Rendement de l'imagerie non invasive dans l'épilepsie focale négative en IRM

Étude de l’utilité clinique de l’imagerie non invasive dans l’épilepsie focale négative à l’imagerie par résonance magnétique

Contexte académique

La chirurgie de l’épilepsie est une méthode importante pour traiter l’épilepsie pharmacorésistante. Cependant, en l’absence de lésions détectées par imagerie par résonance magnétique (IRM), les chances d’obtenir une bonne efficacité postopératoire diminuent de manière significative. Des études antérieures ont montré que seulement 30% à 50% des patients atteints d’épilepsie négative à l’IRM peuvent obtenir des résultats satisfaisants de grade I-II selon la classification de la Ligue Internationale Contre l’Épilepsie (ILAE) après la chirurgie. Le succès chirurgical chez ces patients repose principalement sur diverses techniques d’imagerie non invasive telles que la tomographie par émission de positons (TEP), la technique SPECT interictale soustractive co-enregistrée à l’IRM (SISCOM), l’imagerie des sources électriques (ESI) et l’analyse morphologique de l’IRM (MAP). L’objectif principal de cette étude est d’identifier une ou plusieurs combinaisons optimales de techniques d’imagerie afin d’améliorer les résultats chirurgicaux chez les patients atteints d’épilepsie focale négative à l’IRM.

Source de l’étude

Cet article a été rédigé par Christian Czarnetzki, Laurent Spinelli, Hans-Jürgen Huppertz, Karl Schaller, Shahan Momjian, Johannes Lobrinus, Maria-Isabel Vargas, Valentina Garibotto, Serge Vulliemoz et Margitta Seeck, dont les auteurs appartiennent respectivement aux départements des neurosciences cliniques, faculté de médecine des Hôpitaux Universitaires de Genève, et la Clinique Lengg de Zurich, Suisse. Cette étude a été reçue le 5 juin 2023, révisée le 2 septembre 2023, acceptée le 4 septembre 2023, et publiée en ligne dans le Journal of Neurology le 1er novembre 2023.

Méthodologie

Sélection des cas

Cette étude a sélectionné des patients atteints d’épilepsie pharmacorésistante évalués entre 2000 et 2018 aux Hôpitaux Universitaires de Genève. Les critères d’inclusion étaient : épilepsie focale unique (indiquée par EEG et symptomatologie), absence de lésions à l’IRM, ayant subi une chirurgie de résection et ayant été suivis pendant au moins 2 ans. Les critères d’exclusion comprenaient les épilepsies diffuses ou multifocales, chirurgie palliative, suivi inférieur à 2 ans, ou épilepsie causée par des raisons génétiques ou auto-immunes.

Techniques d’imagerie

Scintigraphie TEP au repos : Utilisation du 2-[18F]fluoro-2-désoxy-D-glucose (FDG) pour la scintigraphie TEP au repos. Chaque patient a reçu une injection de 200-250 MBq dans une pièce calme et sombre, avec 30 minutes de repos avant la scintigraphie, accompagnée d’une surveillance EEG pour exclure des crises non cliniques potentielles.

Scintigraphie SPECT en période de crise : Utilisation du 99mTc marqué par la Méthylène-oxy-héxane-acétamide (HMPAO) ou l’éthyl-cystéine dimère (ECD) pour la scintigraphie SPECT. Les scintigraphies ont été réalisées entre 30 et 120 minutes après l’injection. La technique de soustraction (SISCOM) a été utilisée pour identifier la région de surperfusion maximale.

Imagerie des sources électriques (ESI) : Reconstruction de l’activité cérébrale basée sur les enregistrements d’électrodes de surface du cuir chevelu, utilisant des électrodes à haute densité pour des enregistrements allant jusqu’à 12 heures.

Analyse morphologique de l’IRM (MAP) : Analyse morphologique tridimensionnelle de l’IRM utilisant le logiciel SPM12 pour détecter les caractéristiques IRM des dysplasies corticales locales.

Analyse statistique

Les performances de chaque technique d’imagerie ont été évaluées à l’aide de mesures telles que la précision, la sensibilité, la spécificité, la valeur prédictive positive (VPP) et la valeur prédictive négative (VPN). Les résultats des tests d’imagerie ont été comparés entre les patients ayant un contrôle complet des crises postopératoires (grade I-II de l’ILAE) et ceux avec un résultat moins favorable (grade III-VI de l’ILAE), permettant de calculer les ratios de cotes (OR) de chaque méthode.

Résultats de l’étude

Patients et résultats d’imagerie

Sur 930 patients épileptiques, 168 étaient négatifs à l’IRM et 33 ont rempli les critères d’inclusion, ayant subi une intervention chirurgicale et bénéficié d’un suivi. Parmi ces 33 patients, 23 (69,7%) n’ont pas présenté de crises graves (grades I-II de l’ILAE).

Parmi les techniques individuelles, seule l’imagerie des sources électriques (ESI) affichait un ratio de cotes (OR) supérieur à 1,5 (valeur de 3,2) en considérant les patients présentant des décharges épileptiformes interictales (IEDs). En combinaison, SISCOM et ESI ont montré les meilleurs résultats avec un OR de 6. La sensibilité de l’analyse morphologique de l’IRM (MAP) à détecter des dysplasies corticales locales était de 75%. La cohérence des résultats entre PET, ESI et SISCOM était associée à la probabilité de contrôle des crises postopératoires la plus élevée (OR=11).

Appui des données

Les résultats de l’étude indiquent que dans les cas négatifs à l’IRM, le taux de succès chirurgical peut être presque équivalent à celui des épilepsies avec lésions visibles à l’IRM, si diverses techniques d’imagerie non invasive sont appliquées strictement et de manière complémentaire.

Conclusion

Les résultats soulignent l’importance d’une utilisation concertée de diverses techniques d’imagerie non invasive dans les cas d’épilepsie négative à l’IRM. Si ces techniques sont appliquées strictement et que leurs résultats sont précisément co-enregistrés, les résultats postopératoires peuvent être significativement améliorés, avec des implications cliniques importantes.

Points forts de l’étude

  1. Effet synergique des techniques d’imagerie: Cette étude a montré que l’effet d’une seule technique d’imagerie est limité, alors que la combinaison de plusieurs techniques améliore significativement les taux de diagnostic et de succès chirurgical.
  2. Importance des techniques d’imagerie non invasive: Les techniques comme la PET, SISCOM et ESI fournissent des informations cruciales même dans les cas négatifs à l’IRM, offrant ainsi aux cliniciens plus d’outils diagnostiques et de prises de décision.
  3. Valeur de l’analyse morphologique de l’IRM (MAP) : Bien que limitée dans son objectif, MAP s’avère efficace pour détecter des dysplasies corticales locales difficiles à distinguer.

Limites et perspectives futures

Les limites de cette étude incluent sa nature rétrospective et la taille d’échantillon relativement petite. Néanmoins, l’étude démontre clairement l’importance d’utiliser plusieurs techniques d’imagerie non invasive dans les cas d’épilepsie focale négative à l’IRM. Des recherches futures devraient continuer à valider l’applicabilité générale de ces technologies et explorer comment améliorer davantage leur précision diagnostique et le succès chirurgical. L’étude recommande en outre l’intégration de multiples méthodes d’imagerie non invasive dans la pratique clinique pour optimiser les résultats chirurgicaux des patients.