Résolution des structures natives des récepteurs GABAA du cerveau humain
Résolution des structures natives des récepteurs GABAA du cerveau humain : une étude révolutionnaire
Contexte académique
Les récepteurs GABAA (récepteurs de type A de l’acide γ-aminobutyrique) sont l’un des récepteurs inhibiteurs les plus importants du cerveau, responsables de la régulation de la transmission rapide des signaux inhibiteurs des neurones. Ces récepteurs sont non seulement des cibles clés pour le traitement de maladies telles que l’épilepsie, l’anxiété, la dépression et l’insomnie, mais ils sont également largement étudiés pour comprendre les mécanismes d’action des anesthésiques. Les récepteurs GABAA sont composés de 19 sous-unités différentes, formant des canaux ioniques pentamériques activés par des ligands. Bien que des études antérieures aient révélé une partie de la structure et de la fonction des récepteurs GABAA par expression recombinante et des modèles murins, la composition en sous-unités et la structure tridimensionnelle des récepteurs GABAA natifs dans le cerveau humain restent mal comprises. En particulier, la combinaison des sous-unités des récepteurs GABAA dans le cerveau humain est plus complexe que chez les rongeurs, et leurs interactions avec les protéines auxiliaires n’ont pas été suffisamment étudiées.
Pour résoudre ce problème, les chercheurs ont isolé des récepteurs GABAA contenant la sous-unité α1 à partir de tissus cérébraux réséqués de patients épileptiques et ont utilisé la cryo-microscopie électronique (cryo-EM) pour résoudre la structure tridimensionnelle de 12 récepteurs GABAA natifs. Cette étude a non seulement révélé la diversité des récepteurs GABAA dans le cerveau humain, mais a également découvert des sites d’action inattendus pour les médicaments antiépileptiques sur ces récepteurs, fournissant une base structurelle essentielle pour comprendre la transmission des signaux par les récepteurs GABAA et leur ciblage pharmacologique.
Source de l’article
Cet article a été co-écrit par Jia Zhou, Colleen M. Noviello, Jinfeng Teng, Haley Moore, Bradley Lega et Ryan E. Hibbs, issus d’institutions telles que l’Université de Californie à San Diego et le Centre médical Southwestern de l’Université du Texas. L’article a été publié en 2024 dans la revue Nature, sous le titre « Résolution des structures natives des récepteurs GABAA du cerveau humain ».
Méthodologie et résultats
1. Collecte et traitement des échantillons
L’équipe de recherche a obtenu des échantillons à partir de tissus cérébraux réséqués de 81 patients épileptiques, principalement issus des lobes temporal et frontal. Les échantillons ont été divisés en deux groupes : le premier groupe comprenait des tissus de 45 patients, et le second groupe, des tissus de 36 patients. Tous les échantillons ont été rapidement congelés après la résection pour préserver l’intégrité des structures protéiques.
2. Purification des récepteurs GABAA
Les chercheurs ont utilisé un fragment d’anticorps à haute affinité (Fab 1F4) ciblant la sous-unité α1 pour purifier les récepteurs GABAA contenant cette sous-unité à partir des tissus cérébraux. Au cours du processus de purification, un détergent (lauryl maltose neopentyl glycol, LMNG) a été utilisé pour maintenir les interactions entre les récepteurs et les protéines de liaison synaptique. Les récepteurs purifiés ont ensuite été reconstitués dans des nanodisques lipidiques pour permettre une analyse par cryo-microscopie électronique.
3. Collecte et traitement des données de cryo-EM
Les chercheurs ont utilisé la cryo-microscopie électronique pour imager les récepteurs GABAA purifiés à haute résolution. Grâce à des classifications en deux et trois dimensions, ils ont réussi à résoudre la structure tridimensionnelle de 12 combinaisons différentes de sous-unités des récepteurs GABAA. La résolution globale de ces structures variait entre 2,5 et 3,3 Å, suffisante pour distinguer les détails des différentes sous-unités.
