Relation entre les changements de connectivité structurelle et fonctionnelle du réseau chez les patients atteints de lésions cérébrales traumatiques et de symptômes chroniques
Étude sur les changements de connectivité structurelle et fonctionnelle chez les patients atteints de lésions cérébrales traumatiques
Contexte
Les lésions cérébrales traumatiques (Traumatic Brain Injury, TBI) sont une pathologie neurologique courante pouvant entraîner des symptômes cognitifs, émotionnels et physiques à long terme. Bien que de nombreux patients voient leurs symptômes s’atténuer dans les mois suivant la blessure, une proportion significative continue de présenter des symptômes des années, voire des décennies après l’incident. Pour mieux comprendre l’impact des TBI sur le cerveau, les chercheurs se sont intéressés à la relation entre la connectivité structurelle (Structural Connectivity, SC) et la connectivité fonctionnelle (Functional Connectivity, FC) du cerveau. La SC est généralement évaluée par imagerie par tenseur de diffusion (Diffusion Tensor Imaging, DTI) pour mesurer l’intégrité de la matière blanche, tandis que la FC est étudiée par imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (Functional Magnetic Resonance Imaging, fMRI) pour analyser les corrélations fonctionnelles entre différentes régions cérébrales.
Cette étude vise à explorer les changements de SC et de FC chez les patients atteints de TBI, en particulier ceux présentant des symptômes chroniques, et à les comparer à un groupe témoin sain. En combinant l’analyse de la SC et de la FC, les chercheurs espèrent mieux comprendre l’impact des TBI sur les réseaux cérébraux et fournir de nouveaux biomarqueurs pour le diagnostic et le traitement.
Source de l’article
Cet article a été rédigé par Xiaojian Kang, Emily Grossner, Byung C. Yoon et Maheen M. Adamson, issus du système de santé des anciens combattants de Palo Alto (VA Palo Alto Health Care System) et de la faculté de médecine de l’université Stanford (Stanford University School of Medicine). L’étude a été publiée en 2025 dans la revue European Journal of Neuroscience sous le titre “Relationship between structural and functional network connectivity changes for patients with traumatic brain injury and chronic health symptoms”.
Méthodologie de l’étude
Participants et groupes
L’étude a inclus 46 participants, répartis en trois groupes : 1. Groupe témoin sain (CG) : 13 individus sans antécédents de TBI. 2. Groupe TBI sans symptômes chroniques (TBI-NCS) : 16 patients atteints de TBI ne rapportant pas de symptômes chroniques au moment des tests. 3. Groupe TBI avec symptômes chroniques (TBI-CS) : 17 patients atteints de TBI présentant des symptômes chroniques apparus après la blessure.
Tous les participants ont subi une évaluation physique, neurologique, neuropsychologique et psychiatrique complète, ainsi qu’une imagerie par résonance magnétique (IRM).
Acquisition et prétraitement des données
L’étude a utilisé un scanner IRM GE 3T Discovery MR750 pour acquérir des images T1 et T2 à haute résolution, des images de diffusion (DWI) et des données de fMRI au repos (rsfMRI). Les images T1 ont été prétraitées à l’aide du logiciel FreeSurfer, comprenant la normalisation d’intensité, la segmentation d’image, l’inflation des surfaces de matière grise (GM) et de matière blanche (WM), ainsi que la parcellisation des régions cérébrales. Les données DWI ont été traitées avec le logiciel MRtrix3, incluant le débruitage, la suppression des artefacts de Gibbs, la correction des distorsions EPI, la correction des inhomogénéités du champ b0, ainsi que la correction des distorsions dues aux courants de Foucault et aux mouvements, suivies d’une recalibration et d’un rééchantillonnage à l’aide du logiciel FSL.
Analyse de la connectivité structurelle (SC)
La SC a été construite avec MRtrix3 en utilisant la méthode de tractographie anatomiquement contrainte (ACT), générant 10 millions de fibres, puis réduites à 1 million via l’algorithme de filtrage informé par déconvolution sphérique (SIFT). La matrice SC a été construite sur 68 régions de Desikan-Killiany (DK), la force de connexion étant calculée par la somme des facteurs de pondération des fibres entre les nœuds.
