L'impact de la thérapie antibiotique chez les patients atteints de psoriasis avec infection streptococcique active : une étude prospective

Impact de l’antibiothérapie chez les patients atteints de psoriasis avec infection streptococcique active

Contexte académique

Le psoriasis est une maladie inflammatoire systémique chronique et récurrente de la peau, avec une prévalence mondiale d’environ 2 à 3 %. Bien que son mécanisme pathogénique ne soit pas encore entièrement élucidé, des études suggèrent que les infections bactériennes, virales et fongiques peuvent induire ou aggraver le psoriasis. En particulier, l’association entre le streptocoque β-hémolytique du groupe A (Streptococcus pyogenes) et le psoriasis a été largement étudiée. De nombreux patients rapportent que les poussées de psoriasis sont liées à des infections streptococciques de la gorge, notamment chez les enfants et les adultes. Cependant, l’impact exact de l’infection streptococcique sur l’évolution du psoriasis reste incertain, et le rôle de l’antibiothérapie dans la gestion du psoriasis fait toujours débat.

Pour résoudre cette question, D. Bonciani et ses collègues ont mené une étude prospective visant à évaluer l’impact de l’infection streptococcique sur l’évolution du psoriasis et à explorer l’efficacité de l’antibiothérapie systémique chez les patients atteints de psoriasis avec infection streptococcique concomitante.

Source de l’étude

Cet article a été réalisé par des chercheurs de plusieurs institutions italiennes, notamment le département de dermatologie de l’Université de Florence, l’unité de microbiologie et virologie de l’hôpital universitaire Careggi, et l’unité des maladies cutanées rares de l’hôpital Piero Palagi. L’article a été publié en 2025 dans le Journal of Dermatology sous le titre “The Impact of Antibiotic Therapy in Psoriasis Patients with Active Streptococcal Infection: A Prospective Study”.

Méthodologie de l’étude

1. Recrutement des patients

L’étude a été menée au centre de psoriasis de Florence, en Italie, où 155 patients atteints de psoriasis ont été recrutés. Les critères d’inclusion comprenaient : un âge inférieur à 80 ans, un diagnostic de psoriasis léger à modéré, et la capacité à fournir un consentement éclairé écrit. Les critères d’exclusion comprenaient : le psoriasis pustuleux ou érythrodermique, l’arthrite psoriasique concomitante, des antécédents de rémission spontanée du psoriasis, des antécédents d’allergie aux antibiotiques, la grossesse ou l’allaitement, et des antécédents d’autres maladies à médiation immunitaire.

2. Évaluation de la gravité de la maladie

Tous les patients ont été évalués à l’aide de l’indice de sévérité et d’étendue du psoriasis (Psoriasis Area and Severity Index, PASI) à l’inclusion, puis lors des visites de suivi (1 mois, 6 mois, 12 mois et 18 mois).

3. Détection de l’infection streptococcique

Des prélèvements de gorge ont été effectués pour détecter les streptocoques β-hémolytiques, et le taux d’antistreptolysine O (ASO) a été mesuré. Les prélèvements ont été cultivés sur des milieux gélosés au sang de Columbia et des milieux sélectifs pour le groupe A, avec identification des souches par spectrométrie de masse MALDI-TOF. Un taux d’ASO supérieur à 200 UI/ml était considéré comme positif.

4. Traitement et suivi des patients

Les patients avec un prélèvement de gorge positif ont reçu une antibiothérapie systémique (amoxicilline, clarithromycine ou clindamycine, selon les résultats des tests de sensibilité) ainsi qu’un traitement local du psoriasis (gel de bétaméthasone et calcipotriol). Les patients avec un prélèvement négatif n’ont reçu que le traitement local. Tous les patients ont été suivis à 1 mois, 6 mois, 12 mois et 18 mois pour évaluer la réponse clinique et les récidives.

Principaux résultats

1. Prévalence de l’infection streptococcique

L’étude a révélé que 25,5 % des patients atteints de psoriasis présentaient une infection streptococcique, un taux significativement plus élevé que celui du groupe témoin sain (12,7 %). Cela suggère que les patients atteints de psoriasis sont plus susceptibles de développer une infection streptococcique.

2. Évolution des scores PASI

À 1 mois et 6 mois de suivi, les scores PASI des patients ASO-positifs ont significativement diminué. Cependant, aucune différence significative n’a été observée entre les patients traités par antibiotiques et ceux non traités. Après 18 mois, la réduction moyenne du score PASI était de 84,4 % dans le groupe traité par antibiotiques, contre 76,0 % dans le groupe non traité, mais la différence n’était pas statistiquement significative.

3. Taux de réponse PASI75 et PASI90

Aucune différence significative n’a été observée entre les groupes concernant les taux de réponse PASI75 (amélioration ≥ 75 %) et PASI90 (amélioration ≥ 90 %).

Conclusion

L’étude montre que, bien que l’infection streptococcique soit plus fréquente chez les patients atteints de psoriasis, l’antibiothérapie systémique n’améliore pas significativement la gravité du psoriasis. Cette remet en question l’utilisation traditionnelle des antibiotiques dans la gestion du psoriasis et souligne la nécessité de poursuivre les recherches sur la relation complexe entre infection et psoriasis.

Points forts de l’étude

  1. Association entre infection streptococcique et psoriasis : L’étude confirme la prévalence élevée de l’infection streptococcique chez les patients atteints de psoriasis, fournissant de nouvelles preuves de cette association.
  2. Controverse autour de l’antibiothérapie : Les résultats indiquent que l’antibiothérapie n’améliore pas significativement la gravité du psoriasis, ce qui questionne les stratégies thérapeutiques actuelles.
  3. Suivi à long terme : L’étude offre des données complètes sur l’efficacité de l’antibiothérapie grâce à un suivi de 18 mois.

Valeur de l’étude

Cette recherche fournit des preuves cliniques importantes pour le traitement du psoriasis, suggérant que l’antibiothérapie a une valeur limitée dans la gestion de cette maladie. Par ailleurs, elle souligne la nécessité d’études de plus grande envergure avec un suivi plus long pour mieux comprendre la relation entre infection et psoriasis, et ainsi offrir des recommandations cliniques plus solides.

Informations supplémentaires

L’étude a été financée par le ministère de la Santé italien, sous le numéro de projet 16RFAB. De plus, l’équipe de recherche a exploré le rôle potentiel des superantigènes streptococciques dans la pathogenèse du psoriasis, ouvrant la voie à de futures recherches.