Induction simple ou double avec 7+3 contenant une dose standard ou élevée de daunorubicine pour les AML nouvellement diagnostiquées : l'essai randomisé DAUNODouble par l'Alliance d'étude sur la leucémie

Contexte académique

La leucémie myéloïde aiguë (LMA) est une maladie sanguine maligne dont le traitement repose sur la chimiothérapie d’induction, généralement une combinaison de cytarabine et d’anthracyclines (comme la daunorubicine). Bien que ce schéma thérapeutique soit utilisé depuis les années 1980, des questions fondamentales subsistent concernant la dose optimale de daunorubicine et l’efficacité d’une induction simple versus double. La dose originale de daunorubicine était de 45 mg/m², mais des études ultérieures ont montré qu’une dose de 90 mg/m² améliorait significativement les taux de réponse et de survie. Cependant, une dose de 60 mg/m² a été largement utilisée pendant des décennies, ce qui a conduit à la question de savoir si 60 mg/m² était aussi efficace que 90 mg/m². De plus, pour les patients ayant une bonne réponse après la première induction, la nécessité d’une deuxième induction reste un sujet de débat.

Source de l’article

Cet article, rédigé par Christoph Röllig et plusieurs autres chercheurs d’Allemagne, de République tchèque et d’autres pays, a été publié le 16 septembre 2024 dans le Journal of Clinical Oncology. L’étude a été menée par le Study Alliance Leukemia et visait à comparer, via un essai randomisé contrôlé, l’efficacité de la daunorubicine à 60 mg/m² versus 90 mg/m² dans l’induction initiale, ainsi qu’à évaluer les avantages d’une induction simple versus double.

Déroulement de l’étude

Sélection et répartition des patients

L’étude a inclus 864 patients âgés de 18 à 65 ans nouvellement diagnostiqués avec une LMA, à l’exclusion de la leucémie promyélocytaire aiguë. Les patients ont été randomisés pour recevoir soit 60 mg/m², soit 90 mg/m² de daunorubicine, en combinaison avec la cytarabine. Le jour 15 après la première induction, la réponse a été évaluée par cytologie ou histologie de la moelle osseuse. Les patients avec moins de 5 % de blastes médullaires ont été définis comme “bons répondeurs précoces” et ont été inclus dans la deuxième partie de l’étude, où ils ont été randomisés pour recevoir ou non une deuxième induction.

Protocole de traitement

L’étude était divisée en deux parties. Dans la première partie, les patients ont été randomisés pour recevoir 60 mg/m² ou 90 mg/m² de daunorubicine. Dans la deuxième partie, les bons répondeurs précoces ont été randomisés pour recevoir une deuxième induction ou non. La dose de daunorubicine pour la deuxième induction a été ajustée en fonction de la dose initiale pour ne pas dépasser le seuil de toxicité cumulative.

Analyse des données

Le critère principal de l’étude était la proportion de patients avec moins de 5 % de blastes médullaires au jour 15 après la première induction, ainsi que le taux de rémission complète (RC) à la fin de l’induction. Les analyses statistiques ont été réalisées avec le logiciel R, et l’analyse principale a été basée sur le principe de l’intention de traiter (ITT).

Résultats principaux

Comparaison des doses de daunorubicine

Dans la première randomisation, les proportions de bons répondeurs précoces étaient de 44 % pour 60 mg/m² et de 48 % pour 90 mg/m², sans différence significative (p=0,983). Les taux de rémission complète composite (RCc) à la fin de l’induction étaient de 90 % et 89 %, respectivement, et les taux de survie sans rechute à 3 ans (RFS) étaient de 54 % et 50 %. Les taux de survie globale à 3 ans (OS) étaient de 65 % et 58 %, sans différence significative.

Comparaison de l’induction simple versus double

Parmi les 389 bons répondeurs précoces, les taux de RCc étaient de 87 % pour l’induction simple et de 85 % pour l’induction double. Les taux de RFS à 3 ans étaient de 51 % et 60 %, et les taux d’OS à 3 ans étaient de 76 % et 75 %, sans différence significative.

Conclusion

L’étude montre que dans le cadre de l’induction classique 7+3, l’utilisation de 90 mg/m² de daunorubicine une fois par jour n’améliore pas significativement la réponse précoce, les taux de rémission ou la survie par rapport à 60 mg/m². Pour les patients ayant une bonne réponse après la première induction, une deuxième induction n’a qu’un impact limité sur la survie sans rechute et n’apporte pas de bénéfice en termes de survie globale.

Points forts de l’étude

  1. Clarté dans le choix de la dose : L’étude confirme que 60 mg/m² de daunorubicine une fois par jour est aussi efficace que 90 mg/m², avec un profil de sécurité similaire.
  2. Nécessité de la deuxième induction : Pour les patients ayant une bonne réponse après la première induction, une deuxième induction n’améliore pas significativement la survie à long terme, ce qui suggère qu’elle peut être omise pour réduire les effets indésirables.
  3. Essai randomisé contrôlé à grande échelle : Cette étude, grâce à son design robuste, fournit des preuves solides pour guider le traitement d’induction de la LMA.

Importance de l’étude

Cette étude fournit des directives cliniques importantes pour le traitement d’induction de la LMA, soutenant l’utilisation de 60 mg/m² de daunorubicine comme dose standard et suggérant que pour les patients ayant une bonne réponse après la première induction, une deuxième induction peut être omise pour réduire les effets indésirables. Ces résultats ont une valeur scientifique significative et offrent des références applicables en pratique clinique.

Autres informations utiles

L’étude mentionne également que les recherches futures devraient se concentrer sur l’intensification ou la réduction du traitement basée sur la maladie résiduelle minimale (MRD), afin de personnaliser le traitement en fonction de la biologie individuelle de la maladie. De plus, avec l’approbation de nouveaux agents ciblés, les schémas thérapeutiques pourraient être encore optimisés.