Les ganglions de la racine dorsale humaine sont soit préservés soit complètement perdus après désafférentation par lésion du plexus brachial
Source de l’article
Cet article a été publié dans le British Journal of Anaesthesia (Volume 133, Numéro 6, pages 1250-1262, 2024) sous le titre Human dorsal root ganglia are either preserved or completely lost after deafferentation by brachial plexus injury. Il a été rédigé par une équipe multidisciplinaire de l’hôpital universitaire de Würzburg, en Allemagne, dirigée par Annemarie Sodmann et Johannes Degenbeck. L’article est disponible en accès libre sous la licence CC BY-NC-ND 4.0.
Contexte et objectifs
Les lésions du plexus brachial, souvent causées par des accidents de la route, entraînent une paralysie flasque, une perte sensorielle et des douleurs neuropathiques intenses. Bien que la médecine régénérative offre des perspectives prometteuses pour ces patients, les changements cellulaires et moléculaires dans les ganglions de la racine dorsale (DRG) après une déafférentation accidentelle restent mal compris. Cette étude vise à caractériser les phénotypes des DRG chez des patients atteints de lésions du plexus brachial et à explorer les mécanismes sous-jacents à la douleur neuropathique persistante.
Méthodologie
Recrutement des patients
L’étude a été approuvée par le comité d’éthique local et enregistrée dans le registre des essais cliniques allemands (DRKS00017266). Elle a inclus 13 patients des deux sexes, principalement des hommes, ayant subi une lésion du plexus brachial, souvent suite à un accident de moto. Les DRG témoins ont été prélevés lors d’autopsies médico-légales.
Évaluation clinique et imagerie
Les patients ont été évalués cliniquement avant la chirurgie, avec des questionnaires sur la douleur, l’anxiété et la dépression. Une neurographie par IRM a été réalisée pour visualiser l’étendue des lésions.
Préparation des tissus et analyse
Les DRG avulsés ont été collectés lors de la chirurgie de reconstruction nerveuse. Les échantillons ont été fixés, sectionnés et analysés par immunohistochimie et séquençage d’ARN. Des techniques de microscopie à haute résolution et d’analyse d’images basées sur l’apprentissage profond ont été utilisées pour quantifier la composition cellulaire.
Analyse transcriptomique
Le séquençage de l’ARN a permis d’identifier les gènes différentiellement exprimés dans les DRG des patients par rapport aux témoins. Les données ont été analysées pour identifier les voies biologiques affectées.
Résultats
Préservation ou perte neuronale dans les DRG
Les patients se sont divisés en deux groupes : ceux avec une préservation neuronale (6 patients) et ceux avec une perte neuronale (7 patients). Dans le groupe de perte neuronale, les DRG étaient remplacés par du tissu conjonctif, tandis que dans le groupe de préservation, les unités neuronales et gliales étaient intactes.
Douleur et fonction
Les patients avec une perte neuronale ont rapporté une douleur maximale plus intense que ceux avec une préservation neuronale. Bien que la fonction du bras se soit améliorée après la chirurgie, la douleur persistait, en particulier dans le groupe de perte neuronale.
Analyse transcriptomique
Les DRG préservés ont montré une expression de gènes marqueurs de neurones sensoriels, mais une régulation à la baisse des attributs neuronaux. Une inflammation persistante et une réorganisation de la matrice extracellulaire ont également été observées.
Conclusions
Les patients atteints de lésions du plexus brachial se divisent en deux groupes distincts : ceux avec une préservation neuronale et ceux avec une perte neuronale. Les premiers pourraient bénéficier d’une thérapie anti-inflammatoire, tandis que les seconds nécessitent des études supplémentaires pour comprendre les mécanismes de la perte neuronale, en particulier dans le cadre des approches régénératives.
Points clés de l’éditeur
- Les lésions du plexus brachial, principalement causées par des accidents de la route, entraînent une invalidité sévère et des douleurs neuropathiques, mais les changements cellulaires induits sont mal compris.
- Cette étude a soigneusement phénotypé les patients atteints de lésions du plexus brachial et a réalisé une analyse moléculaire et cellulaire approfondie de leurs DRG avulsés.
- Les patients peuvent être catégorisés en deux groupes selon la perte de leurs unités DRG. Ceux avec une préservation neuronale ont moins de douleur que ceux avec une perte neuronale.
- La restauration du système somatosensoriel pourrait offrir une approche pour résoudre la douleur chez ces patients.
Implications cliniques
Les résultats suggèrent que les patients avec une préservation neuronale pourraient bénéficier de traitements anti-inflammatoires, tandis que ceux avec une perte neuronale nécessitent des stratégies de régénération neuronale. Les futures techniques d’IRM pourraient permettre une quantification non invasive des DRG pour mieux stratifier les patients et personnaliser les traitements.
Déclarations d’intérêt et financement
Les auteurs déclarent aucun conflit d’intérêt, sauf pour HR, qui a reçu des honoraires de consultation de Gruenenthal et Orion. L’étude a été financée par plusieurs organismes, dont la Fondation allemande pour la recherche (DFG).
Disponibilité des données
Les images, les modèles d’apprentissage profond et les scripts d’analyse sont disponibles sur Zenodo et GitHub. Les données de séquençage d’ARN seront accessibles via les archives européennes du génome-phénomène.
Ce rapport résume les principales découvertes et implications de l’article, mettant en lumière les avancées significatives dans la compréhension des lésions du plexus brachial et des douleurs neuropathiques associées.