Essai de phase Ib sur le virus oncolytique néoadjuvant OrienX010 et le toripalimab dans le mélanome acral résécable
Thérapie néoadjuvante avec le virus oncolytique OrienX010 combiné au Toripalimab pour le mélanome acro-lentigineux résécable : un essai clinique de phase Ib
Contexte
Le mélanome acro-lentigineux (AM) est un sous-type agressif de mélanome avec une incidence élevée chez les populations chinoises, représentant environ 40 % des cas de mélanome. Malgré des avancées dans le traitement des mélanomes, les thérapies immunitaires actuelles montrent une efficacité limitée pour l’AM, et il manque des protocoles établis de thérapie néoadjuvante. La faible charge mutagène tumorale (TMB) et l’état immunosuppressif caractéristique de l’AM expliquent en partie les faibles taux de réponse aux thérapies par anti-PD-1 et la courte durée de survie des patients.
Récemment, les thérapies immunitaires néoadjuvantes ont montré un potentiel supérieur par rapport aux traitements purement adjuvants pour induire une réponse immunitaire robuste, améliorant ainsi la survie sans récidive (DFS) et la survie globale (OS). Les thérapies à base de virus oncolytique, en modifiant le microenvironnement tumoral “froid” en un état “chaud” immunogène, offrent une possibilité de synergie avec les inhibiteurs de points de contrôle immunitaires (ICI). Cependant, les résultats des thérapies actuelles par virus oncolytique restent limités pour l’AM. Cette étude explore donc l’efficacité et la sécurité de la combinaison du virus oncolytique OrienX010 (ORI) et du Toripalimab (TORI) comme traitement néoadjuvant pour l’AM résécable.
Origine et Méthodologie de l’Étude
Cet article, réalisé par l’équipe de recherche de l’Hôpital de Cancérologie de l’Université de Pékin, a été publié en 2024 dans Signal Transduction and Targeted Therapy. Il présente un essai clinique monocentrique, ouvert et de phase Ib (ClinicalTrials.gov NCT04197882), évaluant l’efficacité et la sécurité du traitement combiné ORI et TORI en tant que thérapie néoadjuvante. Les principaux objectifs incluaient les taux de réponse radiographique et pathologique. Les objectifs secondaires incluaient les taux de survie sans récidive à 1 et 2 ans (RFS), les taux de survie sans événement (EFS) et la sécurité.
Design de l’Étude
L’étude a inclus 30 patients atteints d’AM résécable de stade III ou IV. Ceux-ci ont reçu un traitement néoadjuvant de 12 semaines (injections intratumorales d’ORI toutes les deux semaines et perfusions intraveineuses de TORI toutes les deux semaines), suivi d’une résection chirurgicale et d’un traitement adjuvant au TORI pendant un an. Le protocole expérimental comprenait des évaluations radiographiques et pathologiques, des analyses histologiques post-chirurgicales et des suivis de la RFS et de l’EFS.
Techniques Spécifiques et Analyses
- Conception de l’OrienX010 : L’ORI est basé sur une souche modifiée du virus de l’herpès simplex de type 1 (HSV-1), avec des suppressions des gènes ICP34.5, ICP47 et ICP6, et l’insertion du gène humain GM-CSF pour stimuler le recrutement immunitaire et la présentation d’antigènes.
- Analyse de Données et Technologies : Cela inclut l’imagerie PET/CT, l’évaluation histologique de biomarqueurs (TIL et TLS) et la mesure des cytokines et chimiokines sériques utilisant la technologie Olink.
Résultats de l’Étude
Caractéristiques des Patients
L’âge médian des patients était de 57 ans (21-72 ans), avec 47 % d’hommes. Les stades incluaient 40 % de stade IIIb, 47 % de stade IIIc et 13 % de stade IVm1a.
Résultats Principaux
- Réponse Pathologique : Parmi les 27 patients ayant subi une chirurgie, 77,8 % ont montré une réponse pathologique, dont 14,8 % avec une réponse complète (PCR), 18,5 % proche de la PCR et 44,5 % une réponse partielle.
- Réponse Radiographique : Selon les critères RECIST 1.1, le taux de réponse radiographique global était de 36,6 %.
- Survie Sans Récidive : Les taux de RFS à 1 et 2 ans étaient de 85,2 % et 81,5 %, respectivement, significativement supérieurs aux données des thérapies adjuvantes pour l’AM (RFS entre 14,8 et 26 mois).
- Survie Sans Événement : Les taux d’EFS à 1 et 2 ans étaient respectivement de 83 % et 73 %.
Sécurité
Tous les patients ont rapporté des événements indésirables liés au traitement (TRAE), dont la majorité étaient de grade 1-2 (83,3 %). Quatre patients (13,3 %) ont présenté des événements de grade 3, tels que des infections des tissus mous et des neuropathies périphériques.
Marqueurs Biologiques et Évaluation Pathologique
Après traitement, les patients ayant une réponse pathologique montraient une augmentation significative des TIL (95,2 % vs. 50,0 %, p=0,006) et des TLS (70,6 % vs. 16,7 %, p=0,022), suggérant une activation immunitaire renforcée. Les analyses sériques ont montré une augmentation significative des cytokines pro-inflammatoires (par ex. IFN-γ, CXCL10 et IL-12), indiquant une sensibilisation accrue à l’immunothérapie.
Limites de l’Évaluation Radiographique
Bien que le PET/CT soit utile pour le suivi post-traitement, aucune corrélation significative n’a été observée entre les paramètres radiographiques et les réponses pathologiques ou les taux de survie, soulignant des limites dans l’évaluation par imagerie dans ce contexte néoadjuvant.
Discussion et Implications
Cette étude est la première à démontrer une efficacité élevée et des avantages de survie avec la thérapie néoadjuvante combinée ORI+TORI pour l’AM résécable. Comparée aux thérapies adjuvantes traditionnelles, cette approche offre des taux de réponse pathologique et de RFS considérablement améliorés. En comparaison avec le traitement monothérapeutique par virus oncolytique (ex. T-VEC), la combinaison ORI+TORI montre une supériorité remarquable (RFS à 2 ans passant de 29,5 % à 81,5 %).
Limites de l’Étude
- Taille de l’échantillon réduite et durée de suivi limitée.
- Absence de comparaison directe avec d’autres combinaisons thérapeutiques (ex. anti-PD-1 + anti-CTLA-4).
Conclusion
Les résultats soutiennent la combinaison ORI+TORI comme une option prometteuse pour le traitement néoadjuvant de l’AM. Ces données encouragent de futures études multicentriques randomisées pour valider cette approche et optimiser les stratégies thérapeutiques individualisées pour les patients atteints d’AM.