Mécanismes cérébraux sous-jacents au biais de traitement des émotions dans la dépression résistante au traitement

Étude des mécanismes cérébraux pour le traitement de l’humeur chez les patients souffrant de dépression hautement résistante au traitement

Introduction

La dépression est l’une des maladies mentales qui existent couramment dans la société moderne et qui ont un impact sérieux sur la santé mentale et physique des individus. Selon le modèle cognitif de Beck, le développement et le maintien de la dépression sont largement liés à l’acquisition et au traitement biaisés de l’information. De nombreuses études ont montré une tendance négative chez les patients dépressifs dans des domaines cognitifs tels que la perception, l’attention et la mémoire. Par exemple, les personnes dépressives ont tendance à interpréter un visage neutre comme un visage triste, un visage heureux comme un visage malheureux. Comprendre les mécanismes neuronaux du biais dans ces processus de traitement des stimuli émotionnels est important pour prédire, détecter et traiter la dépression.

Cependant, bien que l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) montre une réaction accrue du noyau amygdalien des patients dépressifs lors du traitement des visages tristes, et une réaction diminuée lors du traitement des visages heureux, ces études ont largement utilisé des méthodes à haute résolution spatiale mais à basse résolution temporelle, ou inversement, des méthodes à basse résolution spatiale mais à haute résolution temporelle (comme EEG, MEG). Par conséquent, il y a encore des lacunes dans notre compréhension des mécanismes neuronaux du biais de traitement des stimuli émotionnels dans la dépression.

Source de l’étude

Cet article a été écrit par Xiaoxu Fan, Madaline Mocchi, Bailey Pascuzzi, Jiayang Xiao et d’autres chercheurs des institutions comme Baylor College of Medicine, Swarthmore College, Washington University School of Medicine, University of California San Francisco, University of Texas Southwestern Medical Center. L’article a été publié dans la revue Nature Mental Health en mai 2024.

Procédure expérimentale et méthodes

Cette expérience vise à étudier les mécanismes neuronaux du biais de traitement des émotions chez les patients atteints de dépression résistante au traitement (TRD) en enregistrant l’électro-encéphalographie stéréotaxique (SEEG) avec une haute résolution spatiale et temporelle dans le cerveau humain. Les participants comprenaient 5 patients TRD et 12 patients épileptiques (groupe témoin). Au cours de l’expérience, les participants ont participé à une tâche de biais émotionnel, évaluant les visages heureux et tristes affichés à l’écran.

Étapes spécifiques

  1. Conception de l’expérience et tâche de stimulation

    • L’expérience a utilisé une tâche de biais émotionnel, qui comprend des visages déformés allant de l’intensité émotionnelle maximale à la neutralité (100% triste, 50% triste, 30% triste, 10% triste, neutre, 10% heureux, 30% heureux, 50% heureux et 100% heureux).
    • Les participants évaluaient l’intensité émotionnelle en cliquant sur un endroit sur une barre de défilement.
  2. Enregistrement des données

    • Le SEEG a été utilisé pour enregistrer les potentiels de champ local (LFP) de l’amygdale et du cortex préfrontal (PFC) des patients.
    • Dans le groupe TRD, un total de 180 points de contact ont été enregistrés dans le PFC, et 36 points de contact ont été enregistrés dans l’amygdale. Dans le groupe témoin, 119 points de contact ont été enregistrés dans le PFC et 52 points de contact ont été enregistrés dans l’amygdale.
  3. Traitement et analyse des données

    • Une analyse de la réponse évoquée potentielle intracérébrale (IEPR) a été réalisée dans le PFC et l’amygdale, révélant une différence significative entre les réponses IEPR de l’amygdale des deux groupes lors du traitement des visages émotionnels.

Principaux résultats expérimentaux

  1. Dynamique temporelle de la réponse de l’amygdale

    • Le pic de potentiel négatif a augmenté considérablement chez les patients TRD lorsqu’ils ont vu pour la première fois un visage triste (environ 300 ms), et cette réponse a diminué considérablement lors du traitement des visages heureux (environ 600 ms).
    • Cela suggère que lors du traitement initial du visage triste, il y a une augmentation de l’activation dans l’amygdale, impliquant un système de traitement ascendant hyperactif chez les patients TRD ; alors que lors des stades ultérieurs du traitement du visage heureux, l’inhibition de l’amygdale par le cortex préfrontal via les oscillations de la bande alpha pourrait contribuer à une diminution de la réponse amygdalienne.
  2. Activité en bande alpha dans le PFC

    • Comparé au groupe témoin, les patients TRD ont montré une augmentation significative de la puissance en bande alpha lors des stades ultérieurs du traitement du visage heureux.
    • Une analyse plus poussée a montré que dans le groupe TRD, la valeur de verrouillage de phase (PLV) en bande alpha entre le PFC et l’amygdale lors des stades ultérieurs du traitement des visages heureux était significativement plus élevée que dans le groupe témoin, indiquant que pendant cette phase du traitement des émotions, l’effet inhibiteur du PFC sur l’amygdale augmente chez les patients TRD.
  3. Effet de la stimulation cérébrale profonde (DBS) sur la réponse neuronale des patients TRD

    • Tous les 5 patients TRD ont à nouveau réalisé une tâche de biais émotionnel après avoir reçu une stimulation cérébrale profonde (DBS).
    • L’expérience a montré qu’après le DBS, la réponse IEPR de l’amygdale des patients TRD lors du traitement des visages heureux a considérablement augmenté, tandis que la puissance en bande alpha dans le PFC a considérablement diminué.
    • Ces changements indiquent que le DBS peut corriger le biais de traitement des émotions chez les patients TRD en améliorant la régulation du PFC sur l’amygdale.

Conclusion

Cette étude est la première à observer directement les mécanismes neuronaux spécifiques du biais de traitement des émotions chez les patients atteints de dépression résistante au traitement (TRD) à l’aide d’enregistrements SEEG à haute résolution spatiale et temporelle. Les résultats indiquent qu’il existe des mécanismes neuronaux distincts chez les patients TRD lors du traitement des stimuli émotionnels : une augmentation de l’activation ascendante lors du traitement des visages tristes et une augmentation de l’inhibition de l’amygdale par le cortex préfrontal via les oscillations de la bande alpha lors du traitement des visages heureux. Des recherches supplémentaires ont montré que la stimulation cérébrale profonde peut atténuer le biais de traitement des émotions chez les patients TRD en améliorant ces mécanismes neuronaux.

Importance et valeur de l’étude

  1. Importance scientifique

    • Fournit des preuves électrophysiologiques directes des mécanismes neuronaux du biais de traitement des émotions chez les patients TRD.
    • Clarifie les mécanismes neuronaux spécifiques entre l’amygdale et le cortex préfrontal à des stades distincts du traitement des stimuli émotionnels.
  2. Valeur d’application

    • Le potentiel de la stimulation cérébrale profonde (DBS) pour améliorer le biais de traitement des émotions chez les patients TRD offre de nouvelles perspectives pour le traitement clinique.
    • Comprendre la régulation du PFC sur l’amygdale peut aider à développer des méthodes de traitement plus efficaces pour la dépression.

Cette étude offre de nouvelles perspectives et une base électrophysiologique solide pour comprendre et traiter la dépression résistante au traitement. Elle souligne les mécanismes neuronaux spécifiques impliqués dans le traitement de différents stimuli émotionnels et leur application potentielle dans le traitement de la dépression.