Dynamique simultanée, à l'échelle du cortex, de jusqu'à 1 million de neurones révèle une échelle illimitée de la dimensionnalité avec le nombre de neurones

L’enregistrement simultané jusqu’à un million de neurones révèle une scalabilité infinie entre le nombre de neurones et la dimensionalité cérébrale

Résumé de l’article

Cet article intitulé « L’enregistrement simultané jusqu’à un million de neurones révèle une scalabilité infinie entre le nombre de neurones et la dimensionalité cérébrale » est publié dans la revue Neuron (vol. 112, pp. 1694-1709). Écrit par Jason Manley, Sihao Lu, Kevin Barber, Jeffrey Demas, Hyewon Kim, David Meyer, Francisca Martínez Traub et Alipasha Vaziri, l’article a été publié le 15 mai 2024 et est le fruit d’une recherche conjointe entre Rockefeller University et The Kavli Neural Systems Institute. Cette étude explore en profondeur la relation entre la dynamique de la dimensionalité neuronale et le nombre de neurones, révélant ainsi les mécanismes computationnels neuronaux.

Introduction

Les groupes de neurones ne sont pas considérés comme des processeurs indépendants mais comme des unités étroitement interconnectées soutenant ensemble des comportements adaptatifs et orientés objectifs. Par le passé, en raison de limitations techniques, les enregistrements étaient généralement limités à un petit nombre de neurones, conduisant à l’élaboration de paradigmes clés basés sur les caractéristiques mesurables des neurones individuels. Les cadres théoriques visaient à inférer comment les réponses monocellulaires émergeaient de circuits neuronaux à grande échelle non observables. Grâce aux avancées des technologies d’enregistrement à grande échelle des neurones, il est devenu possible de surveiller l’activité de grands groupes de neurones chez des animaux en comportement.

L’utilisation étendue des techniques de réduction de dimensionalité a montré que la dynamique neuronale peut être approximée par des signaux “latents” de basse dimension, reflétant le calcul neuronal. Cependant, est-il possible d’expliquer véritablement la large gamme d’activités cérébrales par cette représentation de faible dimension ? Si ce n’est pas le cas, quelle est la résolution et l’échelle d’enregistrement adéquates pour capturer ces activités ?

Méthodologie de recherche

Dans cette étude, les auteurs ont utilisé une technique appelée microscopie à billes lumineuses (microscopy light beads, LBM) pour enregistrer la dynamique de jusqu’à un million de neurones dans le cortex de souris. Dans cette technique, l’activité fluorescente des neurones dans un champ tridimensionnel est capturée par une matrice de 30 points d’excitation biphotonique distincts dans l’axe et dans le temps. Ces billes lumineuses capturent intensivement l’activité neuronale dans la portée axiale pour fournir une acquisition optimale en termes de spatialité et de temporalité, limitée seulement par la durée de vie de la fluorescence des indicateurs de calcium codés par gène. Les sujets étaient des souris transgéniques exprimant gcamp6s ou gcamp6f.

Résultats de la recherche

La recherche a révélé que la dimensionalité dynamique des clusters neuronaux présente une relation de puissance scaling infinie en fonction du nombre de neurones. Bien que 50% de la variance des neurones soit contenue dans 16 dimensions associées au comportement, ces dimensions ne sont pas liées à des indicateurs immédiats de comportement ou de sensations. Les composantes de haute dimension révèlent une structure temporelle unique, couvrant des échelles allant de secondes à la limite de la résolution temporelle. De plus, ces activités de haute dimension sont presque orthogonales aux motifs induits par les sensations, suggérant que ces dimensions expliquent des calculs neuronaux déconnectés des sensations ou comportements immédiats.

Plus précisément, les auteurs ont utilisé une méthode d’analyse des composantes de variance partagée (SVCA) pour séparer les enregistrements du cortex de l’ensemble des neurones et déterminer les dimensions linéaires des deux groupes d’activités neuronales, appelées composantes de variance partagée (SVC). En utilisant la covariance de ces dimensions pour les tests de fiabilité, les auteurs ont trouvé que la méthode SVCA séparait plus précisément les signaux biologiquement significatifs que les techniques traditionnelles de réduction de la dimensionalité.

Par une analyse SVCA des enregistrements du cortex semi-sphérique comprenant 146,741 neurones, les auteurs ont découvert que la dimensionalité augmentait suivant une loi de puissance jusqu’à la quantité maximale de groupes de neurones observables, et ce dans différentes distributions affines et densités d’enregistrement. Ce résultat suggère que, indépendamment de la stratégie d’échantillonnage, la dimensionalité du cortex dépend principalement du nombre de neurones enregistrés plutôt que de leur distribution spatiale dans le volume ou la région corticale.

Signification de l’étude

Les conclusions de l’étude soulignent la haute dimensionalité des calculs neuronaux, mettant en évidence l’importance des technologies d’enregistrement à grande échelle et au niveau cellulaire pour révéler le substrat complet du calcul neuronal. Cela signifie que pour comprendre la dynamique haute dimensionnelle du cortex, il est nécessaire d’observer l’activité neuronale à une échelle plus grande. Bien que plus de 90% des dimensions neuronales fiables ne soient pas liées au comportement immédiat des animaux, cela ne signifie pas que ces dimensions élevées sont inutiles pour la fonction neuronale. Les résultats indiquent également que les méthodes traditionnelles basées sur la variance pourraient sérieusement sous-estimer la dimensionalité neuronale, mettant en évidence le besoin d’enregistrements à grande échelle supplémentaires.

En comprenant les propriétés dimensionnelles de ces hautes dimensions, les scientifiques peuvent explorer plus avant comment les circuits neuronaux codent et traitent l’information. En outre, les nouvelles techniques et méthodes utilisées dans cet article pourraient ouvrir de nouvelles voies pour étudier comment des états internes tels que l’attention, la motivation, la faim ou la peur influencent le calcul neuronal.

Cette étude offre non seulement une nouvelle perspective sur le calcul neuronal mais démontre également la nécessité future de combiner une haute dimensionalité et des enregistrements cellulaires à grande échelle pour comprendre comment le cerveau traite des informations complexes.