Efficacité réelle sur 52 semaines de Deucravacitinib dans le psoriasis : une analyse stratifiée par âge et indice de masse corporelle

Étude sur l’efficacité de 52 semaines de Deucravacitinib dans le psoriasis en pratique réelle

Contexte

Le psoriasis est une maladie inflammatoire chronique de la peau, touchant environ 1 à 3 % de la population mondiale. Cette affection affecte non seulement la qualité de vie (QoL) des patients, mais est souvent associée à des comorbidités telles que les maladies cardiovasculaires, le diabète et la dépression. Des recherches récentes ont montré que les voies IL-17 et IL-23 jouent un rôle clé dans la pathogenèse du psoriasis, tandis que la tyrosine kinase 2 (TYK2), membre de la famille des Janus kinases (JAK), participe au processus pathologique en transmettant les signaux intracellulaires de l’IL-12, de l’IL-23 et des interférons de type I (IFNs). Par conséquent, les médicaments ciblant la TYK2 pourraient constituer une thérapie efficace contre le psoriasis.

Le Deucravacitinib est un inhibiteur oral de la TYK2 qui agit en se liant au domaine régulateur (domaine pseudokinase) pour inhiber allostériquement la TYK2, plutôt qu’en se liant directement à son domaine catalytique. Par rapport aux JAK1, JAK2 et JAK3, le Deucravacitinib présente une sélectivité élevée pour la TYK2 et bloque les signaux intracellulaires médiés par l’IL-23 et les IFN de type I. Cependant, bien que les essais cliniques aient démontré l’efficacité à court terme du Deucravacitinib, son efficacité à long terme en pratique réelle, en particulier selon l’âge et l’indice de masse corporelle (IMC), n’a pas été suffisamment étudiée.

Source de l’étude

Cette recherche a été menée par l’équipe du département de dermatologie de l’hôpital Chiba Hokusoh de l’école de médecine de Nippon, comprenant Teppei Hagino, Marina Onda, Hidehisa Saeki, et al. Les résultats ont été publiés en 2025 dans le Journal of Dermatology. L’étude visait à évaluer l’efficacité de 52 semaines du Deucravacitinib dans le traitement du psoriasis en pratique réelle, en se concentrant particulièrement sur une analyse stratifiée par âge (≥65 ans vs <65 ans) et par IMC (≥25 vs <25).

Méthodologie et conception de l’étude

Conception de l’étude

Il s’agissait d’une étude prospective, menée de décembre 2022 à août 2024, incluant 107 patients japonais âgés de 15 ans ou plus atteints de psoriasis modéré à sévère. Les patients ont reçu 6 mg de Deucravacitinib par voie orale quotidiennement pendant 52 semaines. Les principaux critères d’évaluation comprenaient les taux d’atteinte de PASI 75, PASI 90 et PASI 100, ainsi que d’autres indices cliniques clés tels que l’évaluation globale statique du médecin (sPGA) et l’indice de qualité de vie en dermatologie (DLQI). Les données ont été analysées selon des strates d’âge et d’IMC.

Collecte des données

Avant le début du traitement par Deucravacitinib, les caractéristiques de base des patients ont été enregistrées, y compris l’âge, le sexe, l’IMC, la durée de la maladie, les traitements antérieurs (comme l’aprémilast, un inhibiteur de la phosphodiestérase 4, ou les biologiques), la présence d’arthrite, de lésions du cuir chevelu, des ongles ou des organes génitaux, ainsi que le diabète, les maladies cardiovasculaires, le statut tabagique, les scores de PASI de base, le sPGA et le DLQI.

Critères d’inclusion et d’exclusion

L’étude incluait des patients atteints de psoriasis vulgaire, d’arthrite psoriasique et de psoriasis érythrodermique. Tous les patients ont reçu le Deucravacitinib pendant au moins 4 semaines. Le passage des traitements systémiques précédents (comme l’aprémilast ou les biologiques) au Deucravacitinib s’est fait sans période de sevrage, de sorte que les données au moment de la transition ont servi de valeurs de référence. Les critères d’exclusion comprenaient les patients réexposés au Deucravacitinib, ceux souffrant de maladies cardiovasculaires graves, de cancers, d’infections actives, d’une hypersensibilité au Deucravacitinib ou à ses composants, ainsi que les femmes enceintes ou allaitantes.

