Les paramètres standards du LCR comme prédicteurs de l'évolution de la sclérose en plaques : une étude de cohorte MSBase
Rapport de Recherche : Rôle Prédictif des Paramètres de Routine du Liquide Céphalo-rachidien dans la Progression de la Sclérose en Plaques
Introduction
La sclérose en plaques (SEP) est une maladie caractérisée par une évolution hautement variable et imprévisible. Lors du diagnostic de la SEP, l’analyse du liquide céphalo-rachidien (LCR) est souvent l’un des protocoles standards. Cependant, il existe un débat académique sur la capacité des paramètres du LCR à prédire la progression de la maladie. Avec le développement et la généralisation des thérapies modifiant la maladie (DMTs), notamment en termes d’efficacité et de sécurité, la recherche de biomarqueurs fiables pour identifier les patients à haut risque est devenue particulièrement importante.
Bien que la valeur diagnostique de l’analyse de routine du LCR dans la SEP soit incontestable, son rôle pronostique reste encore incertain. La présence de bandes oligoclonales (BOC) dans le LCR est liée à la conversion du syndrome cliniquement isolé en SEP cliniquement confirmée. Toutefois, la capacité des paramètres du LCR à prédire l’activité de la maladie et l’accumulation de l’incapacité doit encore être déterminée.
Source de l’Article
Cet article a été rédigé par Cathérine Dekeyser et al., les auteurs étant issus de divers instituts de recherche en neurologie de renommée internationale, y compris le service de neurologie de l’hôpital universitaire de Gand en Belgique et l’hôpital Sint-Jan à Bruges. L’étude a été publiée dans le Journal of Neurology, Neurosurgery & Psychiatry
et a été acceptée le 22 mars 2024. L’article est inclus dans la base de données MSBase, une plateforme de registre international MS contenant les données de plus de 97 000 patients.
Processus de Recherche
Cette étude est une vaste étude de cohorte visant à explorer les liens entre les marqueurs de routine du LCR et la progression future de la SEP. Les données de l’étude proviennent de la base MSBase.
Sujets de l’Étude
Au total, 11 245 patients atteints de SEP ont été inclus dans l’étude, dont 93,7% (10 533 personnes) souffraient de SEP récurrente-rémittente (RRMS) et les autres de SEP primaire progressive (PPMS). Tous les patients remplissaient les critères suivants : âge ≥ 18 ans, diagnostic de RRMS ou de PPMS selon les critères de McDonald, et analyse du LCR effectuée un an avant ou après le diagnostic. Les données minimales requises incluaient la date du diagnostic, la date de naissance, la date de début de la maladie, le sexe, l’évolution de la SEP, au moins trois scores de l’Échelle Élargie de l’État d’Invalidité (EDSS) après le diagnostic, et au moins une mesure du LCR d’intérêt (statut OCB et/ou indice IgG et/ou nombre de cellules blanches).
Processus et Méthodes
Les données ont été extraites le 2 novembre 2022, et tous les participants ont fourni leur consentement éclairé conformément aux lois locales. Les principaux résultats étudiés étaient le temps jusqu’à l’atteinte des scores EDSS 4, 6 et 7. Les résultats secondaires comprenaient le taux annuel de rechute au cours des deux premières années suivant le diagnostic (ARR2) et les différences de composition du LCR entre RRMS et PPMS.
L’étude a utilisé l’analyse de régression de Cox et la régression linéaire multivariée pour évaluer les relations entre les paramètres du LCR et les résultats mentionnés. Toutes les analyses ont été effectuées à l’aide du logiciel statistique IBM SPSS.
Collecte et Analyse des Données
Les résultats temporels ont été analysés à l’aide du modèle des risques proportionnels de Cox, et l’ARR2 a été évalué à l’aide de la régression linéaire multivariée (modèle linéaire généralisé). Chez les patients RRMS, la présence de BOCs était significativement associée à une progression plus rapide vers les étapes d’handicap (EDSS 4, EDSS 6, EDSS 7). L’analyse multivariée a montré que les patients OCB-positifs présentaient un risque accru respectivement de 27,2%, 31,4% et 68,6% d’atteindre les scores EDSS 4, 6 et 7. En outre, un nombre élevé de cellules dans le LCR (≥ 5 /μl) était associé à un temps plus long pour atteindre une incapacité modérée (EDSS 4). En revanche, chez les patients PPMS, les paramètres du LCR n’étaient pas significativement liés au temps nécessaire pour atteindre les scores d’handicap.
Résultats de l’Étude
Principaux Résultats
- Chez les patients RRMS, la présence de BOC était significativement liée à une progression rapide vers les scores d’handicap (EDSS 4, 6, 7), tandis qu’un nombre élevé de cellules dans le LCR pouvait être un facteur protecteur.
- Chez les patients RRMS, un nombre élevé de cellules dans le LCR (≥ 5 /μl) était significativement associé à une activité inflammatoire à court terme au cours des deux premières années.
Résultats Secondaires
- Chez les patients PPMS, les paramètres du LCR n’étaient pas significativement associés à l’accumulation de l’incapacité.
- Les différences de composition du LCR entre RRMS et PPMS se manifestaient par une proportion plus élevée de patients OCB-positifs dans le groupe PPMS (88,8% vs 84,4%).
- L’âge avait un impact sur le nombre de cellules blanches dans le LCR, la proportion de cellules élevées diminuant avec l’âge.
Importance de l’Étude
Cette étude a révélé que l’analyse de routine du LCR fournit des informations pronostiques en plus de sa valeur diagnostique, en particulier pour les patients RRMS. L’analyse du LCR peut fournir des informations pronostiques utiles dès le début, facilitant ainsi la consultation des patients, la prise de décisions cliniques et l’orientation des traitements.
Conclusion et Perspectives
Cette étude a démontré l’effet défavorable des BOC dans le LCR sur le pronostic des RRMS, tandis qu’un nombre élevé de cellules dans le LCR pouvait représenter un facteur protecteur. Bien que ces résultats n’aient pas été confirmés chez les PPMS, ils offrent néanmoins des informations précieuses pour la gestion clinique de la SEP. Les recherches futures devraient explorer davantage l’impact de l’application précoce de thérapies efficaces sur les paramètres du LCR et la progression de la maladie, et continuer à rechercher des biomarqueurs plus sensibles et quantitatifs pour optimiser le diagnostic et le pronostic de la SEP.
Points Forts de l’Étude
- L’échantillon de grande taille et le suivi à long terme renforcent la validité des conclusions.
- Confirmation de l’association significative entre les BOC dans le LCR et l’accélération de l’incapacité chez les patients RRMS.
- Élucidation de l’impact du nombre de cellules blanches du LCR sur l’activité inflammatoire à court terme.
- Fourniture de bases solides pour le pronostic précoce, aidant à la prise de décisions dans la pratique clinique.
La recherche a démontré la double valeur de l’analyse de routine du LCR dans le diagnostic et le pronostic de la SEP, en particulier pour les patients RRMS. Il est essentiel de poursuivre les études sur l’application des paramètres du LCR dans les stratégies de traitement efficaces pour optimiser les résultats thérapeutiques des patients atteints de SEP.