Réanalyse génomique d'une ressource européenne pour les maladies rares aboutit à de nouveaux diagnostics

Réanalyse des données génomiques des maladies rares en Europe : nouveaux diagnostics et perspectives futures

Contexte académique

Les maladies rares sont définies comme des affections qui touchent une faible proportion de la population, avec un seuil de moins de 50 personnes sur 100 000 dans l’Union européenne. Bien qu’il existe plus de 6 000 types de maladies rares, plus de 70 % d’entre elles sont d’origine génétique. Ces maladies constituent un fardeau majeur pour les individus et les systèmes de santé, affectant entre 3,5 % et 6,0 % des personnes au cours de leur vie. Malgré les avancées dans le séquençage du génome pour le diagnostic des maladies rares, de nombreux patients restent sans diagnostic moléculaire précis. Des études récentes ont montré que la réanalyse des données génomiques existantes peut conduire à de nouveaux diagnostics, notamment grâce à la découverte de nouveaux gènes impliqués dans les maladies et aux améliorations dans l’identification et l’interprétation des variants génomiques. Cependant, cette réanalyse n’est pas encore couramment pratiquée en raison des coûts élevés et des compétences pluridisciplinaires requises.

Pour répondre à ce défi, 37 centres d’expertise européens ont uni leurs forces au sein du consortium Solve-RD, visant à améliorer les taux de diagnostic des maladies rares par une réanalyse systématique. L’objectif principal était d’intégrer des données cliniques, généalogiques et génomiques pour créer un réseau collaboratif permettant de fournir de nouveaux diagnostics aux patients non diagnostiqués tout en proposant un modèle extensible pour des collaborations internationales futures.

Origine de l’article

Cette recherche a été réalisée par plus de 300 cliniciens, généticiens et chercheurs issus de plusieurs institutions prestigieuses, notamment le Radboud University Medical Center, le Centro Nacional de Análisis Genómico (CNAG) et l’Université de Tübingen. Parmi les auteurs principaux figurent Steven Laurie, Wouter Steyaert et Elke de Boer. L’étude a été publiée en février 2025 dans Nature Medicine, sous le titre “Genomic reanalysis of a pan-European rare-disease resource yields new diagnoses”.

Processus de recherche

1. Collecte des données et contrôle qualité

Le consortium Solve-RD a collecté des données génomiques provenant de 6 004 familles non diagnostiquées souffrant de maladies rares, issues de 12 pays européens et du Canada, représentant 6 449 patients et 3 196 proches non atteints. Les données comprenaient 554 génomes entiers et 9 722 exomes enrichis à l’aide de 28 kits différents et générés sur diverses plateformes de séquençage à lecture courte. Après un contrôle qualité rigoureux, 9 874 jeux de données ont été conservés (523 génomes entiers et 9 351 exomes).

2. Réanalyse systématique

L’étude a adopté un cadre de révision par deux niveaux d’experts incluant des experts en données et des experts cliniques. La réanalyse a couvert divers types de variants génomiques, notamment les variants nucléotidiques simples (SNV), les insertions/délétions courtes (indel), les variants d’épissage non canoniques, les variants mitochondriaux, les variations du nombre de copies (CNV), les variants structuraux (SV), les insertions d’éléments mobiles (MEI) et les expansions de répétitions en tandem courtes (STR). Chaque réseau européen de référence pour les maladies rares (ERN) a établi une liste de gènes spécifiques à ses pathologies, allant de 230 gènes (Genturis) à 1 820 gènes (RND).

3. Résultats diagnostiques

Grâce à la réanalyse systématique, l’équipe de recherche a identifié de nouveaux diagnostics génétiques chez 506 familles (8,4 %). Parmi les 552 variants pathogènes découverts, 84,1 % étaient des SNV ou indels, tandis que les 15,9 % restants correspondaient à d’autres types de variants identifiés via des analyses bioinformatiques. De plus, grâce à une révision experte ad hoc, 249 familles supplémentaires (4,1 %) ont été diagnostiquées, portant le taux global de diagnostic à 12,6 %.

4. Analyse des types de variants

Dans 419 familles, les SNV ou indels représentaient les principaux types de variants pathogènes (461 variants), dont 282 étaient dominants, 85 homozygotes récessifs, 76 composites hétérozygotes récessifs et 18 hémizygotes. En outre, l’étude a identifié 87 diagnostics causés par d’autres types de variants (tels que CNV, SV, MEI et STR), les CNV étant les plus fréquents (44 cas).

5. Actionnabilité clinique

La recherche a également examiné l’actionnabilité clinique des résultats, révélant que 73 patients (14,4 %) portaient des variants dans des gènes ayant un potentiel thérapeutique ou préventif. Ces gènes sont associés à divers traitements médicamenteux ou interventions préventives, certains cas ayant déjà bénéficié de traitements basés sur ces diagnostics.

Résultats principaux

  1. Découverte de nouveaux diagnostics : Grâce à la réanalyse systématique, l’équipe a identifié de nouveaux diagnostics génétiques chez 506 familles, impliquant 552 variants pathogènes. Parmi ceux-ci, 84,1 % étaient des SNV ou indels, tandis que 15,9 % concernaient d’autres types de variants.

  2. Diversité des types de variants : L’étude ne s’est pas limitée aux SNV et indels mais a également découvert divers types de variants rares tels que les CNV, SV, MEI et STR, responsables de diagnostics dans 87 familles.

  3. Actionnabilité clinique : L’étude souligne la valeur clinique des diagnostics obtenus, notant que 14,4 % des cas diagnostiqués avaient un potentiel thérapeutique ou d’intervention, certains cas ayant déjà bénéficié de traitements spécifiques.

Conclusion et signification

Cette recherche a permis, grâce à une réanalyse systématique des données génomiques, de fournir de nouveaux diagnostics génétiques à 12,6 % des familles non diagnostiquées. Elle illustre non seulement le potentiel de la réanalyse pour améliorer les taux de diagnostic, mais fournit également un cadre extensible pour les collaborations internationales futures. L’infrastructure et les réseaux collaboratifs mis en place par Solve-RD deviendront des ressources essentielles pour les recherches et diagnostics futurs sur les maladies rares.

Points forts de la recherche

  1. Collaboration à grande échelle : L’étude a impliqué 37 centres d’expertise européens, mettant en lumière l’importance des collaborations internationales dans la recherche sur les maladies rares.

  2. Analyse multi-types de variants : L’étude a exploré non seulement les SNV et indels mais aussi divers types de variants rares grâce à des outils bioinformatiques, élargissant ainsi le champ des diagnostics possibles.

  3. Actionnabilité clinique : L’étude met en avant la valeur clinique des diagnostics obtenus, offrant de nouvelles perspectives pour le traitement et la gestion des patients atteints de maladies rares.

Informations supplémentaires utiles

L’équipe de recherche a également formulé plusieurs recommandations pratiques, notamment la standardisation des données, l’intégration de pipelines d’appel de variants multiples et la mise à jour régulière des outils bioinformatiques. Ces recommandations serviront de référence importante pour les futures réanalyses génomiques des maladies rares.

À travers cette recherche, le consortium Solve-RD n’a pas seulement apporté de nouveaux espoirs aux patients atteints de maladies rares, mais il a également fourni des ressources et infrastructures précieuses à la communauté mondiale de recherche sur les maladies rares.