Un volume de mismatch de perfusion plus important est associé à une durée de séjour hospitalier plus longue dans les accidents vasculaires cérébraux par occlusion de vaisseaux de taille moyenne
Un volume de mismatch de perfusion plus important est associé à une durée d’hospitalisation plus longue chez les patients atteints d’AVC par occlusion de vaisseaux de taille moyenne
Contexte académique
L’AVC (accident vasculaire cérébral) est la deuxième cause de décès dans le monde, représentant un fardeau considérable pour les patients et les systèmes de santé. Une durée d’hospitalisation (length of stay, LOS) prolongée est étroitement liée à des résultats cliniques défavorables après un AVC, notamment des infections nosocomiales, des saignements gastro-intestinaux, une fonction neurologique médiocre à la sortie, une dépression post-AVC et un risque accru de handicap. De plus, une hospitalisation prolongée augmente les coûts des soins et de la réadaptation liés à l’AVC, exerçant une pression sur les ressources médicales et la capacité des hôpitaux.
Bien que les facteurs influençant la durée d’hospitalisation dans les occlusions de gros vaisseaux (large vessel occlusion, LVO), tels que la gravité de l’AVC, le volume de l’AVC et les types de traitements endovasculaires, aient été largement étudiés, leur rôle dans les occlusions de vaisseaux de taille moyenne (medium vessel occlusion, MeVO) reste insuffisamment exploré. Les MeVO représentent 40 % des cas d’AVC ischémique aigu (acute ischemic stroke, AIS), et leur physiopathologie diffère de celle des LVO, ce qui pourrait entraîner des valeurs prédictives différentes.
Cette étude vise à explorer les facteurs prédictifs de la durée d’hospitalisation chez les patients atteints d’AIS-MeVO, en particulier la relation entre le volume de mismatch de perfusion (perfusion mismatch volume) et la durée d’hospitalisation. Le volume de mismatch de perfusion est calculé à l’aide de l’imagerie de perfusion par tomodensitométrie (CT perfusion, CTP), définie comme la région où le temps maximal (Tmax > 6 secondes) est atteint, moins la région où le débit sanguin cérébral relatif (relative cerebral blood flow, rCBF < 30 %) est réduit. La signification clinique de cet indicateur dans les MeVO n’a pas encore été suffisamment étudiée.
Source de l’article
Cet article est le fruit d’une collaboration entre des chercheurs de plusieurs institutions renommées, dont le Johns Hopkins Medical Center, le Massachusetts General Hospital et le Stanford Medical Center. Les auteurs principaux incluent Janet Mei, Hamza Adel Salim et Vivek Yedavalli. L’article a été publié en 2025 dans le Journal of Neuroimaging sous le titre Larger Perfusion Mismatch Volume is Associated with Longer Hospital Length of Stay in Medium Vessel Occlusion Stroke.
Méthodologie et résultats
Conception de l’étude
Cette étude est une analyse rétrospective basée sur des bases de données prospectives de deux centres complets de prise en charge des AVC. Les patients consécutifs répondant aux critères d’inclusion entre le 29 juillet 2019 et le 29 janvier 2023 ont été inclus. Les critères d’inclusion étaient : 1) une triage pour thrombectomie mécanique (mechanical thrombectomy, MT) dans les 24 heures suivant l’apparition des symptômes ou le dernier moment connu de bien-être ; 2) une imagerie CT multimodale pré-traitement adéquate (incluant un CT sans contraste, une angiographie CT et une perfusion CT) ; 3) un AIS dû à une MeVO confirmée par CTA/CTP dans la circulation antérieure.
Collecte des données
Les données de base et cliniques ont été collectées à partir des dossiers médicaux électroniques et des bases de données des centres de prise en charge des AVC. Ces données incluaient les informations démographiques, le score NIHSS (National Institutes of Health Stroke Scale) à l’admission, les comorbidités (comme l’hypertension, l’hyperlipidémie, le diabète) et le score ASPECTS (Alberta Stroke Program Early CT Score).
