Les cellules alpha cycliques dans les îlots pancréatiques humains traités par des médicaments régénératifs peuvent servir de progéniteurs clés des cellules bêta
Contexte académique
Le diabète est un problème de santé mondial, touchant plus de 500 millions de personnes. Que ce soit le diabète de type 1 (T1D) ou de type 2 (T2D), leur caractéristique commune est une réduction significative du nombre de cellules β fonctionnelles productrices d’insuline. Par conséquent, la restauration ou l’augmentation du nombre de cellules β est considérée comme une stratégie clé dans le traitement du diabète. Actuellement, bien que des progrès aient été réalisés grâce à des méthodes telles que la transplantation de pancréas, la transplantation d’îlots ou l’utilisation de cellules β dérivées de cellules souches, ces approches sont coûteuses, dépendent de la disponibilité des donneurs et sont difficiles à appliquer à grande échelle. Ainsi, le développement de médicaments capables de promouvoir la régénération endogène des cellules β est devenu un domaine de recherche important.
Récemment, des études ont montré que de petites molécules telles que les inhibiteurs de DYRK1A (comme l’harmine) peuvent stimuler la prolifération des cellules β et améliorer leur différenciation et leur fonction. Cependant, les mécanismes précis par lesquels ces médicaments favorisent la régénération des cellules β in vivo restent mal compris. Cet article utilise le séquençage d’ARN monocellulaire pour étudier l’impact des inhibiteurs de DYRK1A sur les cellules des îlots pancréatiques, en particulier la possibilité de transdifférenciation des cellules α en cellules β.
Source de l’article
Cet article a été co-écrit par Esra Karakose, Xuedi Wang, Peng Wang et d’autres auteurs, issus de plusieurs institutions de recherche, notamment l’Institut du diabète, de l’obésité et du métabolisme de l’Icahn School of Medicine at Mount Sinai à New York. L’article a été publié le 17 décembre 2024 dans la revue Cell Reports Medicine, sous le titre “Cycling Alpha Cells in Regenerative Drug-Treated Human Pancreatic Islets May Serve as Key Beta Cell Progenitors”.
Processus et résultats de la recherche
Processus de recherche
Séquençage d’ARN monocellulaire : L’équipe de recherche a obtenu des cellules d’îlots pancréatiques provenant de quatre donneurs adultes. Ces cellules ont été traitées soit avec 10 µM d’harmine seule, soit avec une combinaison d’harmine et de 5 nM d’un agoniste du récepteur GLP-1 (GLP-1(7-36)), soit avec une combinaison d’harmine et de 3 µM d’un inhibiteur de TGF-β (LY364947), pendant 96 heures. Ensuite, un séquençage d’ARN monocellulaire (scRNA-seq) a été réalisé sur ces cellules traitées, générant un total de 109 881 cellules de haute qualité.
Annotation des types cellulaires et analyse de clustering : À partir des données de séquençage d’ARN monocellulaire, l’équipe a identifié 21 clusters de types cellulaires distincts et a confirmé la présence de tous les types cellulaires connus dans les îlots pancréatiques. Les données ont été intégrées et corrigées pour les effets de lot à l’aide de l’outil “Harmony”, assurant la cohérence entre les différents donneurs. De plus, l’équipe a visualisé les niveaux d’expression des hormones des cellules des îlots (comme l’insuline, le glucagon, la somatostatine, etc.) à l’aide de graphiques de caractéristiques.
Analyse du cycle cellulaire : L’équipe a défini les phases du cycle cellulaire pour chaque type de cellule et a identifié deux types de cellules présentant des niveaux élevés de marqueurs de prolifération (comme MKI67, TOP2A, etc.), dont l’un a été étiqueté comme “cycling alpha cells” (cellules α en cycle). Ces cellules expriment principalement des gènes marqueurs des cellules α (comme GCG, CHGB, etc.), ainsi que des gènes associés aux granules d’insuline (comme SCG2).
Impact du traitement médicamenteux sur l’abondance cellulaire : L’équipe a comparé les proportions des différents types de cellules dans différentes conditions de traitement et a constaté que le traitement par des médicaments régénérateurs augmentait significativement la proportion de cellules α en cycle. Des tests d’abondance différentielle utilisant le cadre statistique Milo ont confirmé que l’abondance des cellules α en cycle augmentait de manière significative après le traitement médicamenteux.
