Connectivité fonctionnelle anormale dans les régions cérébrales des patients atteints du syndrome de mutisme cérébelleux après chimiothérapie

Le gliome des cellules souches névrogènes est la tumeur cérébrale maligne la plus fréquente chez les enfants, et la chirurgie est le principal traitement. Cependant, une chirurgie de la fosse postérieure peut entraîner une complication appelée “syndrome cérébelleux mutique de l’enfant (Cerebellar Mutism Syndrome, CMS)”. Le CMS se caractérise principalement par des symptômes temporaires comme l’aphasie, des troubles moteurs et des anomalies émotionnelles, ce qui a un impact sévère sur les jeunes patients. Les études précédentes suggéraient que le CMS pourrait résulter de la perturbation des connexions entre le cervelet et d’autres régions cérébrales, mais son mécanisme physiopathologique exact reste incertain.

Source de l’article : Cette étude a été réalisée par Samuel S. McAfee et al. de l’Hôpital de Recherche Pédiatrique St. Jude aux États-Unis, et publiée en 2024 dans la revue Neuro-Oncologie. Les chercheurs ont analysé la connectivité fonctionnelle cérébrale après la chirurgie chez 70 enfants atteints de gliome des cellules souches névrogènes par imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf), dans le but d’explorer le mécanisme du CMS.

Processus de recherche :

a) Les sujets étaient 70 enfants atteints de gliome des cellules souches névrogènes, divisés en un groupe CMS (32) et un groupe témoin asymptomatique (38). Tous les patients ont subi une IRMf immédiatement après la chirurgie. Connectivité fonctionnelle des régions cérébrales dans le CMS aigu

b) Les chercheurs ont extrait 33 nœuds fonctionnels des données IRMf du cerveau entier à l’aide de l’analyse en composantes indépendantes (ACI), notamment le cortex cérébelleux, le thalamus, le noyau rouge, etc. En calculant la corrélation temporelle entre les nœuds, ils ont pu évaluer l’intensité de la connexion fonctionnelle entre eux.

c) À l’aide d’images structurelles, les chercheurs ont tracé la zone de résection chirurgicale de chaque patient et calculé le degré de lésion du pédoncule cérébelleux supérieur (Superior Cerebellar Peduncle, SCP), une voie de connexion importante entre le cortex cérébelleux et le cortex cérébral.

Principaux résultats :

  1. Par rapport au groupe témoin, les patients CMS présentaient une connectivité fonctionnelle significativement renforcée entre le cortex cérébelleux droit et le cortex cérébral gauche, en particulier une connectivité renforcée entre le cortex cérébelleux droit et le cortex préfrontal ventromédian gauche (Ventromedial Prefrontal Cortex, VM- PFC).

  2. L’intensité de la connexion entre le cortex cérébelleux droit et le VM-PFC n’était pas liée au degré de lésion du SCP, suggérant que cette connectivité anormale pourrait résulter d’une augmentation des entrées du VM-PFC vers le cervelet plutôt que d’une lésion des voies de sortie cérébelleuses. En revanche, la connectivité entre le cervelet et les régions liées au langage telles que l’aire de Broca dépendait de l’intégrité du SCP.

  3. Chez les patients CMS, la connectivité entre le cortex cérébelleux postérieur et les noyaux cérébelleux ipsilatéraux était modifiée, avec une anti-corrélation anormale dans certaines régions, suggérant une perturbation de la transmission des signaux au sein du cervelet.

Signification de la recherche :

  1. Signification scientifique : Cette étude a révélé pour la première fois in vivo les anomalies de la connectivité fonctionnelle entre le cervelet et le cerveau, ainsi qu’au sein du cervelet chez les patients CMS, fournissant de nouvelles pistes pour élucider les mécanismes de la maladie.

  2. Signification clinique : L’anomalie de la connectivité fonctionnelle cervelet-VM-PFC découverte dans l’étude pourrait être liée aux troubles du contrôle émotionnel et de l’apprentissage moteur fréquemment observés chez les patients CMS. Les anomalies de la connectivité cortex cérébelleux-noyaux pourraient également affecter les fonctions cognitives des patients. Ces découvertes aident à expliquer la complexité des symptômes cliniques du CMS et ouvrent la voie à des traitements ciblés à l’avenir.

Points forts de l’étude :

  1. Première découverte d’une anomalie des boucles d’entrée cérébelleuse dans le CMS, proposant une nouvelle explication physiopathologique.

  2. Utilisation d’une méthode d’extraction de nœuds fonctionnels pilotée par des données indépendantes, garantissant l’applicabilité du schéma d’analyse aux stades de développement et aux états pathologiques.

  3. Combinaison avec l’analyse d’images pathologiques pour distinguer la relation entre les anomalies de connectivité fonctionnelle et les lésions des voies de sortie cérébelleuses.

Cette étude apporte un nouvel éclairage sur l’énigme neurologique du CMS qui persiste depuis longtemps, suggérant que le CMS pourrait résulter d’une réaction en cascade où le cervelet perd ses entrées normales et son activité neuronale devient anormale, entraînant des dysfonctionnements cérébraux. À l’avenir, une étude approfondie du rôle de la boucle cervelet-VM-PFC dans le traitement émotionnel et le contrôle moteur pourrait ouvrir de nouvelles cibles thérapeutiques pour le CMS.