Analyse de l’imagerie de perfusion CT
Les images de perfusion CT ont été acquises à l’aide d’un scanner Siemens Somatum Force et traitées automatiquement avec le logiciel RAPID (version 5.9), approuvé par la FDA, pour générer des cartes de perfusion quantitatives. Toutes les images de perfusion CT ont été évaluées par des neuroradiologues certifiés pour garantir leur qualité diagnostique.
Analyse statistique
Les données ont été analysées avec IBM SPSS Statistics (version 22.0). Les variables continues ont été exprimées en médianes et intervalles interquartiles (IQR), tandis que les variables catégorielles ont été exprimées en fréquences. Des tests de Wilcoxon ou de chi-carré ont été utilisés pour comparer les données. Une régression multiple a été employée pour explorer la relation entre les paramètres de base et la durée d’hospitalisation.
Résultats principaux
L’étude a inclus 133 patients, avec un âge médian de 71 ans et 59,4 % de femmes. Le volume de mismatch de perfusion était significativement corrélé positivement avec la durée d’hospitalisation (r = 0,264, p = 0,004). Après ajustement pour l’âge, le sexe, l’hypertension, le diabète, les antécédents d’AVC ou d’accident ischémique transitoire (transient ischemic attack, TIA), le score NIHSS à l’admission, le score ASPECTS, le score TAN, la thrombolyse intraveineuse, la thrombectomie mécanique et la transformation hémorragique, un volume de mismatch plus important restait indépendamment associé à une durée d’hospitalisation plus longue (β = 0,209, IC à 95 % : 0,006–0,412, p = 0,045).
D’autres facteurs significativement associés à une durée d’hospitalisation plus longue incluaient le score NIHSS à l’admission (β = 0,250, IC à 95 % : 0,060–0,440, p = 0,010) et la thrombectomie mécanique (β = 0,208, IC à 95 % : 0,006–0,410, p = 0,044). Chez les patients ayant subi une thrombectomie mécanique, la corrélation entre le volume de mismatch de perfusion et la durée d’hospitalisation restait significative (β = 0,248, IC à 95 % : 0,019–0,471, p = 0,033), tandis que le score NIHSS à l’admission perdait sa signification (β = 0,208, IC à 95 % : 0,019–0,433, p = 0,071).
Conclusions et implications
Cette étude montre que, chez les patients atteints d’AIS-MeVO dans la circulation antérieure, en particulier ceux ayant subi une thrombectomie mécanique, le volume de mismatch de perfusion est un prédicteur indépendant de la durée d’hospitalisation. Cette découverte fournit des informations précieuses pour l’évaluation clinique et la prise de décision, notamment dans la sélection des indications pour la thrombectomie mécanique et l’élaboration des stratégies de traitement.
Points forts de l’étude
- Signification clinique du volume de mismatch de perfusion : Cette étude est la première à explorer systématiquement la valeur prédictive du volume de mismatch de perfusion dans les MeVO, comblant une lacune dans ce domaine de recherche.
- Relation entre la thrombectomie mécanique et la durée d’hospitalisation : L’étude a révélé que la thrombectomie mécanique était associée à une durée d’hospitalisation plus longue, probablement en raison de l’observation en soins intensifs postopératoires et de la gestion des transformations hémorragiques.
- Rôle prédictif du score NIHSS : La corrélation entre le score NIHSS à l’admission et la durée d’hospitalisation n’était plus significative après ajustement pour le volume de mismatch de perfusion, suggérant que ce dernier joue un rôle plus fondamental dans la prédiction de la durée d’hospitalisation.
Limites de l’étude
- Conception rétrospective : L’étude pourrait être sujette à un biais de sélection.
- Limites de l’échantillon : Seuls les patients atteints de MeVO dans la circulation antérieure ont été inclus, ce qui limite la généralisation des résultats à d’autres territoires artériels.
- Accessibilité de la perfusion CT : La disponibilité de la perfusion CT dans les petits hôpitaux et les établissements communautaires pourrait limiter l’applicabilité des résultats.
Perspectives futures
Des études prospectives à plus grande échelle sont nécessaires pour valider ces résultats et explorer davantage les critères d’éligibilité à la thrombectomie mécanique chez les patients atteints de MeVO, ainsi que pour optimiser les stratégies de soins post-AVC.