Thalamotomie par ultrasons focalisés guidée par résonance magnétique rééquilibre la hiérarchie fonctionnelle atypique chez les patients atteints de tremblement essentiel

Étude sur le traitement par ultrasons focalisés guidés par résonance magnétique (MRgFUS) de tremblements essentiels réfractaires aux médicaments : remodelage de la hiérarchie fonctionnelle

Les tremblements essentiels (Essential Tremor, ET) constituent un trouble moteur fréquent, caractérisé par des tremblements involontaires des membres, particulièrement perceptibles lors de l’exécution de tâches spécifiques. Bien que les traitements conventionnels, tels que la médication et la stimulation cérébrale profonde (DBS), aient démontré une certaine efficacité dans la gestion des symptômes, les options thérapeutiques demeurent limitées pour les patients souffrant de tremblements essentiels réfractaires aux médicaments. Cet article explore les impacts du traitement par ultrasons focalisés guidés par résonance magnétique (MRgFUS) sur les cadres fonctionnels cérébraux et la hiérarchie fonctionnelle des patients, afin de mieux comprendre ses mécanismes et sa valeur thérapeutique.


Contexte de l’étude et objectifs

Le mécanisme pathologique des tremblements essentiels reste mal compris. L’une des caractéristiques principales de cette maladie est l’altération de la connectivité fonctionnelle cérébrale. Des études antérieures ont montré que l’organisation fonctionnelle du cerveau humain suit généralement des principes stricts de hiérarchie, lesquels sont souvent perturbés dans les maladies neurologiques. Avec l’émergence des technologies MRgFUS, il est désormais possible de réaliser une thalamotomie de précision sans craniotomie, anesthésie ou radiation ionisante, réduisant considérablement les tremblements et obtenant l’approbation de la FDA américaine pour le traitement des tremblements essentiels. Cependant, les effets de cette technique, qui entraîne des dommages irréversibles au thalamus, sur l’organisation fonctionnelle globale du cerveau suscitent des inquiétudes.

L’objectif de cette étude est d’examiner les changements dans les cadres fonctionnels cérébraux après une thalamotomie par MRgFUS chez des patients souffrant de tremblements essentiels, à travers une analyse des gradients fonctionnels, et d’explorer les mécanismes neuropathophysiologiques sous-jacents.


Conception et méthodes de l’étude

Sources de données et caractéristiques des patients

Cette étude rétrospective a analysé les données de 30 patients traités par thalamotomie MRgFUS à l’hôpital général de l’APL en Chine entre 2018 et 2020. Les données incluent des images par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) acquises avant l’intervention et six mois après. Les patients, âgés en moyenne de 62 ans avec une durée de maladie de 18 ans, étaient majoritairement des hommes (21 sur 30), et 70 % d’entre eux avaient des antécédents familiaux de tremblements essentiels. Un groupe témoin sain de 30 individus appariés par âge, sexe et niveau d’éducation, ainsi qu’un second groupe sain non apparié, ont été inclus pour les analyses comparatives.

Procédures expérimentales

  1. Acquisition et prétraitement des données IRMf
    Les données IRMf de repos ont été acquises avec un scanner IRM 3T, puis prétraitées (normalisation spatiale, lissage, suppression du bruit, etc.). Les réseaux fonctionnels ont été construits pour chaque participant, et des outils de réduction dimensionnelle ont été utilisés pour extraire les principaux composants des gradients fonctionnels.

  2. Analyse des gradients fonctionnels
    Les gradients fonctionnels reflètent les transitions progressives dans la connectivité fonctionnelle. L’étude s’est concentrée sur les deux principaux gradients, correspondant aux axes de connectivité visuel-DMN (VIS-DMN) et somatosensoriel-DMN (SM-DMN).

  3. Association des gradients fonctionnels avec les symptômes de tremblements
    Des modèles d’apprentissage supervisé, tels que la régression linéaire et la régression par vecteurs de support, ont été utilisés pour explorer les relations entre les caractéristiques des gradients et les scores cliniques de tremblements (échelle CRST).

  4. Analyse des mécanismes neuropathophysiologiques
    Les données transcriptomiques de l’Atlas Allen du cerveau humain ont été utilisées pour explorer les mécanismes biologiques sous-jacents aux changements observés dans les gradients fonctionnels.


Résultats principaux

1. Amélioration des tremblements et remodelage des gradients fonctionnels

La thalamotomie MRgFUS a permis une réduction significative des tremblements : le score total CRST est passé de 56,7 avant l’opération à 22,93 six mois après l’opération, soit une amélioration de 78,19 %. Des modifications significatives des gradients fonctionnels ont été observées, avec une réduction notable de la variance expliquée par le gradient 2 (23 % à 19 %, $p,001$).

2. Récupération régionale des gradients fonctionnels

Les analyses ont révélé une restauration significative des caractéristiques du gradient 2 dans le cortex cingulaire postérieur (PCC) après l’intervention. Cette restauration est corrélée à une amélioration des déséquilibres fonctionnels entre les réseaux DMN, SM et VIS.

3. Prédiction des symptômes et des résultats cliniques

Les caractéristiques des gradients fonctionnels ont permis de prédire avec précision les scores CRST-B (r=0,45, $p=0,006$). Les gradients du DMN, en particulier dans le PCC, se sont avérés les plus pertinents pour prédire les améliorations cliniques après l’intervention.

4. Mécanismes neuropathophysiologiques sous-jacents

L’analyse des enrichissements génétiques a révélé que les changements de gradients étaient associés à des voies biologiques liées à la maladie de Parkinson et à la phosphorylation oxydative. Ces résultats soutiennent l’hypothèse d’une association entre les tremblements essentiels et les altérations mitochondriales.


Signification clinique et perspectives futures

Cette étude met en lumière le mécanisme fonctionnel de la thalamotomie MRgFUS : en rétablissant l’équilibre fonctionnel entre les réseaux DMN, SM et VIS, cette technique réduit efficacement les symptômes des tremblements. Les découvertes fournissent une base scientifique pour optimiser la MRgFUS tout en offrant de nouvelles perspectives sur la dynamique cérébrale dans les troubles moteurs.

Cependant, des limites subsistent, notamment la taille restreinte de l’échantillon, la durée limitée du suivi (6 mois) et les contraintes technologiques des scanners IRM. Des études longitudinales à plus grande échelle et l’utilisation de scanners à champ magnétique élevé (7T) pourraient approfondir notre compréhension des mécanismes en jeu.


En conclusion, la thalamotomie MRgFUS représente une avancée prometteuse dans le traitement des tremblements essentiels. Elle ouvre également de nouvelles voies de recherche sur les mécanismes neurodynamiques et les biomarqueurs potentiels des troubles moteurs.