Prédiction précoce de l'épilepsie résistante aux médicaments à l'aide de caractéristiques cliniques et EEG basées sur un réseau neuronal convolutif

Contexte de l’étude et objectifs de la recherche

L’épilepsie est une maladie neurologique spontanée et grave, caractérisée par des crises répétées, affectant environ 50 millions de personnes dans le monde [1]. Bien que les progrès des médicaments antiépileptiques (ASM) aient été réalisés ces dernières années, l’épilepsie pharmacorésistante (Drug-Resistant Epilepsy, DRE) touche encore 20 à 30 % des patients épileptiques [1-3]. Les patients atteints de DRE sont confrontés à une lourde charge économique, sociale et psychologique, et il faut souvent de longues périodes d’essais médicamenteux pour établir un diagnostic. L’identification précoce des patients à haut risque permettrait d’intervenir plus tôt avec des traitements tels que la chirurgie de l’épilepsie, la neuromodulation ou le régime cétogène.

Les recherches précédentes ont indiqué que les facteurs de risque de DRE incluent : un début précoce de la maladie, une fréquence élevée des crises, des anomalies de l’électroencéphalogramme (EEG), des déficits neurologiques, des troubles cognitifs, des antécédents traumatiques et des lésions structurelles intracrâniennes [5-9]. Cependant, l’importance de ces facteurs chez les nouveaux patients diagnostiqués avec épilepsie n’est pas encore claire, ce qui nécessite des outils combinés pour identifier précocement les patients à haut risque.

L’EEG joue un rôle crucial dans le domaine de l’épilepsie, notamment dans le diagnostic, le traitement, le pronostic et la gestion à long terme [12-14]. Certaines études ont tenté d’utiliser les caractéristiques EEG pour prédire les résultats du traitement ASM, mais elles se sont principalement concentrées sur les caractéristiques EEG visibles, telles que les décharges épileptiformes et le spectre de puissance en bande δ. Cependant, certains paramètres EEG invisibles, tels que la puissance, la fréquence, la cohérence et la connectivité fonctionnelle, pourraient également être liés au pronostic. Avec les avancées en apprentissage profond, il est possible d’extraire davantage de paramètres EEG approfondis pour aider à prédire les résultats des traitements.

L’apprentissage automatique est une méthode capable de résumer automatiquement des règles à partir de données et de construire des modèles prédictifs, largement appliquée dans le domaine médical ces dernières années [15]. L’apprentissage profond, une branche importante de l’apprentissage automatique, permet d’extraire automatiquement diverses caractéristiques, de traiter des données à grande échelle et d’obtenir des résultats précis en classification [16-17]. Les réseaux de neurones convolutifs (Convolutional Neural Network, CNN) sont l’une des méthodes couramment utilisées en apprentissage profond et ont été largement appliqués dans la détection automatique des crises épileptiques et les études des décharges épileptiformes [16,18-19]. Actuellement, les méthodes traditionnelles d’apprentissage automatique avec extraction des caractéristiques pour prédire DRE n’ont pas des résultats satisfaisants, donc nous avons d’abord exploré l’extraction manuelle des caractéristiques et développé un modèle pour prédire DRE.

Source de l’article de recherche et informations sur les auteurs

Cet article de recherche a été co-rédigé par Yang Shijun, Li Shanshan, Wang Hanlin, Li Jinlan, Wang Congping et Liu Qunhui, provenant respectivement du service de neurologie et du service d’échographie médicale de l’hôpital central de la préfecture autonome Tujia et Miao d’Enshi, et de l’école de médecine de l’Université Jiaotong de Xi’an. L’article a été publié dans « Seizure: European Journal of Epilepsy » numéro 114 de 2024, avec une publication en ligne le 16 décembre 2023.

Méthodes de recherche et processus expérimental

Sujets de l’étude et critères d’exclusion

Le présent travail est une étude rétrospective, menée sur des patients nouvellement diagnostiqués d’épilepsie dans le service de neurologie de l’hôpital central d’Enshi entre janvier 2016 et juin 2022, totalisant 101 patients. Tous les participants devaient répondre aux critères d’inclusion suivants : patients adultes nouvellement diagnostiqués d’épilepsie, dossier médical complet, EEG et IRM effectués avant le traitement ASM et suivi régulier. Les critères d’exclusion incluent : présence de syndromes épileptiques, maladies neurologiques antérieures, femmes enceintes, prise de médicaments affectant le système nerveux avant l’EEG, dossiers médicaux incomplets et mauvaise observance des patients.

Traitement et prétraitement des données

Les données EEG utilisées dans cette étude sont celles enregistrées dans les 24 heures précédant le traitement ASM, avec une fréquence d’échantillonnage de 256 Hz. Chaque patient a 10 segments de signal EEG de 90 secondes, pour un total de 1010 segments. Le prétraitement des données comprend plusieurs méthodes pour éliminer les artefacts, incluant l’élimination des électrodes inutiles, le filtrage, le re-référencement, le segmentation et la correction de la ligne de base, l’exclusion des segments de mauvaise qualité, l’analyse en composantes indépendantes et la suppression du bruit. Finalement, les données brutes sont converties en fichiers .xls unimodaux via la fonction pandas.

