Cibler SRSF10 pourrait inhiber la polarisation des macrophages M2 et potentialiser la thérapie anti-PD-1 dans le carcinome hépatocellulaire
Le rôle de SRSF10 dans l’immunothérapie du carcinome hépatocellulaire
Contexte académique
Le carcinome hépatocellulaire (Hepatocellular Carcinoma, HCC) est le sixième cancer le plus fréquent dans le monde, avec un taux de mortalité classé troisième. Bien que la résection chirurgicale soit le principal traitement du HCC, le taux élevé de récidive postopératoire affecte gravement le pronostic des patients. Ces dernières années, l’immunothérapie a montré une efficacité significative dans plusieurs types de cancer, en particulier dans le mélanome et le cancer du poumon, où des avancées majeures ont été réalisées. Cependant, le taux de réponse des patients atteints de HCC à la thérapie par blocage des points de contrôle immunitaire (comme les anticorps PD-1/PD-L1) est inférieur à 30 %, et aucune amélioration significative de la survie globale n’a été observée. Cette limitation est principalement due à l’hétérogénéité du microenvironnement tumoral (Tumor Microenvironment, TME) et à ses propriétés immunosuppressives.
Les macrophages dans le microenvironnement tumoral jouent un rôle crucial dans l’immunosuppression du HCC. Les macrophages présentent une grande plasticité et peuvent être classés en macrophages pro-inflammatoires de type M1 et anti-inflammatoires de type M2. Les macrophages de type M2 favorisent l’échappement immunitaire et l’angiogenèse tumorale en sécrétant des facteurs immunosuppresseurs tels que l’IL-10 et le TGF-β1. Par conséquent, la modulation de la polarisation des macrophages, en particulier la conversion des macrophages de type M2 en type M1, est devenue une stratégie clé pour améliorer l’efficacité de l’immunothérapie du HCC.
De plus, la reprogrammation métabolique des cellules tumorales (comme l’augmentation de la glycolyse) est également considérée comme jouant un rôle important dans l’échappement immunitaire. Les sous-produits de la glycolyse, tels que le lactate, non seulement inhibent l’activité des cellules T CD8+, mais favorisent également la formation d’un microenvironnement immunosuppresseur par divers mécanismes. Cependant, les mécanismes par lesquels la glycolyse conduit directement à l’échappement immunitaire restent mal compris.
Source de l’article
Cet article a été rédigé par l’équipe de recherche de Jialiang Cai, Lina Song, Feng Zhang et d’autres chercheurs de l’Institut du cancer du foie de l’hôpital Zhongshan de l’université Fudan, et a été publié le 21 août 2024 dans la revue Cancer Communications. Cette étude a été soutenue par la Fondation nationale des sciences naturelles de Chine et le Comité des sciences et technologies de Shanghai.
Processus et résultats de la recherche
1. Objectifs de la recherche et sélection des gènes clés
L’équipe de recherche a d’abord utilisé le séquençage d’ARN nucléaire unique (snRNA-seq) et la technique d’immunofluorescence multiplex, combinés à l’analyse des données de l’Atlas du génome du cancer (TCGA) et de la base de données d’expression génique intégrée (GEO), pour identifier les gènes clés associés à la résistance à l’immunothérapie. L’étude a révélé que le facteur d’épissage riche en sérine/arginine 10 (SRSF10) est surexprimé dans plusieurs types de tumeurs et est associé à un mauvais pronostic. Une analyse plus approfondie a montré que SRSF10 est étroitement lié à la voie de la glycolyse, suggérant son rôle potentiel dans la reprogrammation métabolique des tumeurs et l’échappement immunitaire.
2. Le rôle de SRSF10 dans le microenvironnement tumoral
Pour valider la fonction de SRSF10, l’équipe de recherche a construit des lignées cellulaires de HCC avec une suppression de SRSF10 et a mené des expériences in vivo sur des modèles murins. Les résultats ont montré que la suppression de SRSF10 inhibe de manière significative la croissance des tumeurs de HCC et modifie la composition du microenvironnement tumoral. Plus précisément, après la suppression de SRSF10, les cellules T CD8+ dans le microenvironnement tumoral ont augmenté de manière significative, tandis que la proportion de macrophages de type M2 a diminué de manière significative. Ces résultats indiquent que SRSF10 influence l’échappement immunitaire des tumeurs en régulant la polarisation des macrophages.
3. SRSF10 régule la polarisation des macrophages via le lactate
Des recherches supplémentaires ont révélé que SRSF10 favorise la production de lactate en régulant la voie de la glycolyse. Le lactate, un sous-produit de la glycolyse, favorise la polarisation des macrophages de type M2 en induisant la lactylation des histones (histone lactylation). Le mécanisme spécifique est que SRSF10 se lie à la région 3’ non traduite (3’UTR) de l’ARNm de MYB, augmentant la stabilité de l’ARN de MYB, ce qui entraîne une régulation à la hausse des enzymes clés de la glycolyse (comme GLUT1, HK1 et LDHA), augmentant ainsi les niveaux de lactate intra- et extracellulaires. L’accumulation de lactate induit ensuite la lactylation des histones, favorisant ainsi la polarisation des macrophages de type M2.
4. La relation entre SRSF10 et la résistance à l’immunothérapie
L’analyse des données cliniques a montré que les patients atteints de HCC avec une expression élevée de SRSF10 ont un taux de réponse plus faible au traitement par anticorps PD-1. L’équipe de recherche a ensuite validé l’efficacité de l’inhibiteur de SRSF10, 1C8, sur des modèles murins. Les résultats ont montré que 1C8 améliore de manière significative l’efficacité du traitement par anticorps PD-1, suggérant que l’inhibition de SRSF10 pourrait surmonter la résistance au traitement par PD-1 dans le HCC.
Conclusions et implications
Cette étude révèle le rôle clé de SRSF10 dans l’échappement immunitaire du HCC et élucide le mécanisme moléculaire par lequel il influence la polarisation des macrophages via la régulation de la glycolyse et du métabolisme du lactate. Les résultats montrent que SRSF10 est non seulement un biomarqueur potentiel de la résistance à l’immunothérapie du HCC, mais offre également une nouvelle cible thérapeutique. En inhibant SRSF10, il est possible d’inverser l’état immunosuppresseur du microenvironnement tumoral et d’améliorer l’efficacité des anticorps PD-1.
Points forts de la recherche
- Découverte innovante : Première démonstration que SRSF10 influence la polarisation des macrophages via la régulation de la glycolyse et du métabolisme du lactate, offrant de nouvelles perspectives pour l’immunothérapie du HCC.
- Validation multidimensionnelle : L’étude combine le séquençage d’ARN nucléaire unique, l’immunofluorescence multiplex, des modèles murins et l’analyse d’échantillons cliniques pour valider de manière exhaustive la fonction de SRSF10 et son rôle dans la résistance à l’immunothérapie.
- Potentiel clinique : La découverte de l’inhibiteur de SRSF10, 1C8, offre une nouvelle cible médicamenteuse pour l’immunothérapie du HCC, avec une valeur clinique importante.
Autres informations utiles
Cette étude a également développé un modèle d’organoïdes tumoraux dérivés de patients (PDOTs) pour évaluer l’efficacité combinée de l’inhibiteur de SRSF10 et des anticorps PD-1. Ce modèle fournit une plateforme expérimentale importante pour le traitement personnalisé du HCC à l’avenir.
Cette recherche approfondit non seulement notre compréhension des mécanismes d’échappement immunitaire du HCC, mais fournit également une base théorique et un soutien expérimental essentiels pour le développement de nouvelles stratégies d’immunothérapie.