d’insuffisance rénale, entraînant une accumulation accrue dans les reins et une propagation ultérieure vers le cerveau.
3. Injection intrarénale de fibres d’α-syn
L’équipe de recherche a également observé directement la propagation de la pathologie de l’α-syn des reins vers le cerveau par injection intrarénale de PFFs d’α-syn. Les résultats montrent qu’après trois mois, la pathologie de l’α-syn augmente de manière significative dans les reins, la moelle épinière et plusieurs régions cérébrales (y compris le mésencéphale, l’amygdale, l’hippocampe et le striatum). Notamment, en bloquant les connexions neuronales entre les reins et le cerveau par dénervation rénale (renal denervation), on peut réduire considérablement la propagation de la pathologie de l’α-syn dans le cerveau. Ce résultat montre que les reins propagent la pathologie de l’α-syn vers le cerveau via des voies neuronales.
4. Rôle de l’α-syn des globules rouges
L’étude a également révélé que les globules rouges sont la principale source d’α-syn dans le sang, et que la concentration d’α-syn dans les globules rouges est beaucoup plus élevée que dans le liquide céphalorachidien. Grâce à des expériences de greffe de moelle osseuse, l’équipe de recherche a découvert que la transplantation de moelle osseuse de souris déficientes en α-syn (snca−/−) dans des souris transgéniques exprimant l’α-syn A53T pouvait réduire de manière significative la déposition de la pathologie de l’α-syn dans le système nerveux central. Ce résultat montre que l’α-syn provenant des globules rouges joue un rôle important dans la progression de la pathologie de la maladie de Parkinson.
Conclusion et signification
Cette étude révèle pour la première fois que les reins agissent comme point de départ de la propagation de la pathologie de l’α-syn et propagent les protéines pathologiques vers le cerveau via des voies neuronales, conduisant à l’apparition de la maladie de Parkinson. Cette découverte non seulement offre une nouvelle perspective pour comprendre les mécanismes pathologiques de la maladie de Parkinson, mais fournit également une base théorique pour le développement de stratégies thérapeutiques ciblant l’α-syn périphérique. En bloquant la déposition de l’α-syn dans les reins ou en éliminant l’α-syn du sang, il pourrait être possible de fournir de nouvelles pistes pour la prévention et le traitement de la maladie de Parkinson.
Points forts de l’étude
- Les reins comme point de départ de la propagation de la pathologie de l’α-syn : Cette étude révèle pour la première fois le rôle clé des reins dans la propagation de la pathologie de l’α-syn, mettant en lumière le lien potentiel entre les maladies rénales et la maladie de Parkinson.
- Propagation pathologique médiée par des voies neuronales : Grâce à des expériences de dénervation rénale, l’équipe de recherche a confirmé que les reins propagent la pathologie de l’α-syn vers le cerveau via des voies neuronales.
- Rôle clé de l’α-syn des globules rouges : L’étude montre que les globules rouges sont la principale source d’α-syn dans le sang et valide, via des expériences de greffe de moelle osseuse, l’importance de l’α-syn provenant des globules rouges dans la progression de la pathologie de la maladie de Parkinson.
Autres informations précieuses
Cette étude a également développé diverses méthodes expérimentales innovantes, telles que l’injection intrarénale de PFFs d’α-syn et la technique de dénervation rénale, fournissant des outils importants pour les recherches futures. De plus, l’équipe de recherche a analysé de manière complète la déposition pathologique de l’α-syn grâce à diverses techniques de biologie moléculaire (comme l’immunohistochimie, le Western blot, ELISA, etc.), offrant des données riches pour comprendre les mécanismes pathologiques de l’α-syn.
Cette étude ne révèle pas seulement le rôle clé des reins dans la propagation de la pathologie de la maladie de Parkinson, mais ouvre également de nouvelles perspectives pour le développement de stratégies thérapeutiques ciblant l’α-syn périphérique, présentant ainsi une valeur scientifique et applicative importante.