Évaluation de l’efficacité

Au cours des 52 semaines, les changements dans les scores PASI et DLQI ont été enregistrés, et les taux d’atteinte de PASI 75, PASI 90, PASI 100, ainsi que de PASI ≤2 ou PASI ≤1 ont été calculés. Simultanément, les taux d’atteinte de sPGA 0/1 et DLQI 0/1 (réduction de ≥2 points par rapport au score de base) ont été évalués.

Principaux résultats

Analyse stratifiée par âge

Dans les groupes de patients ≥65 ans et <65 ans, les scores moyens de PASI ont diminué de manière continue de la base à la semaine 52, passant respectivement de 12,41 à 1,03 et de 15,48 à 1,11. Les taux d’atteinte de PASI 75, PASI 90 et sPGA 0/1 à la semaine 52 étaient similaires dans les deux groupes, mais les taux d’atteinte de PASI 100 et PASI ≤1 étaient légèrement inférieurs chez les patients ≥65 ans. En outre, le taux d’atteinte de DLQI 0/1 à la semaine 52 était plus élevé chez les patients âgés, indiquant une amélioration plus marquée de la qualité de vie chez ces derniers.

Analyse stratifiée par IMC

Dans les groupes de patients avec un IMC ≥25 et <25, les scores moyens de PASI ont également diminué de manière continue de la base à la semaine 52, passant respectivement de 13,53 à 1,28 et de 14,16 à 1,01. Les taux d’atteinte de PASI 75, PASI 90 et sPGA 0/1 à la semaine 52 étaient légèrement inférieurs chez les patients avec un IMC ≥25, en particulier aux semaines 4, 16, 24 et 40, où des différences significatives ont été observées. De plus, le taux d’atteinte de DLQI 0/1 à la semaine 52 était également plus bas chez les patients avec un IMC plus élevé, suggérant une efficacité légèrement réduite dans ce groupe.

Corrélation entre l’IMC de base et les indices cliniques

L’analyse de corrélation de Spearman a révélé une corrélation positive significative entre l’IMC de base et les scores PASI, sPGA et DLQI à la semaine 52, indiquant qu’un IMC plus élevé était associé à une amélioration clinique moindre. En revanche, aucune corrélation significative n’a été observée entre l’âge de base et les indices cliniques, suggérant que l’âge avait peu d’impact sur l’efficacité du traitement.

Conclusions et implications de l’étude

L’étude montre que le Deucravacitinib améliore de manière significative la sévérité de la maladie et la qualité de vie dans tous les groupes stratifiés par âge ou IMC. Cependant, les taux d’atteinte de PASI 75, PASI 90 et PASI 100 étaient légèrement inférieurs chez les patients avec un IMC ≥25, ce qui suggère que l’efficacité pourrait être quelque peu réduite dans ce groupe de patients. L’étude montre également que le Deucravacitinib est efficace chez les patients âgés, bien que les taux de clairance cutanée complète puissent être plus faibles.

Cette recherche fournit des informations importantes pour le traitement personnalisé des patients atteints de psoriasis, en particulier pour les patients âgés et ceux avec un IMC élevé. Par ailleurs, les résultats suggèrent que pour les patients avec un IMC élevé, une dose ajustée de Deucravacitinib pourrait être nécessaire pour obtenir une meilleure efficacité.

Points forts de l’étude

  1. Données à long terme en pratique réelle : Cette étude est la première à évaluer l’efficacité de 52 semaines du Deucravacitinib en pratique réelle, comblant ainsi une lacune dans les données d’efficacité à long terme.
  2. Analyse stratifiée par âge et IMC : L’étude se concentre sur l’impact de l’âge et de l’IMC sur l’efficacité, fournissant des informations importantes pour le traitement personnalisé.
  3. Amélioration significative de la qualité de vie : L’étude montre que le Deucravacitinib améliore non seulement les lésions cutanées, mais aussi de manière significative la qualité de vie, en particulier chez les patients âgés.
  4. Implications cliniques : Les résultats suggèrent que les patients avec un IMC plus élevé pourraient nécessiter des ajustements de dose ou des stratégies alternatives, telles que les traitements biologiques.

Informations supplémentaires pertinentes

L’étude discute également des différences d’efficacité entre le Deucravacitinib et les traitements biologiques (comme le Bimekizumab), indiquant que les patients avec un IMC plus élevé pourraient être plus adaptés aux traitements biologiques. En outre, les résultats soutiennent le potentiel des inhibiteurs de TYK2 dans le traitement du psoriasis, ouvrant des pistes pour le développement futur de médicaments.