Mise en œuvre de l'outil d'auto-débriefing clinique TALK dans les salles d'opération : une étude interventionnelle monocentrique
Mise en œuvre de l’outil de débriefing clinique TALK dans les blocs opératoires : une étude interventionnelle monocentrique
Contexte académique
Le bloc opératoire est un environnement complexe et à haut risque où les équipes doivent adopter des comportements de sécurité pour garantir les meilleurs résultats pour les patients. Le débriefing clinique est un élément essentiel des pratiques de sécurité en salle d’opération, permettant aux cliniciens de réfléchir à leurs pratiques quotidiennes, d’apprendre et de s’améliorer. Bien que le débriefing soit largement reconnu pour améliorer les performances des équipes et les résultats des patients, il n’est toujours pas une pratique courante dans les environnements opératoires. Les obstacles précédemment identifiés incluent le manque de temps et de structure, les conflits de priorités, le manque de leadership et le soutien organisationnel insuffisant.
Pour répondre à ces problèmes, TALK (Talk to Learn and Improve Together) a été proposé comme une méthode simple et largement applicable de débriefing d’équipe. TALK vise à favoriser l’apprentissage et l’amélioration des équipes par des conversations de débriefing quotidiennes, en mettant l’accent sur l’apprentissage à partir des pratiques quotidiennes plutôt que seulement des erreurs. Cette étude vise à explorer les changements de comportement des équipes après l’introduction de l’outil TALK dans les environnements opératoires, ainsi que la considération et l’exécution du débriefing.
Source de l’article
Cet article a été co-écrit par Cristina Diaz-Navarro, Iago Enjo-Perez, Esther Leon-Castelao, Andrew Hadfield, Jose M. Nicolas-Arfelis et Pedro Castro-Rebollo. Les auteurs sont affiliés à des institutions telles que le Cardiff and Vale University Health Board au Royaume-Uni, l’Universitat de Barcelona en Espagne, l’Hospital Clinic Barcelona et l’Institut d’Investigacions Biomèdiques August Pi i Sunyer (IDIBAPS). L’article a été publié le 29 juillet 2024 dans le British Journal of Anaesthesia.
Processus de recherche
Conception de l’étude
Cette étude est une étude interventionnelle visant à explorer les changements de comportement des équipes après l’introduction de l’outil TALK dans les environnements opératoires. L’étude a été menée à l’hôpital universitaire du Pays de Galles (University Hospital of Wales) au Royaume-Uni, sur une période de 18 mois. L’objectif principal était d’évaluer l’impact de l’outil TALK sur la considération et l’exécution du débriefing par les équipes.
Sujets de l’étude
L’étude a inclus 460 listes chirurgicales (surgical lists), couvrant les interventions chirurgicales programmées du lundi au vendredi. Chaque liste chirurgicale était réalisée par la même équipe le matin, l’après-midi ou toute la journée. Les équipes comprenaient généralement au moins un chirurgien, deux infirmières de bloc opératoire, un assistant de bloc, un anesthésiste et un assistant anesthésiste. Les listes d’urgence ont été exclues en raison de la variation fréquente de la composition des équipes.
Interventions
L’introduction de l’outil TALK comprenait quatre étapes : 1) établir un objectif de discussion ; 2) analyser le thème convenu ; 3) identifier les points d’apprentissage ; 4) convenir des actions clés pour améliorer et maintenir les soins aux patients. L’équipe de recherche a promu l’outil TALK par le biais de discussions informelles avec les équipes, d’envois d’e-mails, de sessions de formation standardisées et de la fourniture d’outils cognitifs (comme des affiches et des cartes).
Collecte et analyse des données
La collecte des données a eu lieu avant l’intervention, puis à 1 semaine, 3 mois, 6 mois, 12 mois et 18 mois après l’intervention. L’équipe de recherche a utilisé un questionnaire structuré pour interroger les équipes chirurgicales, évaluant leur conformité aux “Cinq étapes pour une chirurgie plus sûre” (Five Steps to Safer Surgery), en particulier la considération et l’exécution du débriefing. Les données ont été analysées à l’aide de tests du chi carré et de Fisher pour les données non paramétriques.
Résultats principaux
Considération et exécution du débriefing
Avant l’intervention, 35,6 % des équipes avaient envisagé un débriefing. Après l’intervention, ce pourcentage a augmenté de manière significative, atteignant jusqu’à 97,4 %. Le taux d’exécution du débriefing est également passé de 23,3 % à 39 % après 6 mois. Cependant, après 6 mois, le taux d’exécution a diminué, bien qu’il soit resté supérieur au niveau de base.
Actions d’amélioration lors du débriefing
Après l’intervention, les actions d’amélioration convenues lors du débriefing ont augmenté de manière significative, passant de 17,6 % à 70 % après 6 mois. Ces actions se sont étendues de l’optimisation des équipements à la communication, l’efficacité des équipes et la prise de décision partagée.
Obstacles au débriefing
Le principal obstacle au débriefing était le “manque de problèmes à discuter”, représentant plus de 85 % des cas. D’autres obstacles incluaient les contraintes de temps et le manque d’engagement. Après l’intervention, les obstacles au débriefing ont diminué de manière significative.
Composition et leadership des équipes
Après l’intervention, la participation des infirmières et des professionnels de santé paramédicaux au débriefing a augmenté de manière significative, et ces professionnels ont davantage initié et dirigé les séances de débriefing.
Conclusion
Cette étude a démontré que l’introduction de l’outil TALK dans les environnements opératoires a entraîné des changements significatifs dans le comportement des équipes, en particulier en ce qui concerne la considération et l’exécution du débriefing. Bien que le taux d’exécution du débriefing ait diminué après 6 mois, il est resté supérieur au niveau de base. L’introduction de l’outil TALK a favorisé une plus grande attention portée au débriefing et a augmenté la proportion d’actions d’amélioration convenues lors des séances de débriefing.
Points forts de l’étude
- Augmentation significative du débriefing : L’introduction de l’outil TALK a considérablement augmenté la considération et l’exécution du débriefing par les équipes.
- Élargissement des actions d’amélioration : Les actions d’amélioration convenues lors du débriefing se sont étendues à la communication, l’efficacité des équipes et la prise de décision partagée.
- Participation accrue des infirmières et des professionnels paramédicaux : Après l’intervention, les infirmières et les professionnels paramédicaux ont joué un rôle plus important dans le débriefing, réduisant les gradients hiérarchiques traditionnels.
Importance et valeur de l’étude
Cette étude fournit un soutien empirique à l’introduction de l’outil TALK dans les environnements opératoires, démontrant son potentiel pour favoriser l’apprentissage et l’amélioration des équipes. La simplicité et l’applicabilité large de l’outil TALK le rendent facile à adopter dans d’autres établissements de santé. De plus, l’étude met en lumière le rôle crucial des infirmières et des professionnels paramédicaux dans le débriefing, offrant de nouvelles perspectives pour la collaboration des équipes et l’amélioration de la sécurité des patients.
Directions futures de recherche
Les recherches futures pourraient explorer comment maintenir le taux d’exécution du débriefing grâce à des interventions de renforcement et évaluer l’impact à long terme du débriefing sur les résultats des patients. De plus, des études pourraient être étendues aux équipes d’urgence et de chirurgie cardiaque pour valider l’applicabilité de l’outil TALK dans différents environnements chirurgicaux.
Grâce à cette étude, l’outil TALK a démontré son potentiel pour favoriser l’apprentissage et l’amélioration des équipes dans les environnements opératoires, offrant un nouvel outil et une nouvelle méthode pour améliorer la sécurité des patients à l’avenir.