Analyse de la connectivité fonctionnelle (FC)
Les données rsfMRI ont été traitées avec la boîte à outils CONN, comprenant le chargement des données de surface structurelles, de l’atlas DK et des données rsfMRI, suivies d’un prétraitement. La FC a été générée par une analyse de premier niveau, les séries temporelles de signal étant détendues linéairement et filtrées en bande passante (0,008-0,09 Hz). La matrice FC a été construite sur 68 régions DK.
Analyse de corrélation entre SC et FC
L’étude a calculé la corrélation globale entre SC et FC et a comparé les différences entre les trois groupes. Les résultats montrent que la corrélation entre SC et FC est significativement plus élevée chez les patients atteints de TBI que dans le groupe témoin.
Résultats principaux
Corrélation entre SC et FC
L’étude a révélé que la corrélation entre SC et FC est significativement plus élevée chez les patients atteints de TBI que dans le groupe témoin. Les groupes TBI-NCS et TBI-CS ont montré une corrélation SC-FC supérieure de 11,5 % et 11,9 % respectivement par rapport au groupe témoin.
Analyse par clusters de la SC
Par rapport au groupe témoin, le groupe TBI-CS a montré une réduction significative de la SC dans plusieurs régions cérébrales, en particulier dans le réseau du mode par défaut (DMN) et le réseau du langage (LAN). Le groupe TBI-NCS n’a montré une réduction de la SC que dans le DMN et le LAN du côté gauche.
Analyse par clusters de la FC
Le groupe TBI-NCS a montré une réduction de la FC dans le DMN bilatéral, le CON gauche, le LAN bilatéral, le SMN bilatéral et le VMM bilatéral. Le groupe TBI-CS a montré une réduction de la FC dans le DMN bilatéral, le FPN, le SMN et le VS2. Comparé au groupe TBI-NCS, le groupe TBI-CS a montré une réduction de la FC dans le DMN et le CON bilatéraux.
Analyse par ROI
Dans le groupe TBI-CS, le gyrus cingulaire antérieur rostral (RACG) du DMN gauche a montré une augmentation de la SC, tandis que quatre autres ROI ont montré une réduction de la SC. Le groupe TBI-NCS a montré une augmentation de la FC dans le cortex cunéiforme (CU) du VS2 droit et une réduction de la FC dans le gyrus frontal orbitaire latéral (LOFG) du DMN gauche. Comparé au groupe TBI-NCS, le groupe TBI-CS a montré une augmentation de la FC dans le pôle temporal (TP) du DMN droit et une réduction de la FC dans le gyrus frontal orbitaire médial (MOFG) du DMN gauche et le gyrus cingulaire postérieur (PCG) du CON droit.
Conclusion
Cette étude, en combinant l’analyse de la SC et de la FC, a révélé des changements dans la connectivité des réseaux cérébraux chez les patients atteints de TBI. Les résultats montrent que les patients atteints de TBI, en particulier ceux présentant des symptômes chroniques, ont une corrélation significativement plus élevée entre SC et FC que le groupe témoin. De plus, le groupe TBI-CS a montré une réduction généralisée de la SC dans plusieurs régions cérébrales, tandis que le groupe TBI-NCS a montré une réduction de la FC. Ces résultats suggèrent que la présence de symptômes chroniques est associée à des schémas spécifiques de changements dans les réseaux structurels et fonctionnels du cerveau, ce qui pourrait fournir de nouveaux biomarqueurs pour le diagnostic et le traitement des TBI.
Points forts de l’étude
- Analyse multimodale de neuroimagerie : Cette étude combine l’analyse de la SC et de la FC, offrant une perspective plus complète des changements de connectivité cérébrale.
- Impact des symptômes chroniques : L’étude révèle que la présence de symptômes chroniques est associée à des schémas spécifiques de changements dans les réseaux cérébraux, fournissant de nouvelles perspectives sur les effets à long terme des TBI.
- Biomarqueurs potentiels : Les résultats suggèrent que les changements de SC et de FC pourraient servir de biomarqueurs pour le diagnostic et le pronostic des TBI, avec une valeur clinique importante.
Autres informations pertinentes
Bien que cette étude fournisse des résultats importants, certaines limitations existent, comme la taille réduite de l’échantillon et un déséquilibre dans le ratio hommes-femmes. Les recherches futures devront valider ces résultats sur des échantillons plus larges et plus diversifiés, et explorer davantage les impacts à long terme des TBI ainsi que leurs mécanismes neuronaux sous-jacents.