Comparaison de la survie à long terme de la thérapie néoadjuvante plus chirurgie par rapport à la chirurgie initiale et au rôle de la thérapie adjuvante pour le cancer de l'œsophage T1b-2N0-1 : une étude de population basée sur la base de données SEER et une cohorte chinoise
Étude comparative des stratégies de traitement du cancer de l’œsophage
Contexte académique
Le cancer de l’œsophage est l’une des tumeurs du système digestif ayant une incidence et une mortalité élevées à l’échelle mondiale, en particulier en Asie, où l’incidence du carcinome épidermoïde de l’œsophage (Squamous Cell Carcinoma, SCC) est particulièrement marquée. Bien que des progrès aient été réalisés ces dernières années dans le diagnostic et le traitement du cancer de l’œsophage, les stratégies de traitement pour le cancer de l’œsophage précoce (stade T1b-2N0-1) restent controversées. Actuellement, les principales options de traitement incluent la chirurgie seule (Surgery Alone, SA), la chirurgie associée à un traitement adjuvant (Surgery plus Adjuvant Therapy, ST) et le traitement néoadjuvant associé à la chirurgie (Neoadjuvant Therapy plus Surgery, NS). Cependant, l’efficacité de ces approches en termes de survie spécifique au cancer (Cancer-Specific Survival, CSS) et de survie globale (Overall Survival, OS) n’est pas encore clairement établie.
Afin de clarifier l’impact des différentes stratégies thérapeutiques sur la survie à long terme des patients atteints d’un cancer de l’œsophage précoce, une équipe de recherche de l’Hôpital populaire de l’Université de Wuhan et de l’Hôpital Zhongnan de l’Université de Wuhan a mené une étude rétrospective basée sur la base de données SEER et une cohorte chinoise. Cette étude visait à comparer les effets des trois approches thérapeutiques (NS, SA et ST) sur la CSS et l’OS des patients atteints d’un cancer de l’œsophage de stade T1b-2N0-1, et à développer un nomogramme pour prédire l’OS, afin d’aider les cliniciens à personnaliser les plans de traitement.
Source de l’article
Cette étude a été réalisée par Lingling Xia, Wei Shi, Yuxin Cai, Zhengkai Liao, Zhen Huang, Hu Qiu, Jing Wang et Yongshun Chen du Centre de cancérologie de l’Hôpital populaire de l’Université de Wuhan. L’article a été publié en ligne le 26 juin 2024 dans la revue International Journal of Surgery, sous le titre Comparison of Long-Term Survival of Neoadjuvant Therapy Plus Surgery Versus Upfront Surgery and the Role of Adjuvant Therapy for T1b-2N0-1 Esophageal Cancer: A Population Study of the SEER Database and Chinese Cohort.
Méthodologie et résultats
1. Population étudiée et sources de données
Les données de l’étude proviennent de la base de données SEER du National Cancer Institute des États-Unis, ainsi que des cohortes chinoises de l’Hôpital populaire de l’Université de Wuhan et de l’Hôpital Zhongnan de l’Université de Wuhan. La base de données SEER couvre les patients diagnostiqués avec un cancer de l’œsophage de stade T1b-2N0-1 entre 2004 et 2019, tandis que la cohorte chinoise inclut des patients ayant subi une chirurgie entre janvier 2014 et mars 2022, avec un suivi jusqu’en octobre 2023. Au total, 584 patients de la base de données SEER et 323 patients de la cohorte chinoise ont été inclus dans l’étude.
2. Méthodes de recherche
L’étude a utilisé la méthode d’appariement par score de propension (Propensity Score Matching, PSM) pour réduire les différences entre les groupes. Les courbes de survie ont été tracées à l’aide de la méthode de Kaplan-Meier et comparées à l’aide du test du log-rank. Le modèle de régression des risques proportionnels de Cox a été utilisé pour analyser les facteurs pronostiques. De plus, un nomogramme pour prédire l’OS a été développé, et ses performances ont été évaluées à l’aide de l’indice de concordance de Harrell (C-index), de l’aire sous la courbe ROC (AUC), des courbes de calibration et de l’analyse de la courbe de décision (Decision Curve Analysis, DCA).