Analyse de la transdifférenciation cellulaire : Pour explorer si les cellules α en cycle pouvaient se transdifférencier en cellules β, l’équipe a effectué des analyses de vitesse d’ARN et de trajectoire pseudotemporelle. Les résultats ont montré que les cellules α en cycle pouvaient se différencier en cellules de type α-β2, qui à leur tour pouvaient donner naissance à des cellules β. De plus, des expériences d’immunocytochimie ont confirmé une augmentation significative du nombre de cellules α-β positives pour le C-peptide et le glucagon après le traitement par des médicaments régénérateurs.
Résultats principaux
Identification des cellules α en cycle : L’équipe a identifié une population unique de cellules α en cycle grâce au séquençage d’ARN monocellulaire. Ces cellules ont augmenté de manière significative après le traitement par des médicaments régénérateurs et ont montré une régulation à la hausse des marqueurs phénotypiques des cellules β.
Impact du traitement médicamenteux sur l’abondance cellulaire : Le traitement par des médicaments régénérateurs a augmenté de manière significative la proportion de cellules α en cycle, suggérant que ces cellules pourraient être la cible principale des médicaments.
Preuves de transdifférenciation cellulaire : Les analyses de vitesse d’ARN et de trajectoire pseudotemporelle ont montré que les cellules α en cycle pouvaient se différencier en cellules de type α-β2, qui à leur tour pouvaient se transformer en cellules β. Les expériences d’immunocytochimie ont également confirmé une augmentation significative du nombre de cellules α-β après le traitement médicamenteux.
Acquisition du phénotype des cellules β : Les cellules α en cycle ont montré une régulation à la hausse des marqueurs phénotypiques des cellules β après le traitement par des médicaments régénérateurs, suggérant que ces cellules pourraient contribuer à l’augmentation du nombre de cellules β par un mécanisme de transdifférenciation.
Conclusion et signification
Cette étude révèle que les inhibiteurs de DYRK1A augmentent le nombre de cellules β en favorisant la prolifération et la transdifférenciation des cellules α en cycle. Cette découverte ouvre de nouvelles perspectives pour le traitement du diabète, en particulier pour les patients dont le nombre de cellules β est gravement réduit. De plus, l’étude suggère que l’action des médicaments régénérateurs pourrait ne pas se limiter aux cellules β, mais pourrait également cibler les cellules précurseurs α pour régénérer les cellules β.
Points forts de la recherche
Identification des cellules α en cycle : L’étude a identifié pour la première fois les cellules α en cycle grâce au séquençage d’ARN monocellulaire et a confirmé leur augmentation significative après le traitement par des médicaments régénérateurs.
Preuves de transdifférenciation cellulaire : Grâce à des analyses de vitesse d’ARN et de trajectoire pseudotemporelle, l’étude a fourni des preuves directes de la transdifférenciation des cellules α en cycle en cellules β.
Nouveau mécanisme des médicaments régénérateurs : L’étude a révélé que les inhibiteurs de DYRK1A favorisent la régénération des cellules β en stimulant la prolifération et la transdifférenciation des cellules précurseurs α.
Autres informations utiles
Innovation technologique : L’étude a utilisé des techniques avancées telles que le séquençage d’ARN monocellulaire, l’analyse de vitesse d’ARN et l’analyse de trajectoire pseudotemporelle, fournissant de nouveaux outils et méthodes pour l’étude des cellules des îlots pancréatiques.
Directions futures de recherche : L’équipe de recherche souligne la nécessité de développer des technologies de traçage de lignée pour les cellules α humaines afin de valider davantage le mécanisme de transdifférenciation des cellules α en cellules β. De plus, il sera essentiel de valider ces découvertes dans des modèles in vivo pour évaluer leur potentiel clinique.
Cette étude offre de nouvelles perspectives pour le traitement du diabète, en révélant un mécanisme par lequel les médicaments régénérateurs favorisent la transdifférenciation des cellules α en cellules β, avec une valeur scientifique et clinique importante.