4. Diversité des combinaisons de sous-unités
L’étude a révélé plusieurs combinaisons de sous-unités des récepteurs GABAA, la plus courante étant β2–α1–β2–α1–γ2. De plus, des combinaisons contenant les sous-unités α2, α3, β1, β3 et γ2 ont également été identifiées. Ces combinaisons mettent en évidence la grande diversité des récepteurs GABAA dans le cerveau humain, en particulier la participation de la sous-unité β3, qui n’avait pas été suffisamment rapportée dans les études précédentes.
5. Découverte des sites de liaison des médicaments
Au cours de la résolution des structures, les chercheurs ont observé des densités ressemblant à des médicaments à plusieurs interfaces de sous-unités. Des expériences supplémentaires ont montré que les médicaments antiépileptiques lamotrigine et lévétiracétam pouvaient se lier aux récepteurs GABAA et moduler leur fonction. En particulier, le site de liaison de la lamotrigine chevauche celui des benzodiazépines, offrant une nouvelle perspective sur son mécanisme d’action antiépileptique.
6. Interactions avec les protéines auxiliaires
Grâce à l’analyse par spectrométrie de masse et aux données de cryo-EM, les chercheurs ont également découvert des interactions entre les récepteurs GABAA et des protéines auxiliaires telles que la neuroligine 2 et la garlh4. Ces protéines auxiliaires jouent un rôle important dans la régulation de la localisation et de la fonction des récepteurs GABAA, révélant davantage la complexité des mécanismes de régulation des récepteurs au niveau synaptique.
Conclusions et implications de l’étude
Cette étude est la première à résoudre systématiquement la structure tridimensionnelle des récepteurs GABAA natifs dans le cerveau humain, révélant la diversité et la complexité de leurs combinaisons de sous-unités. L’étude fournit non seulement une base structurelle pour comprendre les mécanismes de transmission des signaux par les récepteurs GABAA, mais elle a également identifié de nouveaux sites d’action pour les médicaments antiépileptiques, ouvrant la voie à des stratégies de ciblage pharmacologique plus précises.
En outre, l’étude a mis en lumière les interactions des récepteurs GABAA avec des protéines auxiliaires, offrant une nouvelle perspective sur la régulation fonctionnelle des récepteurs au niveau synaptique. Ces découvertes ont une valeur scientifique significative et ouvrent de nouvelles directions pour le développement de médicaments et le traitement des maladies neurologiques.
Points forts de l’étude
- Première résolution de la structure tridimensionnelle des récepteurs GABAA natifs du cerveau humain : L’étude a révélé 12 combinaisons différentes de sous-unités, fournissant des données essentielles pour comprendre la diversité des récepteurs GABAA.
- Découverte de nouveaux sites d’action pour les médicaments antiépileptiques : Les sites de liaison de la lamotrigine et du lévétiracétam ont révélé des mécanismes d’action potentiels de ces médicaments.
- Mise en évidence des interactions des récepteurs GABAA avec des protéines auxiliaires : L’étude a identifié le rôle important de protéines auxiliaires telles que la neuroligine 2 et la garlh4 dans la régulation des fonctions des récepteurs.
- Application de la cryo-microscopie électronique à haute résolution : L’étude a démontré la puissance de la cryo-EM pour résoudre des structures protéiques complexes.
Autres informations utiles
L’étude a également révélé que les combinaisons de sous-unités des récepteurs GABAA variaient quelque peu entre les patients, ce qui pourrait être lié au sexe, à l’âge, à la durée de l’épilepsie et aux antécédents de traitement médicamenteux des patients. Les recherches futures pourraient explorer plus en détail l’impact de ces facteurs sur la structure et la fonction des récepteurs GABAA, ouvrant la voie à des traitements personnalisés.
Cette étude représente une avancée majeure dans la compréhension de la structure et de la fonction des récepteurs GABAA et ouvre de nouvelles perspectives pour le traitement des maladies neurologiques.