Développement du modèle de réseau neuronal convolutif

Les CNN sont une méthode courante de traitement des signaux et des images, utilisée ici pour extraire automatiquement les caractéristiques des signaux EEG bruts et simplifier les caractéristiques avancées. La structure CNN comprend des couches de convolution, de mise à plat et entièrement connectées. Les couches de convolution extraient automatiquement les caractéristiques EEG via des opérations de convolution ; la couche de mise à plat convertit les données EEG pour améliorer la vitesse de calcul et la robustesse des caractéristiques ; les couches entièrement connectées acquièrent les caractéristiques extraites par le réseau de neurones. La fonction d’activation utilisée est Rectified Linear Unit (ReLU) et la fonction de sortie est Softmax.

Évaluation du système et analyse statistique

Pour évaluer la performance du modèle, divers indicateurs d’évaluation ont été utilisés, notamment la précision (accuracy), la spécificité (specificity), la précision (precision), la sensibilité (sensitivity), le score F1 (F1-score), le coefficient Kappa, l’erreur quadratique moyenne (MSE) et la surface sous la courbe (AUC). Les formules de calcul de chaque indicateur sont les suivantes :

Précision (accuracy) = (TP + TN) / (TP + FN + FP + TN)
Spécificité (specificity) = 1 - (FP / (FP + TN))
Précision (precision) = TP / (TP + FP)
Rappel (recall) = TP / (TP + FN)
Score F1 (F1-score) = 2 * (precision * recall) / (precision + recall)
Coefficient Kappa = (observed accuracy - expected accuracy) / (1 - expected accuracy)
Erreur quadratique moyenne (MSE) = (1/N) * Σ(observedi - predictedi)
Surface sous la courbe (AUC) = Σ(rankinsi ∈ positive class) / (m * (m + 1)) - m / n

Nous avons développé un modèle EEG et un modèle clinique-EEG en utilisant ces indicateurs, chaque modèle ayant une architecture à 7 couches, incluant 2 couches de convolution, 1 couche de mise à plat et 4 couches entièrement connectées. Les deux modèles ont été entraînés pendant 30 itérations sur l’ensemble d’apprentissage, les résultats finaux étant obtenus par test et validation.

Résultats de l’étude

Sur les 101 patients inclus dans notre étude (dont 78 étaient épileptiques sensibles aux médicaments et 23 DRE), la combinaison des caractéristiques cliniques et EEG pour prédire la DRE chez les nouveaux patients épileptiques a obtenu des résultats prometteurs. Dans le modèle EEG appliqué à l’ensemble de test, la précision, la spécificité, la précision, la sensibilité, le score F1, le coefficient Kappa, le MSE optimal et l’AUC étaient respectivement de 0.99, 0.59, 0.82, 0.90, 0.86, 0.72, 181.76 et 0.76 ; dans l’ensemble de validation, la précision était de 0.81. Pour le modèle clinique-EEG, ces indicateurs dans l’ensemble de test étaient de 0.99, 0.72, 0.82, 0.96, 0.89, 0.83, 32.00 et 0.81 ; dans l’ensemble de validation, la précision était de 0.84.

Signification de la recherche et valeur d’application

Cette étude a développé et validé des modèles EEG et clinique-EEG pour prédire la DRE chez les nouveaux patients épileptiques, offrant un nouvel outil pour l’identification précoce des patients à haut risque de DRE. Ces modèles, combinant des données cliniques et EEG, augmentent non seulement la précision des prédictions, mais aident aussi les cliniciens à prendre des décisions thérapeutiques plus ciblées dès le début, évitant ainsi des essais médicamenteux infructueux répétés.

Points forts et innovations de l’étude

  1. Modèle prédictif haute performance : Les modèles montrent des performances exceptionnelles, notamment le modèle clinique-EEG, avec des indicateurs tels que la précision, la spécificité et la précision.
  2. Potentiel clinique considérable : Le modèle, utilisant la combinaison des caractéristiques cliniques et EEG, est très pratique et d’une grande valeur clinique.
  3. Intervention précoce pour les nouveaux patients épileptiques : L’identification précoce des patients à haut risque permet de mettre en œuvre des traitements alternatifs plus tôt, améliorant ainsi la qualité de vie des patients.

Conclusion de l’étude

Cette étude a développé et validé un modèle EEG et clinique-EEG efficace pour prédire la DRE chez les nouveaux patients épileptiques. Cette recherche élargit non seulement l’application des algorithmes d’apprentissage profond dans la prédiction de l’épilepsie, mais elle offre également un outil fiable pour la pratique clinique, aidant à identifier tôt les patients à haut risque et permettant des traitements plus précis et personnalisés.