3. Résultats principaux
a) Comparaison entre le traitement néoadjuvant associé à la chirurgie (NS) et la chirurgie seule (SA)
Dans la base de données SEER, après analyse PSM, les taux de CSS et d’OS à 3 ans dans le groupe NS étaient respectivement de 80,3 % et 75,8 %, significativement plus élevés que ceux du groupe SA (62,1 % et 55,5 % ; p=0,016 et p=0,006). Cela indique que le traitement NS améliore significativement la survie à long terme des patients atteints d’un cancer de l’œsophage de stade T1b-2N0-1.
b) Comparaison entre le traitement néoadjuvant associé à la chirurgie (NS) et la chirurgie associée à un traitement adjuvant (ST)
Après analyse PSM, aucune différence significative n’a été observée entre les groupes NS et ST pour les taux de CSS et d’OS à 3 ans, qui étaient respectivement de 71,3 % contre 68,3 % (p=0,560) et de 69,8 % contre 62,9 % (p=0,330). Cela suggère que les effets du NS et du ST sur l’amélioration de la survie des patients sont similaires.
c) Comparaison entre la chirurgie seule (SA) et la chirurgie associée à un traitement adjuvant (ST)
Après analyse PSM, aucune différence significative n’a été observée entre les groupes SA et ST pour les taux de CSS et d’OS à 3 ans, qui étaient respectivement de 54,6 % contre 66,7 % (p=0,220) et de 50,2 % contre 57,9 % (p=0,290). Cependant, une analyse de sous-groupes a montré que pour les patients avec des ganglions lymphatiques positifs (stade N1), la CSS du groupe ST était significativement meilleure que celle du groupe SA (HR=0,56, IC à 95 % : 0,32-0,98, p=0,044).
4. Développement et validation du nomogramme
Un nomogramme pour prédire l’OS des patients atteints d’un cancer de l’œsophage de stade T1b-2N0-1 a été développé, intégrant cinq variables clinicopathologiques : le stade T, le stade N, l’âge, le nombre de ganglions lymphatiques examinés et le mode de traitement. Le C-index du nomogramme était de 0,648, 0,663 et 0,666 respectivement dans le groupe d’entraînement, le groupe de validation externe 1 et le groupe de validation externe 2, démontrant une bonne performance prédictive. Les valeurs AUC à 1 an, 3 ans et 5 ans étaient respectivement de 0,659, 0,639 et 0,612 dans le groupe d’entraînement, de 0,786, 0,758 et 0,692 dans le groupe de validation 1, et de 0,805, 0,760 et 0,693 dans le groupe de validation 2.
Conclusions et implications
La principale conclusion de cette étude est que, pour les patients atteints d’un cancer de l’œsophage de stade T1b-2N0-1, le traitement néoadjuvant associé à la chirurgie (NS) améliore significativement la survie à long terme par rapport à la chirurgie seule (SA), mais ne montre pas d’avantage significatif par rapport à la chirurgie associée à un traitement adjuvant (ST). De plus, pour les patients avec des ganglions lymphatiques positifs, le traitement adjuvant postopératoire (ST) apporte un bénéfice de survie.
Cette étude apporte de nouvelles preuves à l’appui des stratégies de traitement du cancer de l’œsophage précoce, en particulier concernant la valeur du traitement adjuvant pour les patients avec des ganglions lymphatiques positifs. En outre, le nomogramme développé fournit un outil pratique pour aider les cliniciens à personnaliser les décisions thérapeutiques.
Points forts de l’étude
- Avantage significatif du traitement néoadjuvant : Le traitement NS améliore significativement la CSS et l’OS des patients atteints d’un cancer de l’œsophage de stade T1b-2N0-1, en particulier chez les patients de stade T2 et N1.
- Valeur du traitement adjuvant : Pour les patients avec des ganglions lymphatiques positifs, le traitement adjuvant postopératoire (ST) améliore significativement la CSS.
- Application clinique du nomogramme : Le nomogramme développé montre une bonne performance prédictive et peut aider les cliniciens à évaluer le risque d’OS des patients et à personnaliser les plans de traitement.
Autres informations pertinentes
L’étude a également révélé, grâce à une analyse de sous-groupes, que des facteurs tels que la taille de la tumeur, le grade et l’infiltration vasculaire sont liés de manière croisée à la survie des patients. Ces découvertes ouvrent de nouvelles perspectives pour l’étude des facteurs pronostiques du cancer de l’œsophage.
Cette étude fournit des preuves cliniques importantes pour les stratégies de traitement du cancer de l’œsophage précoce et jette les bases pour des essais cliniques randomisés prospectifs futurs.